ÉCONOMIE LOCALE
Le tourisme, une aubaine pour la Montagne ardéchoise

Mylène Coste
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À l’été 2020, la fréquentation touristique a explosé sur la Montagne ardéchoise. Avant tout motivée par le contexte post-confinement, cette dynamique pourrait toutefois s’inscrire durablement et amener des changements dans la vie locale.

Le tourisme, une aubaine pour la Montagne ardéchoise
Les randonneurs ont été nombreux cet été sur le sentier du Mézenc. ©Parc des Monts d'Ardèche.

« L’hiver, Laveyrune compte une vingtaine d’habitants. Mais cet été, nous étions une centaine. Cela doit faire vingt ans que je n’avais pas vu autant de volets ouverts ! », plaisante Alain Ranc, agriculteur et maire de la commune. En effet, la crise du coronavirus a suscité un réel intérêt des touristes pour la France rurale. Après la frustration des confinements, les Français ont convoité les grands espaces. La Montagne ardéchoise a bénéficié cet été d’un afflux exceptionnel de visiteurs.

Beaucoup de résidences secondaires

Parmi les hébergements, les résidences secondaires ont été fortement fréquentées. C’est notamment le cas à Laveyrune, petit village à la frontière de la Lozère : « Parmi les résidences secondaires, on compte beaucoup d’enfants et petits-enfants d’habitants, qui reviennent dans la maison familiale, observe Alain Ranc. La plupart sont arrivés dès début juillet, soit beaucoup plus tôt que d’habitude, et sont restés beaucoup plus longtemps, voire ne sont pas repartis. »

Même son de cloche à Saint-Étienne-de-Lugdarès : « Le camping a très bien tourné durant tout l’été, malgré l’absence d’animations dans le village du fait des contraintes sanitaires. Mais ce sont surtout les résidences secondaires qui ont fait carton plein, souligne Françoise Benoit, le maire du village. Les marchés nocturnes organisés au moulin de Masméjean, en extérieur, ont attiré énormément de monde. »

La vente de produits locaux boostée par le tourisme

« Nous avons vu défiler beaucoup plus de visiteurs que les autres années, confirme David Confort, éleveur bovin lait en transformation à Saint-Étienne-de-Lugdarès. Cela a été très positif pour la vente de nos yaourts et de notre lait, tant au niveau de nos points de ventes (Villefort, Montélimar) que sur le magasin à la ferme. Les heures d’ouverture coïncidaient avec la traite, et les clients étaient très curieux de découvrir notre quotidien, le travail auprès des animaux… »

Même chose au Gaec Baud du Mas des Tilleuls. « Covid-19 oblige, nous n’avons pas eu de visites groupées de thermalistes de Saint-Laurent-les-Bains, comme les saisons précédentes. Toutefois, nous avons vendus davantage dans nos points de ventes et auprès de notre partenaire restaurateur », soulignent David et Didier Baud. La boutique de la Fromagerie Rissoan (Luc) n’a quant à elle pas désemplie de tout l’été. 

Certains producteurs ont toutefois été pénalisés par la fermeture de leurs clients restaurateurs au printemps. Mais à l'été, la vente en circuits courts a permis de compenser ce manque à gagner, comme c'est le cas pour Marc Benoit (Gaec Benoit), à Saint-Étienne-de-Lugdarès: « Nos oeufs se sont très bien vendus dans les magasins et épiceries locaux que nous livrons. »

Pour les agriculteurs, il a parfois fallu s’adapter à ce nouvel afflux de touristes. C’est le cas pour Alain Ranc, dont l’exploitation se situe à quelques mètres du chemin de Stevenson, très fréquenté par les marcheurs. « J’ai dû me séparer de mes chiens pour ne pas créer de problèmes avec certains randonneurs. » Du côté de Lesperon, Guillaume Chaze explique : « Notre patou, qui protège notre troupeau de la prédation du loup, n’aime guère les cyclistes. Il nous faut donc être vigilants. » Toutefois, les incidents demeurent très marginaux et les effets positifs du tourisme restent prédominants.

Effet d’aubaine liée à la crise sanitaire, ou tendance vouée à perdurer ? « Beaucoup de Français ont pris conscience qu’ils avaient énormément de choses à découvrir dans leur pays, dans les territoires, estime David Confort. Cet attrait pour les territoires ruraux pourrait donc durer… » L’avenir nous le dira !

Mylène Coste

Le chiffre à retenir

+ 50 %

de hausse de la fréquentation touristique sur la Montagne ardéchoise en juillet et + 30 % en août 2020 (par rapport à 2019) .

Un boom des achats sur le plateau ardéchois

IMMOBILIER / Principales ou secondaires, les maisons d’habitation s’arrachent un peu partout sur la Montagne ardéchoise.

Des résidences secondaires pleines, et ce bien après l’été : le grand air de la Montagne ardéchoise semble avoir séduit durablement une partie des touristes. « Quelques personnes qui jusqu’alors ne venaient que l’été ont décidé de s’installer à Laveyrune, notamment des retraités, explique Alain Ranc, maire du village. D’autres le voudraient bien, mais les logements ne s’y prêtent pas forcément car ils sont parfois difficiles à chauffer l’hiver. »

À Saint-Étienne-de-Lugdarès, « il y a eu énormément d’achats de logements, secondaires mais aussi principaux. Aujourd’hui, tout s’achète et tout se vend ! », souligne Françoise Benoit, le maire. « Beaucoup d’acheteurs sont des citadins ayant un ancrage local ou non, et qui ont décidé de venir vivre ici. Certains cherchent un emploi, envisagent vraiment de s’installer durablement. Nous avons par exemple cinq options d’achat sur un lotissement, qui, avant le confinement, peinait à attirer les acheteurs ! » 

À cheval sur le plateau ardéchois et la Haute-Loire, l’Agence immobilière du plateau croûle sous les demandes depuis l’été dernier : « Nous avons désormais plus de demandes pour des résidences principales que secondaires, indique Lisa Ferrier, assistante Transactions et locations. C’est souvent une clientèle citadine, de Paris ou du Sud de la France. Aujourd’hui, nous avons même beaucoup plus de demandes que d’offres à leur proposer. »

Un « retour à la ruralité » bienvenue pour les locaux qui voient se dessiner un nouvel élan dans les villages, leurs commerces et leurs écoles.

M.C.