OBSERVATOIRE
Fortes augmentations des marges brutes

L’augmentation des prix à la consommation des produits suivis par l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM) n’a pas systématiquement profité aux agriculteurs et aux éleveurs, mais a permis à de nombreux industriels et à la grande distribution de reconstituer leurs marges brutes.

Fortes augmentations des marges brutes
Pour chaque 100 € dépensés en alimentation par les ménages français, les agriculteurs ne reçoivent que 6,40 €, contre 15,50 € pour la distribution, dénoncent la FNSEA et Jeunes agriculteurs. ©StockAleksanderTumko

Chaque début d’été, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM) remet un nouveau rapport au Parlement. Cette année, le quatorzième ouvrage « affine l’analyse de l’impact de l’inflation pour les différents maillons de la chaîne alimentaire, avec les données de marges nettes 2022 et de marges brutes 2023 », précisent ses contributeurs. Ce décalage d’un an s’explique par les délais nécessaires pour traiter les données collectées. En 2023, l’inflation générale est restée autour de 5 %, tandis que l’inflation alimentaire a atteint 12 %. D’après l’Insee, l’alimentation a été la principale contributrice à l’inflation d’ensemble entre septembre 2022 et septembre 2023.

Marges comprimées

« Dans l’ensemble, le coût des matières premières agricoles a encore augmenté en 2023. Mais les marges brutes aval, qui avaient été comprimées ou étaient restées stables en 2022, ont pour la plupart progressé en valeur en 2023, pour atteindre parfois un niveau supérieur à celui observé sur la période récente, en lien avec la progression des autres charges depuis fin 2021 (énergie, emballages, salaires, services…) », constate l’OFPM. En viande bovine, le coût entrée-abattoir de l’animal livré n’a progressé que de 0,11 €/kg de carcasse en un an. Or le kilogramme du prix moyen annuel au détail d’un panier saisonnier de viande de bœuf a augmenté d’1,10 €/kg l’an passé. Mais grâce à cette hausse, la marge brute de la grande distribution a crû de 0,56 €/kg pour atteindre un niveau inégalé de 3,82 €/kg et celle de l’industrie de l’abattage de la découpe de la première et deuxième transformation de 0,40 €/kg à 1,22 €/kg.

La MPA a peu progressé

En 2022, la flambée des prix du blé et de l’énergie avait été très forte. La filière boulangère ne l’a pas répercutée dans son intégralité. Aussi, la marge nette historiquement négative avait fortement baissé (- 5,40 €/100 € de chiffre d’affaires versus -1,30 €/100 € en 2021). L’an passé, les marges brutes se sont reconstituées à un niveau supérieur à celui observé depuis 2019. La forte augmentation du prix du pain (+ 28 c/kg) contraste avec la baisse du prix du blé (- 11 c/kg). En grande distribution, la boulangerie pourrait redresser partiellement sa marge nette. Autre enseignement du rapport de l’OFPM : « la part des matières premières dans les prix au détail des produits a globalement peu progressé l’an passé par rapport à 2022, en raison des reconstitutions des marges brutes par l’aval des filières, même si cette stabilité moyenne cache des disparités ». Par exemple, « le panier de fruits, celui de légumes et les pommes de terre ont ainsi suivi la tendance générale, avec une progression des prix amont et des marges brutes aval », souligne le rapport de l’OFPM.

Revenu disponible

« Mais lorsque le coût de la matière première agricole a augmenté dans les produits alimentaires suivis par l’Observatoire, les résultats nets des exploitations agricoles concernées se sont également améliorés. » En 2022, le résultat courant avant impôt (RCAI) des éleveurs de volaille a progressé de près de 57 %. En viande porcine, le prix du kilogramme de porc entré dans l’abattoir a augmenté de 0,70 € en trois ans. Et bien que les charges d’élevage aient entre-temps crû, le revenu disponible a atteint 0,20 €/kg. Le prix du jambon à l’abattage a flambé de 1,80 €/kg en trois ans. Certes, l’industrie est parvenue à répercuter ce coût puisque ses marges brutes ont augmenté de 3 €/kg jusqu’à atteindre des niveaux inégalés. Toutefois, la grande distribution a été contrainte de rogner les siennes (-1,25 €/kg). Sa marge nette (8,20 €/kg en 2022) a perdu 1,50 €/kg en un an.


Actuagri

 

FNSEA et JA plaident pour un renforcement des lois Égalim

Dans un communiqué du 26 juillet, la FNSEA et Jeunes agriculteurs (JA) ont réagi à la publication du rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM). Il ne fait aucun doute, selon les deux organisations syndicales agricoles, que « les distributeurs ont reconstitué leurs marges. Pour chaque 100 € dépensés en alimentation par les ménages français, les agriculteurs ne reçoivent que 6,40 €, contre 15,50 € pour la distribution », dénoncent-elles. FNSEA et JA qui plaident pour un renforcement des lois Égalim, réclament une meilleure répartition de la valeur ajoutée tout le long de la filière, en particulier par la mise en place de prix d’achat pour les agriculteurs, basés sur des indicateurs de coûts de production interprofessionnels. Les deux syndicats entendent également que les négociations commerciales en amont se concluent « avant l’envoi des conditions générales de vente ».