ENTRETIEN
Chaulage des parcelles : un amendement à ne pas négliger

L'acidité impacte la fertilité des sols. La solution ? Apporter du calcaire pour redresser ou entretenir le pH de ses parcelles. Précisions avec Christophe Chabalier, conseiller agronomie à la chambre d'agriculture du Cantal.

Chaulage des parcelles : un amendement à ne pas négliger
L’intervention peut se faire après une fauche. ©PO

Dans quels cas faut-il chauler ses parcelles ?

Christophe Chabalier : « On va juger nécessaire d'intervenir, c'est à dire de redresser le pH, quand il est en-dessous de 6 (pH neutre à 7, ndlr). Mais avant de recourir à un amendement calcaire, il est recommandé de réaliser une analyse de terres même si on peut avoir des indices via la flore des prairies. Il y a deux types d'interventions : le chaulage de redressement destiné à faire redresser rapidement des pH très bas (inférieurs à 5,5 sur des prairies permanentes par exemple) et le chaulage d'entretien qui vise à maintenir le pH au niveau souhaité tous les 2 à 3 ans. »

À quoi est due l’acidité dans les sols ?

C.C. : « C'est un phénomène naturel qui résulte de la pluviométrie et de certains processus biologiques naturels. L'acidité d'un sol est liée à la concentration en proton (H+) dans la solution du sol. Plus celle-ci est élevée, plus le pH eau est faible. Cette acidité varie au cours de l'année : en hiver, on a des sols stables, peu minéralisés, on peut considérer que le pH est stable lui aussi. Au printemps et en été en revanche, le sol va s'acidifier naturellement du fait de la minéralisation par les micro-organismes de la matière organique (humus) et de la nitrification de l'azote ammoniacal provenant des engrais azotés. Les racines libèrent aussi des acides organiques (citrique, oxalique...) en quantité variable selon les espèces et les conditions du milieu. À cela s'ajoute l'effet de l'absorption des éléments minéraux sous forme d'ions par les racines. Les systèmes de culture qui s'appuient sur une fertilisation azotée à base d'engrais ammoniacaux, une exportation fréquente des pailles sans restitution de matières organiques, comme la présence de légumineuses dans la rotation contribuent à l'acidification des sols. Cependant, tous les engrais azotés n'ont pas d'effet acidifiant sur le sol : ceux à base d'azote purement nitrique (nitrate de calcium ou de potassium) contribuent à remonter le pH du sol. L'eau de pluie est aussi naturellement acide puisque le pH de l'eau pure en équilibre avec le CO2 atmosphérique est de 5,6. »

Quelles sont les conséquences d’une acidité des sols ?

C.C. : « On observe une déstructuration du sol avec des sols par exemple plus compacts. Cela joue aussi sur la nutrition des plantes : les sols acides (< 5,5) contribuent à rendre de plus en plus solubles certains composés minéraux, dont ceux comprenant de l'aluminium et du manganèse qui peuvent devenir toxiques. La croissance des racines est alors fortement ralentie, elles s'épaississent, brunissent... et ne peuvent plus assurer l'alimentation minérale et hydrique des plantes. La vie du sol peut aussi être impactée avec des équilibres entre micro-organismes (champignons, bactéries...) modifiés. »

Quels produits utiliser dans ces cas-là ?

C.C. : « Pour le chaulage de redressement, il faut des produits à action rapide, comme les chaux (produit cuit) ou les calcaires pulvérisés. Pour le chaulage d'entretien, les produits à action plus lente, un peu moins réactifs, sont plus adaptés : des produits crus comme le carbonate. Sachant que ces deux types de produits sont exploités et disponibles localement. »

Quelle est la période la plus propice pour intervenir ?

C.C. : « Quand la terre le permet, que le sol est suffisamment portant et que les animaux n'ont pas à utiliser la parcelle : la poudre qui recouvre la végétation va en effet gêner l'appétence. Généralement c'est à cette période, quand il n'y a pas de neige. On peut aussi intervenir après une fauche. »

En quelle quantité ?

C.C. : « On raisonne par rapport à la valeur neutralisante (VN) du produit : c'est la quantité de CaO, oxyde de calcium ayant la même capacité de neutralisation que 100 kg de produit considéré. Par exemple, une valeur VN de 55 signifie que 100 kg de produit apportent 55 kg d'équivalents CaO. Cette quantité de CaO est calculée sur la base des analyses de terre avec deux indicateurs : la taille du réservoir à remplir, la CEC (capacité d'échange cationique) et le taux de saturation en calcium du réservoir. »

Propos recueillis par P. Olivieri

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