CONTRACTUALISATION
S. Joandel : « Il nous faut un prix prenant en compte les coûts de production »

Président de la section régionale laitière de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes et producteur de lait dans la Loire, Stéphane Joandel revient sur les enjeux de la contractualisation dans la filière laitière.

S. Joandel : « Il nous faut un prix prenant en compte les coûts de production »
Stéphane Joandel, président de la section régionale laitière de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes. ©SG

Sur la mise en place de la contractualisation peut-on dire que la filière laitière a été à l’avant-garde ?


Stéphane Joandel : « Les producteurs laitiers disposent aujourd’hui de contrats. Suite à la fin des quotas, le fait d’avoir créé des organisations de producteurs (OP) constitue un atout indéniable. Dans la perspective de la première loi Egalim, nous avions rencontré tous les présidents d’OP pour leur apporter une lecture juridique du texte et leur donner un coup de main dans l’élaboration des contrats de prix. C’était un premier pas mais pas assez pour garantir une rémunération suffisante aux producteurs. C’est pourquoi, au niveau de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, nous avons milité pour une loi Egalim plus efficace. »

Le second volet de la loi Egalim oblige davantage l’aval de la filière laitière par la notion de respect des coûts de production. Où en sommes-nous aujourd’hui sur ce point stratégique ?


S.J. « : C’est effectivement tout l’enjeu de la loi Egalim 2 qui doit s’appliquer avec des sanctions en cas de non-respect des coûts de production. La filière laitière est en ordre de marche pour offrir des outils pertinents aux éleveurs. Le prix conforme imaginé par la FNPL en est un. Ce prix repose sur trois indicateurs qui correspondent aux trois débouchés de la filière laitière : le prix de revient, qui correspond à la valorisation du lait sur le marché intérieur, et qui a été fixé à 388 €/1 000 litres pour l’année 2021 ; le prix du lait allemand (les PGC sur le marché export) publié mensuellement par le Cniel et exprimé avec trois mois de décalage ; et la valorisation beurre/poudre qui correspond à la valorisation des produits industriels sur le marché export. Aujourd’hui, on va se servir de ce prix conforme avec le mix produit des entreprises. Nous avons les contrats de volumes, maintenant, il nous faut un prix prenant en compte les coûts de production. Notre objectif est de permettre à chaque producteur d’être payé au moins à hauteur de deux Smic mensuels. »

À ce stade, comment se positionnent les entreprises privées et les coopératives ?


S.J. : « Les deux prochains mois seront décisifs. Les entreprises s’interrogent, la loi les oblige et les pénalités sont fortes. Cela change la donne. Les coopératives sont dans l’obligation d’intégrer ces coûts de production. Il faudra que les règlements intérieurs intègrent cette nouvelle disposition. Le ministre de l’Agriculture s’est engagé pour que la loi s’applique à tous, y compris aux coopératives. Au final, le producteur ne doit plus être la variable d’ajustement. »

La conjoncture laitière est plutôt favorable ces derniers mois. Cette embellie doit toutefois être tempérée par la hausse vertigineuse des charges…


S.J. : « La conjoncture est favorable, les marchés mondiaux tirent énormément. On annonce un prix B à 419 euros/1 000 litres. Reste à savoir combien de temps cela durera. Mais si le prix du lait augmente, les charges aussi d’une manière folle. Aujourd’hui, cette hausse représente 30 euros aux 1 000 litres. Les producteurs ont beau se couvrir en contractualisant leurs achats de matières premières, de protéines notamment, mais au bout d’un moment cela s’arrête et nous sommes bien obligés d’absorber la hausse. Dans ce contexte, la prise en compte de nos coûts de production devient urgente.

Propos recueillis par Sophie Chatenet