CHAMBRE D’AGRICULTURE
Une session tournée vers l’avenir

Les élus de la chambre d’agriculture de l’Ardèche se sont réunis, lundi 30 septembre à Privas, pour l’avant-dernière session de la mandature 2019-2025. L'occasion de dresser un bilan et d'évoquer l'actualité agricole du département.

Une session tournée vers l’avenir
Lés élus réunis en session, lundi 30 septembre à Privas.

Au-delà du bilan d’activité présenté lors de l’avant-dernière session de la mandature 2019-2025 de la chambre d’agriculture de l’Ardèche, les échanges ont porté sur les points forts de l’actualité agricole ardéchoise. Une actualité marquée principalement par l’évolution de l’épizootie de fièvre catarrhale ovine (FCO), la lutte contre la Drosophila suzukii et les pertes liées aux aléas climatiques de l’année.

Après avoir vu exploser les interventions d’équarrissage liées à la FCO de sérotype 8, « on semble avoir passé le pic de la maladie aujourd’hui », a informé Sylvain Balmelle, vice-présidente de la chambre d’agriculture en charge du service Entreprises, « mais nous sommes soumis aussi à la pression de la FCO-3 qui sera là l’année prochaine, sous le sérotype que l’on connait ou un autre ». Pour ce sérotype aussi, la vaccination des troupeaux est vivement conseillée : « Ce sont deux sérotypes différents, le fait que l’un soit passé ne protège pas de l’autre », a rappelé le président du GDS de l’Ardèche, Mickaël Richard.

FCO-8 : « il faudra s’attendre à de gros dégâts »

Pour l’heure, il faudra s’attendre à « de gros dégâts directs et indirects (stérilité, avortements, baisse de productivité) de la FCO-8, et une fragilisation des exploitations ardéchoises », a prévenu Christel Cesana, vice-présidente de la chambre d’agriculture en charge du service Économie des filières. Une motion relative à l’indemnisation de ces pertes a été votée en session. Elle demande notamment « un accompagnement financier basé sur l’ensemble du cheptel et non uniquement sur le nombre d’animaux morts, en tenant compte des pertes directes et indirectes » et « d’inclure les exploitations touchées par la maladie dans le cadre de la force majeure pour sauvegarder les aides Pac 2024 et 2025 ». Cette motion souligne aussi le besoin de mettre en place un programme de recherche, ainsi qu’une cellule d’urgence et de protocole d’anticipation des épizooties. Alors qu’une prise en charge complète des vaccins contre la FCO-8 est également demandée, les élus ont interpellé les services de l’État sur « la gratuité des vaccins » face à une maladie enzootique, et la nécessité d’assurer leur disponibilité et de lutter contre les effets de spéculation. John Benmussa, secrétaire général de la préfecture de l'Ardèche depuis début septembre, a évoqué l’ouverture d’un programme d’indemnisation « pour les pertes liées à la mortalité des animaux mais aussi à l’euthanasie pour des raisons de bien-être animal » par le FMSE1, dont les niveaux d’indemnisation devraient être communiqués prochainement. « Le système d’alerte et d’anticipation est un point important sur lequel on doit s’améliorer tous collectivement. Le sous-préfet de Largentière va travailler avec l’ensemble de la profession à la mise en place d’un système d’alerte plus performant, qui s’inspire de ce que fait le ministère de l’Intérieur en matière de gestion de crise, avec des alertes envoyées automatiquement par SMS aux personnes qui se trouvent dans le périmètre concerné. »

Drosophila suzukii : en quête d’indemnisation et de recherche

Face aux « 80% de pertes sur petits fruits » liées à la Drosophila suzukii cette année en Ardèche, les élus ont adopté une seconde motion relevant de la lutte contre ce ravageur. « C’est un sujet face auquel nous restons sans solution. Nous travaillons sur un projet de recherche avec l’Inrae (lâcher de l’auxiliaire Ganaspis kimorum) mais nous n’avons pas de visibilité sur les prochaines années et nous avons vu disparaître une partie de la capacité économique de nombreuses exploitations », a rappelé le président de la chambre d’agriculture, Benoit Claret. Cette motion demande davantage d’efforts de recherche, ainsi qu’une indemnisation prenant en compte toutes les productions d’une exploitation touchée et non son taux de spécialisation, qui pénalise les exploitations diversifiées en petits fruits, très nombreuses dans le département. « À date, il n’est pas prévu d’aides exceptionnelles pour l’année 2024 », a indiqué John Benmussa. « Il faut laisser le temps à la recherche de mesurer l’impact que l’introduction de ce nouveau prédateur pourrait avoir. »

Dispositif de gestion des risques climatiques

Avec une année marquée par des excès d’eau, de la grêle et une moyenne quinquennale des exploitations ardéchoises « catastrophique au fil du temps », le dispositif de gestion des risques climatiques affiche ses limites pour les élus. Il faisait l’objet d’une troisième motion, demandant notamment pour l’assurance multi-risques de réintégrer les pertes liées aux aléas dans la moyenne quinquennale et de prendre en compte la spécificité des productions, territoires et valorisations. « On ne peut pas être assuré dans sa globalité. L’assurance récolte doit être à l’échelle de l’exploitation et de la parcelle », a précisé Christel Cesana. Les élus ont interpellé également sur l’appui d’expertises terrain (observatoire national de la pousse de l’herbe et tournées calamités) complémentaires à l’indice satellite de pousse des prairies, en cas de litige. Pour les pertes en arboriculture liés aux excès d’eau et les pertes en viticulture, grandes cultures et Ppam à la suite de l’épisode de grêle du mois de juillet, « les demandes d’indemnisation sont prises en compte avec des paiements qui devraient intervenir d’ici la fin de l’année. La question de dégrèvement de la taxe foncière non bâti est en cours de discussion également », a informé le sous-préfet. « Sur l’apiculture, on travaille actuellement sur une demande de reconnaissance et la décision devrait intervenir en octobre. »

« Remettre sur pied l’ouvrage des mesures à apporter à la crise agricole »

Enfin, une motion portant sur la modification du statut des chiens de protection a été adoptée, dans le souhait « d’apporter une réponse collective à un problème collectif et non individuel de l’éleveur », a précisé Benoit Claret. John Benmussa de souligner le caractère national de ce sujet et d’annoncer que « des réflexions sont en cours sur la mise en place d’une cellule de médiation pour accompagner les conflits entre les éleveurs et les usagers de la nature ».

Appelant à « être réaliste » face à un « contexte difficile », il a évoqué également la volonté de la nouvelle ministre de l’Agriculture de « remettre sur pied l’ouvrage des mesures à apporter à la crise agricole », interrompu avec la dissolution de l’Assemblée nationale. Il a mentionné également la procédure de mise en valeur des terres incultes, « un sujet particulièrement important car la surface agricole utile n’occupe que 23% du territoire, à peu près la moitié de ce qu’on obtient à l’échelle régionale. Cette procédure devrait nous permettre d’avancer, de préserver ce qui existe et d’être attentif aux enjeux économiques de la transformation de ces terres ».

A.L.

1. Fonds de mutualisation du risque sanitaire et environnemental.

BILAN

Soutien et développement de l’agriculture ardéchoise

À l’approche des élections des chambres d’agriculture prévues en janvier prochain, les nombreux travaux déployés par l’actuelle mandature de la chambre ardéchoise ont été mis en lumière lors de la dernière session. 

Les actions développées par la chambre d’agriculture de l’Ardèche sur la mandature 2019-2025 concernent des projets stratégiques tournés vers les transitions économiques, sociétales et climatiques, la création de valeur dans les territoires, le dialogue avec la société et l’efficacité du réseau des chambres.

Si les enjeux sont nombreux, ces projets ont visé globalement à renforcer l’économie des territoires et la résilience des exploitations face au changement climatique, faciliter l’installation et la transmission, tout en encourageant à l’innovation. « Nous avons des points centraux qui sont devenus plus prégnants », dont « le dérèglement climatique, sujet récurrent, avec des actions qui ont été menées tout au long de ce mandat », a souligné le président de la chambre, Benoit Claret. L’ambition a été d’accompagner les exploitations face aux contraintes du changement climatique et développer leur performance et leur résilience dans ce contexte. « Nous sommes fiers des réalisations accomplies et prêts à relever de nouveaux défis pour continuer à faire progresser notre agriculture locale et construire un avenir durable. »

La chambre est également un acteur incontournable en matière d’innovation et d’expérimentation, en s’étant engagée sur divers projets de Recherche & Développement, dont le dernier en date est le lâcher de l’auxiliaire Ganaspis kimorum pour lutter contre la Drosophila suzukii.

Les services liés à l’installation et à la transmission restent également une des priorités de la chambre d’agriculture de l’Ardèche. « C’est un sujet bouillonnant qui est difficile mais qui fonctionne bien », a indiqué Sylvain Balmelle, vice-président de la chambre d’agriculture en charge du service Entreprise. « On fait partie des départements où le déficit d’installation est le moins marqué et 80% des départs sont compensés, mais nous aimerions en faire plus malgré tout. »

Sur le volet de l’emploi, huit regroupements d’employeurs ont été créés notamment afin de pallier les difficultés de recrutement sur l’ensemble du territoire. Un regroupement départemental devrait aussi entrer en fonctionnement dans les prochains mois.

En proposant près de 450 formations et en renouvelant 25% de son offre chaque année, la chambre reste également la structure la plus sollicitée par les porteurs de projets d’installation ou les exploitants dans ce domaine.

Elle encourage aussi la valorisation des filières, des productions et des marques qualitatives, des pratiques agricoles et de leur impact positif sur le territoire, telle que le pastoralisme, les circuits courts, l’agritourisme…

A.L.

ILS ONT DIT /

« Un état d’esprit collectif, raisonnable et raisonné »

Président de la chambre d’agriculture de l’Ardèche, Benoit Claret, a tenu à souligner en clôturant son discours « un élément essentiel » dans cette phase élective des chambres d’agriculture : « Nous n’avons pas la place pour des oppositions frontales en Ardèche ». Il a appelé à adopter « un état d’esprit collectif, raisonnable et raisonné, dans le cadre de cette élection, afin d’être encore une agriculture revendicatrice, libre de pouvoir se déployer sur tous les territoires et à travers toutes les filières ».

« La transition écologique est une nécessité impérieuse »

John Benmussa, secrétaire général de la préfecture de l'Ardèche, s’est exprimé sur le cadre global de l’action publique en matière de soutien à l’agriculture, résolument placée sous le signe de la transition écologique. « La transition écologique est une nécessité impérieuse dans le département en particulier, qui est soumis à de forts épisodes de sécheresse. La question de l’eau doit retenir notre attention, car nous consommons beaucoup plus d’eau que ce que la nature peut nous offrir ce qui doit amener en permanence à la recherche d’un équilibre entre la prévention des milieux, des pratiques et des prélèvements naturellement nécessaires à l’activité d’agriculture. » Depuis 2021, 28 projets ont été autorisés avec l’accord cadre sur la gestion quantitative de l’eau. John Benmussa a rappelé également les ambitions prises au sein de l’accord cadre eau et agriculture en 2023 : « l’adaptation des exploitations au changement climatique, l’amélioration des dispositifs d’irrigation existants et la création de projets territoriaux visant à mobiliser, améliorer, sécuriser l’accès à la ressource en eau ainsi que la valorisation des milieux aquatiques ».

Dans le cadre de la conférence des parties (COP) départementale, destinée à planifier la transition écologique à échelle du territoire, « des réflexions en cours sur les modifications à apporter aux codes des marchés publics pour développer des cahiers des charges permettant de valoriser la relocalisation et un meilleur approvisionnement ». Il a évoqué aussi l’animation d’un club des cuisiniers ardéchois pour valoriser le métier.

« Optimiste mais réaliste »

Matthieu Salel, vice-président du Département en charge de l’agriculture, de l’environnement et du tourisme, se veut « optimiste mais réaliste » dans l’accompagnement de l’agriculture ardéchoise. Il a rappelé le soutien de la collectivité sur la mise en valeur des terres incultes et auprès des éleveurs concernés par la FCO-8 (aides à la vaccination et la reconstitution des cheptels). « Nous réfléchissons aussi à la mise en place d’un dispositif qui soutiendrait l’installation de vétérinaires et la reprise de cabinets vétérinaires qui font de la rurale, avec de l’aide à l’investissement, auprès d’étudiants vétérinaires : bourse, aide au logement, à la formation… » Ces soutiens du Département, fruits de « politiques agricoles volontaristes », pourraient se voir « impactées selon les décisions à venir prises au niveau national », a interpellé l’élu.

Quid de l’agriculture en région en 2040 ?

Présentée en session, l’étude Prospect’Aura 2040 tend à explorer les futurs possibles de l’agriculture en région en 2040 et d’analyser leurs impacts. Une démarche visant à développer des actions adaptées !