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Côtes-du-Rhône : le nouveau président du syndicat général veut construire durablement

Mylène Coste
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VIN / Élu président du syndicat des vignerons des Côtes-du-Rhône, Denis Guthmuller entend pérenniser le tissu d’exploitations familiales et construire une filière durable, éthique et responsable, de l’amont à l’aval.

Côtes-du-Rhône : le nouveau président du syndicat général veut construire durablement
Concernant le changement climatique, le nouveau président du syndicat envisage de rebondir sur les discours vertueux des metteurs en marché, pour que ceux-ci assument et revalorisent les exploitations durables.

Élu président du syndicat général des vignerons des Côtes-du-Rhône le 15 décembre dernier par le conseil d’administration, Denis Guthmuller était déjà bien engagé dans le collectif. Ses multiples « casquettes » sont presque un « passage obligé », dit-il, dans le paysage complexe de la filière : secrétaire général du syndicat depuis 2014, trésorier depuis 2012, il co-préside la commission économique d’Inter Rhône depuis sept ans et devient vice-président de l’interprofession le 5 novembre 2020. Longtemps président de la cave Cécilia de Sainte-Cécile-les-Vignes (Vaucluse), il est aussi aujourd’hui vice-président de « Camille et Cécilia », suite à sa fusion avec la coopérative de Cairanne.

Pourtant, il ne s’était pas destiné à tout cela. C’est sa rencontre avec son épouse qui l’a décidé à reprendre l’exploitation familiale à la fin des années 1990. Pour cet Alsacien d’origine, ce fut donc un complet changement de vie et de carrière. Doté d’un diplôme en génie climatique, d’une « appétence pour les vins », il a dû tout apprendre en viticulture. Il se forme alors au CFPPA de Carpentras et, surtout, son beau-père lui transmet ce « métier noble » ainsi que ses premières terres en fermage, avec lesquelles il gagne en autonomie.

Coopérer

Il rejoint le conseil d’administration de la Cave Cecilia en 2002. « Je ne connaissais pas la coopération, et j’ai découvert qu’on peut facilement contribuer lorsqu’on est motivé. » Depuis, la cave de Cecilia a largement développé le bio et travaillé le profil de ses vins, en particulier pour ses rosés et ses blancs. Denis Guthmuller devient secrétaire de la cave en 2004, co-président en 2008, puis président. Il entre alors au conseil d’administration du Cellier des Dauphins et, de fil en aiguille, est sollicité pour intégrer le Syndicat général par Philippe Pellaton, son prédécesseur, parti pour la présidence d’Inter Rhône en 2020.

Sa motivation ? « Apporter au système coopératif, qui est vertueux et pertinent pour structurer notre filière de production. »

En cohérence

Concernant le changement climatique, il envisage de rebondir sur les discours vertueux des metteurs en marché, pour que ceux-ci assument et revalorisent les exploitations durables. « Cela redonnera au consommateur du lien avec le terroir, le territoire. » Faire bouger les lignes est devenu nécessaire. « Le consommateur, le premier, doit comprendre qu’un Côtes-du-Rhône à 2 €, ce n’est pas la vraie vie ! Avec la dernière crise, nous avons déjà réduit considérablement nos coûts de production. Je suis convaincu qu’il faut peu de revalorisation pour que tous s’en sortent. Notre activité à un coût, assumons-le. »

Quant à tous les sujets liés à l’ODG, la défense du nom « Rhône » (avec le déploiement du timbre de garantie), de hiérarchisation, une continuité sera maintenue car « c’est dans notre ADN », constate le président. Il évoque aussi les services aux adhérents, qui vont évoluer pour alléger leurs contraintes administratives devenues très lourdes. Par ailleurs, réactiver la commission des jeunes vignerons au bureau du syndicat permettra de créer une dynamique, et le vivier des dirigeants de demain. 

Denis Guthmuller entend donc construire dans la durée et la cohérence. Le 26 janvier, le nouveau président a détaillé sa feuille de route lors de l’assemblée générale du syndicat général des vignerons des Côtes-du-Rhône.

Cécile Poulain

« Le consommateur, le premier, doit comprendre qu’un Côtes-du-Rhône à deux euros, ce n’est pas la vraie vie ! Avec la dernière crise, nous avons déjà réduit considérablement nos coûts de production. Je suis convaincu qu’il faut peu de revalorisation pour que tous s’en sortent. Notre activité à un coût, assumons-le. » © C. Poulain
L’Ardéchois Philippe Faure devient secrétaire général du syndicat
Philippe Faure

L’Ardéchois Philippe Faure devient secrétaire général du syndicat

CÔTES DU RHONE / Déjà vice-président du syndicat des Côtes du Rhône, et fort d’une expérience d’une dizaine d’années au sein de l’organisme, Philippe Faure vient d’être élu secrétaire général.

Installé à Saint-Just-d’Ardèche, ce vigneron indépendant cultive aujourd’hui 20 ha de Côtes du Rhône, 7 ha de vins de pays et une dizaine d’ha de fruits (essentiellement kiwis). Il aborde sa nouvelle mission de secrétaire général avec détermination : « C’est beaucoup de temps et d’énergie, mais si on y va, c’est bien qu’on croit qu’on peut faire avancer les choses ! » Pourquoi cet engagement ? « Il me tient à cœur de pouvoir promouvoir une viticulture équitable en tous points de vue : envers l’environnement, la société, mais aussi le vigneron. Il faut mettre en avant les hommes qui font notre vin, faire en sorte qu’ils puissent vivre de leur métier, dans le respect de leurs voisins et de leur environnement. »

M.C.

À quoi ressembleront les vins des Côtes-du-Rhône demain ?

« D’abord, ils auront une qualité optimale, stable et homogène. Je veux que les consommateurs aient envie d’en racheter ! Nous avons des atouts pour associer nos vins à des valeurs environnementales, à un rapport qualité/prix cohérent. Nous pouvons performer davantage et il le faudra. » Le nouveau président du syndicat général envisage d’identifier les besoins du marché, avant d’auditer les pratiques actuelles, en tenant compte de l’élément clé qu’est le changement climatique. « Pour cela, la filière sera sollicitée. Aux metteurs en marché, qui sont au contact des distributeurs et des clients, nous demanderons : de quoi avez-vous besoin pour vendre du vin durablement ? »

Derrière cela, son idée première est de valoriser le revenu des vignerons, de pérenniser ce métier, et de redonner envie aux jeunes de s’y lancer. « Je suis extrêmement motivé pour que nous construisions une chaîne de valeur viable pour tous, ajoute Denis Guthmuller. Car, aujourd’hui, nous sommes encore en incapacité d’appréhender les prix et nous vendons parfois à perte. »

Pour y arriver, il a identifié deux axes : maintenir le potentiel de production, avec un maximum de projets collectifs d’irrigation ; et équilibrer les exploitations, grâce à un rendement de production le plus proche possible du rendement nominal, auquel il faut ajouter 9 hectolitres par hectare de volume complémentaire individuel (VCI), soit 60 hl/ha idéalement, alors qu’il est à 40,9 en moyenne en 2020. « L’enjeu est de perpétuer, de génération en génération, ce tissu de petits producteurs, d’exploitations familiales. Cela passera par la définition des prix sur l’ensemble des éléments de la filière, tenant compte des coûts de production et de la rentabilité des exploitations. » Pour tous ces projets, le syndicat s’appuiera sur l’Institut rhodanien, dont la gouvernance évolue en SAS, pour plus d’efficacité.

Le nouveau bureau du syndicat    

Président : Denis Guthmuller.

Secrétaire général et vice-président : Philippe Faure (Saint Just d’Ardèche).

Vice-présidents : Pierre Combat (Mercurol), Damien Gilles (Pont Saint Esprit), Serge Roux (Piégon), Claude Chabran (Beaumes de Venise).

Trésorier : Grégory Brunel (Chusclan).

Membres : Denis Alary (Cairanne), Alain Aubert (Travaillan), Benoît Blain (Sainte-Cécile-les-Vignes), Bernard Borie (Saint-Pantaléon-les-Vignes), Christophe Charransol (Richerenches), Rodolphe de Pins (Montfaucon), Vincent Dessalles (Piégon), Joël Durand (Châteaubourg), Guillaume Long (Saint-Roman-de-Malegarde), Karine Ogier (Saze), Françoise Roumieux (Châteauneuf-du-Pape).

Invité Jeune vigneron : Julien Courdesse (Roquemaure).