VENDANGES
Un millésime 2021 chahuté par le climat

Mylène Coste
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Après un démarrage en douceur la semaine dernière, les vendanges sont désormais bien entamées dans le Sud-Ardèche. Une récolte toute particulière cette année, marquée par les ravages du gel, de la grêle, et par les excédents de pluie du début de l’été. Tour d’horizon dans les caves coopératives…

Un millésime 2021 chahuté par le climat
Installée à Chassiers, Claire Mercier fait partie des rares chanceux à avoir relativement échappé au gel d'avril.

Lundi 6 septembre, 9 h : le soleil chauffe déjà, et les belles grappes de gamay de Claire Mercier, à Chassiers, n’attendent qu’à être vendangées. Entourée d’une équipe de 8 saisonniers, la jeune vigneronne démarre son premier jour de récolte, et devrait poursuivre toute la semaine : « Nous démarrons par le Gamay, sur 3 ha, pour l’élaboration des vins primeurs. Les baies doivent pour cela être récoltées à juste maturité, et prélevées exclusivement à la main pour être ensuite encuvées entières. La vinification se fait par macération carbonique, pour conserver des arômes très fruités. » L’équipe de vendangeurs poursuivra ensuite par le Viognier, également récolté à la main.

« Ces trois dernières années, nous avions démarré les vendanges très tôt, à la mi-août. Cette année, on revient à des temporalités plus normales », souligne Claire Mercier, qui cultive une quinzaine d’hectares entre Chassiers, Laurac et Vinezac. Ici, les vendanges s’annoncent prometteuses : « Hormis quelques parcelles gélives sur la plaine de Laurac, nous avons plutôt été épargnés par le gel, et n’avons pas, comme d’autres, subi de grêle. La pluie a été abondante, mais nous avons également eu du vent, ce qui a permis de limiter la pression sanitaire. L’eau en quantité a donné de la vigueur à la végétation, avec un feuillage important et de beaux raisins, qui laissent augurer un joli millésime ! »

 

À Chassiers, dans les vignes de Claire Mercier, les vendangeurs ont démarré la récolte en début de semaine, avec les Gamay pour le vin primeur.
À Chassiers, dans les vignes de Claire Mercier, les vendangeurs ont démarré la récolte en début de semaine, avec les Gamay pour le vin primeur.

Gel, grêle : bonjour les dégâts !

Claire Mercier, coopératrice à la cave La Cévenole de Rosières, fait partie des rares chanceux à pouvoir envisager ses vendanges sereinement. En effet, le vignoble du Sud-Ardèche a massivement été touché par le gel d’avril. Bruno Lebrun, responsable technique à la cave coopérative La Cévenole, témoigne : « Nous tablons sur 7 000 à 10 000 hl de pertes par rapport à une année normale, avec des dégâts particulièrement importants sur les secteurs des Vans, et les plaines de Laurac, Uzer et Rosières. Les pertes sont hétérogènes selon les parcelles, mais aussi au sein de mêmes parcelles ! Il poursuit : Les premiers jus sont néanmoins propres et de qualité, ce qui annonce un beau millésime. Nous partons pour 6 semaines de vendanges, qui s’achèveront avec le Châtus. »

À la cave des Vignerons de Jalès (Berrias/Beaulieu), là-aussi, le coup d’envoi des vendanges a été donné lundi avec le Sauvignon blanc, « avec près de trois semaines de retard par rapport à l’an dernier », relève le directeur Gérald Moussière. « On ne devrait pas démarrer les rouges avant le 15 septembre, poursuit-il. Cette année, les vendanges devraient toutefois laisser un goût amer aux vignerons de Jalès : « Entre le gel d’avril, puis la grêle de juin, les pertes sont estimées à 60 %. Dans certains secteurs, c’est même 80 % : c’est notamment le cas du côté de Banne ou de Berrias-et-Casteljau, qui avaient pourtant échappé au gel mais ont été durement frappés par la grêle. »

À Valvignères également, la récolte s’annonce historiquement faible : ravagée par le gel puis par la grêle, la vigne devrait à peine donner 30 % d’une récolte normale.

Du côté d’Alba-la-Romaine, qui a échappé à la grêle mais pas au gel, la récolte des Pinots noir et des Chardonnays a démarré la semaine passée, confirmant les craintes : « Sur les parcelles gelées, les rendements ne dépassent pas les 20 hl/ha, déplore François Guigon, vigneron coopérateur. Pour le reste, on arrive à 40 voire 50 hl/ha avec une jolie qualité. Nous enchainons cette semaine avec le Sauvignon blanc et le Gamay rosé. Je suis un peu plus optimiste pour les cépages rouges (Merlot, Syrah) plus tardifs, qui ont davantage eu le temps de repartir. La situation reste très hétérogène d’une parcelle à l’autre. »

 

À la cave coopérative de Rosières, les équipes étaient sur le pont ce lundi 6 septembre pour le coup d'envoi des vendanges. Les estimations tablent sur un manque de volumes entre 7 000 à 10 000 hl, compte tenu du gel d'avril.
À la cave coopérative de Rosières, les équipes étaient sur le pont ce lundi 6 septembre pour le coup d'envoi des vendanges. Les estimations tablent sur un manque de volumes entre 7 000 à 10 000 hl, compte tenu du gel d'avril.

Le gel a davantage épargné les vignobles de Bourg-Saint-Andéol, ou encore Saint-Remèze, qui s’en tirent un peu mieux. « Nous avons peu gelé et n’avons pas du tout grêlé, la récolte devrait être correcte, annonce Cyril Jaquin président de la cave des Vignerons des Gorges de l’Ardèche (Saint-Remèze). On a toutefois un peu de coulure sur les grenaches. » 

Des maturités qui évoluent en douceur

À Vallon-Pont-d’Arc, Saint-Sauveur-de-Cruzières ou encore Ruoms, les vendanges ont débuté la semaine dernière. Estelle Privat, présidente de la cave coopérative de Ruoms, indique : « Nous avons ouvert les vendanges dès le lundi 30 août avec les premiers Muscaris et Chardonnay pour les vins effervescents. Nous avons ensuite dû attendre une semaine pour reprendre, ce lundi, avec les Chardonnays et les Sauvignons blancs. Les Merlots rosés devraient aussi être vendangés dans la semaine…» 

Plus tardives que les années précédentes, les vendanges démarrent plutôt calmement, avec des maturités qui évoluent doucement. À la cave coopérative d’Orgnac l’Aven, « les vendanges ont commencé lundi avec les blancs, indique la présidente, Christel Cesana. Cela semble un peu mieux que ce qu’on présageait, mais c’est encore tôt pour le dire ! »

M.C.

Les vignerons ont livré leurs tous premiers raisins, en Gamay et Sauvignon, à la Cévenole (Rosières). Avec près de 140 coopérateurs, la cave est partie pour six semaines d'apports.

Les vignerons ont livré leurs tous premiers raisins, en Gamay et Sauvignon, à la Cévenole (Rosières). Avec près de 140 coopérateurs, la cave est partie pour six semaines d'apports.
L’alternance pluie et soleil, un régal pour le mildiou ! 
Si le gel et la grêle ont provoqué des pertes importantes dans le vignoble du Sud-Ardèche, le millésime 2021 devrait toutefois être de belle qualité.

L’alternance pluie et soleil, un régal pour le mildiou ! 

SANITAIRE / Les excédents de pluies des mois de mai, juin et juillet ont engendré une pression sanitaire particulièrement importante sur le vignoble ardéchois.

 « Ce millésime 2021 restera marqué par la pression cryptogamique, avec une l'apparition du midliou et du black rot, constate Maud Bonnefoux, technicienne viticulture à la Chambre d’agriculture de l’Ardèche. Ces parasites ont compliqué la gestion de la protection de la vigne, notamment en juillet, à un moment où habituellement, elle se relâche. Les dégâts restent toutefois modérés : c’est surtout le feuillage sur nouvelles pousses qui est touché, avec quelques fois des raisins attaqués. Mais globalement, les vignerons ont su s'adapter pour aménager la lutte et limiter les pertes de récolte. »