"Les agriculteurs en ont assez du dénigrement permanent "

CHAMBRE D'AGRICULTURE / Malgré le contexte sanitaire, les élus de la Chambre d’agriculture se sont bien réunis en session, vendredi 13 mars. Les discussions se sont attardées sur la nouvelle réglementation autour des zones de non-traitement (ZNT), et plus largement sur les difficultés de dialogue entre le monde paysan et la société.

 "Les agriculteurs en ont assez du dénigrement permanent "
Les élus de la Chambre d'agriculture en session le 13 mars 2020

Alors que les beaux jours vont raviver adventices et bioagresseurs en tous genres, la nouvelle réglementation sur les zones de non-traitement (ZNT) occupe tous les esprits.

Entrée en application au 1er janvier dernier, la nouvelle réglementation sur les ZNT impose le respect d’une distance de traitement de 20 m incompressibles des habitations pour quelques 130 produits jugés dangereux, 10 m pour les arbres fruitiers, la vigne et les petits fruits, et 5 m pour les cultures basses (mais également pour les adventices en vignes et vergers si la charte de riverain départementale le prévoit). Ces ZNT peuvent éventuellement être réduites de 10 à 5 m et de 5 à 3 m dans le cas de l’utilisation de matériels anti-dérive performants ; une réduction qui doit être approuvée via la charte de riverains. « Pas de ZNT en revanche pour les produits de biocontrôle, l’agriculture biologique et les substances de base », a rappelé Fabien Clavé, responsable du service Agriculture à la direction départementale des territoires (DDT). Il précise également : « Si un produit présente une ZNT riverains dans son autorisation de mise en marché (AMM), celle-ci prévaut. » Il poursuit : Un appel à projets national, confié à FranceAgriMer sera mis en place dès le printemps afin d’accompagner les agriculteurs dans la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires avec un budget global de 25 M€. »

ZNT : Une mesure imposée sans dialogue

« Dans un souci de bon voisinage, les syndicats JA Ardèche et FDSEA, aux côtés de la Chambre d'agriculture, travaillent depuis plusieurs semaines à l’élaboration d’une charte de riverains, qui aborde la question des traitements phytosanitaires mais également d’autres problématiques : bruits, odeurs, bâtiments d’élevage… », explique Benoit Claret, vice-président de la Chambre. « Je regrette que l’État nous ait imposé une application immédiate de l'arrêté sur les ZNT sans attendre la mise en œuvre des chartes locales. Cela va à l'encontre de notre volonté de dialogue et de solutions locales. »

Il poursuit : « Nous souhaitons en effet associer à la construction de cette charte les élus locaux et notamment les maires, qui sont les premiers interlocuteurs des agriculteurs et des habitants ». Un projet de charte a été transmis à la préfecture pour vérifier sa conformité avec la réglementation. Mais dans le contexte des élections municipales et de la crise du coronavirus, il est difficile d’avancer sur la concertation autour de cette charte. Pour l’heure, c’est donc la règle de base qui s’applique.

« Aux nouvelles constructions de se conformer ! »

Aussi un flou juridique entoure-t-il aujourd'hui la nouvelle réglementation ZNT. « Par exemple, on ne sait pas vraiment ce que désigne la zone « riverains » : est-ce la limite de l'habitation ? De la propriété ? », interroge le président de la Chambre Jean-Luc Flaugère. Une question qui interroge également sur l'intégration des règles dans les futures constructions : « Les plans locaux d’urbanisme (PLU) et PLU intercommunaux doivent absolument considérer ces zones à l'heure d'accorder de nouveaux permis de construire : c'est aux nouvelles constructions de se conformer, pas aux agriculteurs ! » pose Bernard Habauzit, élu à la Chambre.

Afin de clarifier les règles, Benoit Claret demande également que toutes les AMM qualifient une ZNT riverains, à l'instar de ce qui se fait déjà pour les ZNT cours d'eau.

« Nous avons fait beaucoup d'efforts »

La discussion s'est également élargie sur les difficultés de compréhension entre le monde paysan et la société, amplifiées par le martelage médiatique. « Nous avons pourtant fait beaucoup d'efforts dans la réduction de l'utilisation des intrants depuis une dizaine d'années », affirme Jérôme Volle, vice-président de la Chambre. Aux critiques concernant le plan Ecophyto, jugé inefficace par certains, il répond : « On ne peut pas dire que ce plan n'a pas eu d'impact. En Ardèche, des groupes Dephy se sont mis en place en viticulture et arboriculture avec de vrais progrès sur le terrain. Optidose, HVE... De nouveaux matériaux performants et de manières de travailler se mettent en place un peu partout. Les formations, et notamment le certiphyto, ont le mérite d'avoir sensibilisé tous les agriculteurs aux dangers liés à l'utilisation de certains produits. Pas un seul d'entre nous n'en n'a pas conscience aujourd’hui ! »

Mylène Coste

Chambre d'agriculture : la situation budgétaire s'améliore

Le compte financier 2019, voté lors de la session, est déficitaire. Il a toutefois été réduit de moitié par rapport à 2018, représentant 1 % du budget de la Chambre. « Notre plan d’adaptation mis en œuvre dès novembre 2018 porte ses fruits, se félicite Jean-Luc Flaugère. Nous ne devons pas relâcher nos efforts, mais je suis optimiste sur notre projet de mandature qui mobilise fortement nos collaborateurs avec une équipe d’élus investis. »

Jean-Luc Flaugère et Benoit Claret