FRANCE
Ministres mobilisés, industriels et producteurs inquiets

NÉGOCIATIONS COMMERCIALES / Un comité de suivi des négociations commerciales a de nouveau réuni, à Bercy, producteurs, industriels, distributeurs et pouvoirs publics. Les inquiétudes quant à une nouvelle déflation des tarifs sont de mises.

Ministres mobilisés, industriels et producteurs inquiets
Face aux résultats de la loi Egalim encore en deçà des attentes, « une meilleure répartition de la valeur (est) plus que jamais une priorité ». ©Fotolia

Les traditionnelles négociations entre la distribution et ses fournisseurs, qui s’achèvent chaque année le 1er mars, commencent, et avec elles des prises de position qui année après année se ressemblent un peu plus. Les industriels agroalimentaires et les producteurs agricoles s’inquiètent. Les distributeurs défendent le pouvoir d’achat des consommateurs. Les ministres tapent du poing sur la table. Deux ans après l’entrée en vigueur de la loi Egalim, l’optimisme n’est pas encore de mise. La Covid-19 et la crise économique qui en découle n’aidant pas. « Plus que jamais à l’heure de la relance économique, le gouvernement reste mobilisé sur la mise en oeuvre effective de la loi Egalim pour garantir un rééquilibrage des relations commerciales », affirment les ministres de l’Agriculture, Julien Denormandie, et chargé de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, dans un communiqué faisant suite au comité de suivi des négociations commerciales qui s’est tenu le 13 octobre à Bercy.

Face à des résultats encore en deçà des attentes « une meilleure répartition de la valeur (est) plus que jamais une priorité », réclament-ils en enjoignant chacun à la responsabilité. En guise de motivation, la menace de sanction : « L’État continuera donc à intervenir avec détermination [...] chaque fois que des abus seront constatés ». Le gouvernement rappelle également que des sanctions administratives ont été prises les deux dernières années, et que des actions judiciaires sont toujours en cours contre des centrales d’achat ou de référencement.

Revaloriser l’amont

« Nous sentons que les ministres sont impliqués et ont envie d’influencer le cours des choses », observe Richard Panquiault, directeur général de l’Ilec (grandes marques). « Mais il est difficile de transformer ce dialogue dans les négociations car il y a une ambivalence entre la nécessité de financer des investissements de l’industrie agroalimentaire et de revaloriser l’amont agricole, et la contrainte de pouvoir d’achat des Français », résume-t-il. Aussi, les industriels au travers de l’Ania (industries agroalimentaires), l’Ilec et la Coopération agricole alertent sur le risque d’une nouvelle année de déflation. « Il s’agit de préserver nos savoir-faire, nos emplois et nos capacités de production dans les territoires et d’assurer les investissements industriels indispensables pour favoriser l’innovation et générer la croissance dont les distributeurs ont besoin », assurent-ils dans un communiqué commun. Plus en amont, les inquiétudes sont aussi palpables. « Malgré des engagements pris par chacun des opérateurs économiques de l’aval lors des États généraux de l’alimentation, nous constatons que la valeur n’arrive toujours pas dans les cours de ferme », s’inquiètent la FNSEA et les Jeunes agriculteurs.

L’arbre qui cache la forêt

Si tous les maillons amont entendent l’enjeu du pouvoir d’achat des Français dans le contexte particulier de crise sanitaire et économique, ils demandent à l’unisson une nouvelle valorisation des tarifs. Même la filière laitière s’inquiète des négociations à venir, après avoir été montrée en exemple l’an passé pour avoir réussi « à faire passer des hausses de tarif ». « Nous ne sommes pas encore parvenus à couvrir tous les coûts de production », estimait Jehan Moreau, directeur de la Fnil (industriels laitiers privés) début octobre. « Nous ne sommes pas encore au bout de la démarche. Il y a nécessité d’aller chercher une troisième année consécutive de hausse des prix pour mieux couvrir les coûts de production », complète Damien Lacombe, président de la Coopération laitière. « Il faut remettre le retour au pouvoir d’achat à sa juste valeur. Nous attendons de façon très ferme les négociations sur le prix sur l’année 2021. De cela va dépendre le prix payé aux producteurs », revendiquait Marie-Thérèse Bonneau, vice-présidente de la FNPL (producteurs laitiers, FNSEA) en conférence de presse le 30 septembre. Et sans le porte-voix du Salon de l’agriculture, dont la tenue coïncide avec la fin des négociations commerciales, annulé pour cause de Covid-19, il sera d’autant plus difficile pour les agriculteurs de faire entendre leur voix. n A.J.