JEUX OLYMPIQUES
Edgar Grospiron : « J’avais annoncé avant la compétition que j’allais remporter l’or »

Propos recueillis par Baptiste Vlaj
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Alors que la 24e édition des Jeux olympiques d’hiver se déroule en Chine du 4 au 20 février, Edgar Grospiron, natif de Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie) et champion olympique de ski de bosses à Albertville (Savoie) en 1992, nous a accordé un entretien. Il revient sur son parcours sportif, sa reconversion et les Jeux olympiques, un évènement sportif incontournable.

Edgar Grospiron : « J’avais annoncé avant la compétition que j’allais remporter l’or »
Il y a trente ans, Edgar Grospiron devenait le premier champion olympique de ski de bosses à Albertville (crédits photo : Sylvie Chappaz).

Vous êtes champion de ski acrobatique, spécialisé notamment dans l’épreuve des bosses. C’est un sport très spectaculaire mais qui reste encore assez méconnu. Pouvez-vous nous parler de cette discipline ?

Edgar Grospiron : « C’est vrai que c’est un sport assez confidentiel même si c’est pourtant une discipline olympique. Concrètement, le ski de bosses se pratique sur une pente très raide de 300 m de long pour 150 m de large, où sont aménagées des bosses. Le parcours prévoit deux sauts avec des figures en l’air à réaliser. L’objectif pour le skieur est de faire comme s’il n’y avait pas de bosses. L’aspect technique, les sauts et le temps de passage sont pris en compte par le jury. C’est une discipline acrobatique qui nécessite pas mal d’explosivité de la part de l’athlète. Les Français sont plutôt bons dans ce domaine et ramènent beaucoup de médailles. »

D’où vous est venue cette passion pour le ski de bosses ?

E.G. : « Disons que je suis arrivé au ski de bosses un peu par défaut. J’ai commencé par le ski alpin au club de La Clusaz (Haute-Savoie), mais ce n’était pas trop ma tasse de thé et je ne prenais pas vraiment de plaisir. Quand j’ai eu 16 ans, les moniteurs m’ont un peu “viré” en m’envoyant faire des bosses. C’était le placard doré pour moi. Tout de suite, je me suis éclaté, je savais que j’avais trouvé ma voie, mon terrain d’expression. »

En 1992, vous avez décroché le Graal avec une médaille d’or olympique aux Jeux olympique d’Albertville, dans votre région. Comment l’avez-vous vécu ?

E.G. : « Le fait de participer aux Jeux olympiques dans son pays, déjà, c’est une pression supplémentaire. Personnellement, j’ai réussi à la transformer en bonne pression. J’avais d’ailleurs annoncé avant la compétition que j’allais remporter l’or. J’étais confiant et cela s’est ressenti aussi dans le public qui me soutenait. C’est un souvenir incroyable ».

Vous avez été sacré champion olympique à seulement 23 ans, comment est-ce que l’on gère la pression et la notoriété si jeune ?

E.G. : « La pression, on apprend à la gérer progressivement parce qu’on n’arrive pas aux Jeux olympiques du jour au lendemain. J’ai fait des centaines de courses, les championnats de France, des Coupes d’Europe et du monde. On apprend le métier sur le tas. C’est sûr que plus l’épreuve est importante, plus la pression l’est aussi. C’est donc capital d’apprendre à bien se connaître.
Le but, c’est de réguler cette pression car on ne peut pas la faire disparaître complètement. »

Si vous deviez retenir une médaille plus qu’une autre, ce serait laquelle et pourquoi ?

E.G. : « J’en retiens deux si vous me l’accordez. D’abord, celle des Jeux olympiques parce que sportivement, il n’y a rien de plus beau. La deuxième, c’est la victoire à mes derniers championnats du monde, chez moi, à La Clusaz. C’est avec cette course que je mets fin à ma carrière, je sors par la grande porte. »

Vous avez porté la candidature de la ville d’Annecy pour les Jeux olympiques d’hiver de 2018. Vous l’avez fait par attachement à votre région ?

E.G. : « Je suis à la fois attaché à ma région et à l’olympisme. Cela a été pour moi une aventure assez incroyable car j’ai eu la chance de pouvoir contribuer et diriger cette candidature. Malheureusement, nous n’avons pas réussi. C’est un regret mesuré parce que je pense que si nous n’avons pas ramené les Jeux olympiques en 2018, cela a tout de même aidé à décrocher ceux de Paris en 2024. Cela peut permettre de créer une dynamique et pourquoi pas de revoir un jour les Jeux olympiques d’hiver en France. »

Aujourd’hui, vous êtes conférencier. En quoi consiste votre nouvelle profession ?

E.G. : « Les entreprises organisent des séminaires régulièrement où elles réunissent leurs équipes pour faire passer des messages inspirants qui motivent. Dans le cadre de ces séminaires, les dirigeants de ces entreprises aiment bien faire intervenir des gens extérieurs qui font partager leur expérience. Certaines personnes viennent du monde de la cuisine, d’autres sont militaires, c’est assez varié, mais chacun vient d’un domaine où l’on cherche à performer. Cela permet aux salariés de prendre du recul sur ce qu’ils vivent, de remettre de l’énergie et de la motivation dans leur quotidien. Là encore, j’ai appris sur le tas. Au début, je me suis formé à la prise de parole en public, il a aussi fallu que je structure mon discours et que je crée mon activité. Il m’est d’ailleurs arrivé d’intervenir pour une coopérative agricole au nord de Paris. J’avais en face de moi des chefs d’exploitation agricole. Je me suis retrouvé avec des personnes qui partagaient les mêmes valeurs : une attache à leur terre, leur patrimoine, leur terroir. Dans le sport, nous sommes aussi attachés à une certaine éthique, on est fiers de représenter notre pays. C’était une belle rencontre. »

Les Jeux olympiques d’hiver se dérouleront dans un contexte particulier. Comment auriez-vous vécu cela et quels athlètes en particulier comptez-vous suivre ?

E.G. : « Je n’aurais pas été déçu parce que le contexte fait partie du jeu et cela n’enlève rien au titre de champion olympique. J’aurais essayé d’avoir une approche constructive par rapport à cela et de faire preuve d’assez peu de sentiments pour aborder l’événement. Quand on est sportif, on a des objectifs clairs, on doit rationaliser et ne pas se laisser perturber. Pour revenir à la compétition, ma favorite est Perrine Lafont. J’espère qu’elle va réussir à enfoncer le clou. Elle a été championne olympique de ski de bosses il y a quatre ans, ce serait beau qu’elle réussisse le doublé, elle le mérite. »

PROGRAMME / En route vers les 24e JO d’hiver
« Together for a shared future » (ensemble pour un avenir commun) est la devise officielle de ces Jeux olympiques.

PROGRAMME / En route vers les 24e JO d’hiver

Les Jeux olympiques d’hiver se déroulent à Pékin du 4 au 20 février 2022. Au programme de ces jeux : 15 sports, 109 épreuves mais pas de spectateurs.

Le 4 février 2022, direction Pékin et plus précisément le Stade national pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’hiver 2022. Avec 3 000 athlètes attendus dans 15 sports pour 109 épreuves, l’hiver sera animé du côté de Pékin, première ville de l’histoire à accueillir les Jeux olympiques d’été et d’hiver après 2008. Pour cette 24e édition, sept nouvelles épreuves font leur apparition au programme olympique : le cross par équipes mixtes en snowboard, le bobsleigh monoplace féminin, le relais mixte en short-track, le saut à ski par équipes mixtes, le ski big air masculin et féminin ainsi que le saut par équipes mixtes en ski acrobatique. Les Jeux olympiques se dérouleront sur trois sites : Pékin, Yanqing et Zhangjiakou.

Le Covid-19 dans toutes les têtes

Le comité d’organisation des Jeux olympiques d’hiver de Pékin a annoncé annuler la vente de tickets au grand public chinois et international en raison de la situation épidémique. Dans le but d’éviter toute contagion d’ampleur, c’est donc quasiment sans spectateurs que se dérouleront ces Jeux olympiques d’hiver. Le comité international se laisse cependant le droit de distribuer quelques « invitations » sans donner plus de détails. Comme l’été dernier à Tokyo, il va donc falloir se faire à l’idée d’assister à des Jeux olympiques à huis clos ou presque. Quoi qu’il en soit, la délégation française sera bien au rendez-vous avec de nombreuses chances de médailles comme Alexis Pinturault en ski alpin, Perrine Lafont en ski de bosses ou encore le duo Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron en patinage artistique. Pour leur montrer la voie, ce sont les skieurs Tessa Worley et Kevin Rolland qui porteront le drapeau tricolore de la délégation française lors de cérémonie d’ouverture.

EDGAR GROSPIRON / Dates clés

• 17 mars 1969 : naissance d’Edgar Grospiron à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie).

• 1986 : Premières sélections en équipe de France de ski acrobatique.

• Jeux olympiques d’hiver de 1988 à Calgary (Canada) : médaille de bronze en ski de bosses (sport en démonstration).

• Championnats du monde de ski acrobatique de 1989 à Oberjoch (Allemagne) : médaille d’or.

• Championnats du monde de ski acrobatique de 1991 à Lake Placid (États-Unis) : médaille d’or.

• Jeux olympiques d’hiver de 1992 à Albertville (France) : médaille d’or.

• Jeux olympiques d’hiver de 1994 à Lillehammer (Norvège) : médaille de bronze.

• Championnats du monde de ski acrobatique de 1995 à La Clusaz (France) : Médaille d’or.

• 2001 : Reconversion en tant que conférencier.

• 2009 : Ambassadeur pour la candidature de la ville d’Annecy pour les Jeux olympiques. n