ÉCO-PÂTURAGE
« Allier la production agricole à celle de l’électricité »

Inauguré mi-octobre par le groupe Générale du Solaire et la communauté de communes du Pays des Vans en Cévennes (Ardèche), le parc solaire de Jalès s’étend sur 3,6 hectares, pour une surface photovoltaïque de 13 000 m2. Un éco-pâturage a été mis en place avec un éleveur ovin de Beaulieu pour l’entretien du site.

« Allier la production agricole à celle de l’électricité »
Sur le parc solaire de Jalès, un troupeau de 35 brebis ainsi que deux ânesses peuvent paître sur 4,12 ha. Ces surfaces permettent à l’éleveur de nourrir 60 brebis sur 15 jours en moyenne.
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Gérald Deschanels, éleveur ovin et porc plein air à Beaulieu.

Le parc solaire de Jalès situé à Banne est un projet de longue date, entamé il y a près de douze ans par la communauté de communes du Pays des Vans en Cévennes et le groupe Générale du Solaire, producteur indépendant d’énergie solaire. Fondée en 2008, cette entreprise française construit et exploite des centrales solaires photovoltaïques au sol en France et à l’étranger où elle est présente dans une dizaine de pays. À Banne, elle vient tout juste d’inaugurer un parc de 3,6 hectares dont plus de 13 000 m2 sont couverts de panneaux photovoltaïques au sol, permettant de produire 3 360 MWh par an, soit une consommation équivalente à près de 1 120 foyers. Un système d’éco pâturage a été mis en place pour l’entretien du site, avec un éleveur ovin et un troupeau de 35 brebis ainsi que deux ânesses pouvant paître sur 4,12 ha. « Nous sommes dans un cercle vertueux qui consiste à participer à la transition énergétique en produisant localement de l’électricité renouvelable et à promouvoir l’activité du territoire », explique Chrystel Martin, responsable communication à Générale du Solaire.

« Des surfaces de pâturage supplémentaires »

Leur souhait est de faire intervenir un éleveur en autonomie sur la centrale, qui organisera le pâturage de son troupeau en fonction des besoins des animaux et de l’entretien du site. Installé à Beaulieu en élevage ovin, porc plein air et agritourisme, Gérald Deschanels fait partie des éleveurs contactés par le groupe Générale du Solaire pour mettre en place cet éco-pâturage. Il élève près de 140 brebis, dont la viande est vendue en direct. L’opportunité de disposer de surfaces de pâturage supplémentaires à proximité du siège de son exploitation l’intéresse particulièrement. « Je manque d’herbe et la repousse est faible », explique l’éleveur qui possède 25 ha labourables utilisés pour le foin uniquement et une quarantaine d’hectares de landes. « Beaucoup de surfaces pour peu d’alimentation. Et ce n’est pas toujours évident de trouver les terres nécessaires au fonctionnement de son exploitation. » Chaque été, il déplace ses brebis en montagne au col du Pendu pour leur alimentation.

Le projet de gérer l’éco-pâturage du parc solaire de Jalès présente un autre atout pour Gérald Deschanels « en matière de bien-être animal : les brebis peuvent se protéger de la sécheresse ou de la pluie sous les panneaux photovoltaïques », ajoute-t-il. Un dernier élément finit de le convaincre : « C’est également une manière de valoriser mon métier d’éleveur, montrer les apports de l’élevage sur l’entretien d’un site comme celui-ci et plus largement de la nature, et participer au développement de la production d’énergie électrique renouvelable ».

Un engagement sans rémunération ni garantie de résultat

Avant de se lancer, des visites du parc solaire ont été effectuées avec l’éleveur pour s’assurer que la flore y soit compatible avec l’élevage ovin. « Un bon nettoyage végétatif propice à l’alimentation des brebis a été fait par le groupe Générale du Solaire », explique Gérald Deschanels qui s’est chargé de l’aménagement des clôtures et des points d’abreuvement. « Le site était clôturé pour une protection humaine, que j’ai repris pour mieux protéger mes brebis, c’était de la bricole », indique-t-il. « J’ai installé des réserves d’eau que j’alimente régulièrement. Je n’ai rien eu à acheter car je disposai déjà de tout ce matériel. »

Après un essai de pâturage mené pendant trois mois qui se révèle concluant, « nous nous sommes engagés le 4 novembre 2020 sur la signature d’un contrat d’engagement dans la durée avec l’éleveur et l’installation des animaux dans la foulée. Nous lui mettons à disposition les terrains de la centrale solaire, en échange de quoi il s’engage à mettre des brebis dès que nécessaire pour entretenir le site », ajoute Chrystel Martin. Ce contrat d’engagement n’inclut aucune rémunération entre le producteur d’énergie et l’éleveur, ni d’attentes ou de garanties de résultat sur la « prestation » des brebis, ajoute-t-elle. « Nous avons été amené à intervenir mécaniquement cette année avec un prestataire local, mais une grande partie du site est entretenu avec les brebis. ». Les surfaces du parc solaire de Jalès permettent à Gérald Deschanels de nourrir 60 brebis sur 15 jours en moyenne. Il fait rentrer et sortir ses animaux quand il le souhaite, et prévient par SMS un responsable de la Générale du Solaire de ses déplacements. « Le seul point négatif, s’il fallait en trouver un, c’est que mon siège d’exploitation est situé à 7 km du parc solaire, mais cet éco-pâturage est une perle rare pour moi. C’est un bon partenariat et un bon compromis. » 

« Des axes de développement et des passerelles pour les deux filières »

L’association du photovoltaïque au domaine agricole est un sujet plus que complexe, sur lequel le groupe affiche clairement ses ambitions : « Notre objectif n’est pas d’implanter des centrales sur des terres agricoles, mais sur des terres qui ne pourraient pas être utilisées dans le cadre d’une agriculture classique, telles que des terres dégradées et un peu fertiles, des friches industrielles, d’anciennes carrières, des décharges stabilisées, des zones polluées… Utiliser ces espaces sans mettre en danger ni les Hommes ni les bêtes », explique Chrystel Martin. « Nous répondons aux appels d’offres de la Commission de régulation de l’énergie (CRE)1 qui sécurise les tarifs d’achat et nous contraint dans nos choix de site. Nous développons aussi de nouveaux projets innovants liés à l’agrivoltaïsme. Nous allions alors la production agricole à celle de l’électricité, mais la priorité sur ces projets est le développement de la plante, les panneaux s’orientent en fonction des besoins de celle-ci, comme nous pouvons le faire sur les vignes avec de l’ombrage photovoltaïque pour protéger des intempéries (gelées tardives, gels, stress hydrique). Il y a de vrais axes de développement et des passerelles pour les deux filières, qui peuvent se travailler en parfaite intelligence. »

A.L.

1. Créée en mars 2000, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) veille au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz de France, au bénéfice des consommateurs finals et en cohérence avec les objectifs de la politique énergétique.

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