VALORISATION
La laine savoyarde devient un produit d’excellence

VALORISATION / La filature Arpin, maison spécialisée dans le travail de la laine propose un partenariat avec les éleveurs ovins pour s’approvisionner en laine de Savoie. Jusque-là, la laine savoyarde n’avait quasiment plus de marché.

La laine savoyarde devient un produit d’excellence
La filature Arpin souhaite acheter, dès cet automne, 7 tonnes de laine aux éleveurs ovins savoyards qui seront valorisées entre 43 et 86 centimes le kilo selon la qualité.

Depuis plusieurs années, la commercialisation de la laine des 30 000 moutons savoyards est difficile. Traditionnellement, le syndicat des éleveurs ovins collectait la laine deux fois par an, pour faciliter son ramassage par des acheteurs de moins en moins nombreux.

Un sous-produit bien embarrassant

L’année dernière, il n’y a eu qu’une seule collecte de laine et il n’y a quasiment plus de marché, « les ballots de laine s’entassent au fond des granges, et les éleveurs ne savent plus quoi en faire, c’est devenu un sous-produit, bien embarrassant », indique l’animateur du syndicat ovin de Savoie. Pourtant, une porte vient de s’ouvrir et le conseil d’administration de fin juillet va débattre d’une demande particulièrement intéressante. La filature Arpin, fondée en 1817, fabrique des tissus et des draps de laine connus dans le monde entier, en particulier son drap de Bonneval, qui doit son nom à Pierre Blanc guide de Bonneval-sur-Arc. Située à Seez, près de Bourg-Saint-Maurice, cette filature fabrique ses tissus à base de laine rustique, des produits d’exception réalisés sur des machines classées au patrimoine national.

La filature Arpin souhaite une laine de Savoie

Jusque-là, la laine utilisée par la filature Arpin provenait d’un négociant qui l’achetait un peu partout en France. La volonté de l’entreprise est désormais de chercher une matière première de proximité. Un partenariat est en projet avec les éleveurs ovins de Savoie pour acheter, dès cet automne, 7 tonnes de laine, puis augmenter les volumes jusqu’à 14 tonnes, si la qualité est au rendez-vous.

Laura Huygues, responsable de la production à la filature Arpin, prévient, « nous tentons cet approvisionnement local avec les éleveurs de Savoie, mais ils devront être très vigilants sur la qualité de la laine fournie et sur le tri de cette matière première. À l’arrivée des ballots de laine, si la qualité est au rendez-vous nous la payerons 86 centimes au kilo. Dès qu’il y aura de la perte, le prix sera diminué au prorata pour arriver à un minimum de 43 centimes. En fonction du résultat de cette première collecte, nous poursuivrons ou pas ce partenariat », indique-t-elle.

Un tri rigoureux est nécessaire

Pour mettre toutes les chances de leur côté, les éleveurs savoyards devront respecter quelques critères essentiels. Il leur est demandé de ne pas faire la tonte dès le retour des alpages, de laisser les animaux sur un espace propre (sur une dalle) et sans paille. Les tontes des pattes et de la partie sous le cou doivent être écartées, tout comme la laine noire, pour ne laisser que la laine écrue et propre. La collecte est prévue en décembre sur deux sites qui seront définis par le syndicat ovin de Savoie, seul interlocuteur de la filature Arpin. « Un bordereau par éleveur avec le numéro de lot permettra la traçabilité nécessaire. Les éleveurs n’apportant pas la garantie de qualité seront retirés de la collecte suivante », précise Laura Huygues.

Les laines collectées seront ensuite transportées à Beilla, dans le Val d’Aoste en Italie où un prestataire réalisera le tri, le lavage et le premier peignage pour ensuite renvoyer la laine en petit flocon en balles compressées. La filature Arpin fabriquera alors, avec une équipe de 5 à 8 personnes en production, plus de 15 000 mètres linéaires de tissus/an. Bernard Dinez, président du syndicat des éleveurs ovins de Savoie, est très heureux de cette démarche, « produire un produit haut de gamme avec de la laine issue des troupeaux savoyards est une démarche vertueuse qui a beaucoup de sens. On peut communiquer sur la qualité et la tradition, et quand, il y a une véritable relation de proximité, c’est vraiment une façon de soutenir l’ensemble des acteurs de nos montagnes ».

Claudine Lavorel

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En Haute-Savoie, le syndicat ovin organise traditionnellement une collecte groupée de laine auprès de ses adhérents. Les moutons sont tondus à partir de début novembre et la laine est ensuite rassemblée sur quatre points de ramassage chez les éleveurs. Les acheteurs sont contactés en janvier pour une collecte en avril. Environ 30 tonnes sont écoulées chaque année avec cette opération collective. « Avant, ça payait le tondeur, mais maintenant les prix sont très volatils. Nous devons trouver de nouvelles voies pour mieux valoriser notre laine », constate Emmanuel Tochon président du syndicat des éleveurs ovins de la Haute-Savoie.

Bertrand Coffy