AUVABIO
Vers la structuration d’une filière locale de fruits et légumes bio en Auvergne

En 2018, pour gagner du temps sur la commercialisation de leurs produits et s’assurer un prix rémunérateur, huit maraîchers bio ont choisi d’organiser collectivement leurs ventes. Trois ans plus tard, ce sont plus de 50 producteurs qui ont rejoint le fonctionnement d’Auvabio.

Vers la structuration d’une filière locale de fruits et légumes bio en Auvergne
Journée technique sur le légume de plein champ au Biau Jardin de Gerzat, septembre 2020.

Faire le choix de la vente directe est très coûteux en temps, comme le souligne Nathanaël Jacquart, maraîcher depuis 2008 dans le Puy-De-Dôme : « Assurer des distributions pour des Amap tard le soir, les marchés tôt le matin, cela commençait à ne plus être compatible avec une vie de famille ». Quant à la vente des surplus sur le marché de demi-gros, « les producteurs se faisaient concurrence entre eux parce qu’ils avaient tous des surplus au même moment, alors même que la demande de ce marché était très forte », explique Coralie Pireyre, conseillère à la Frab Aura1 et bientôt salariée d’Auvabio.

Pour y remédier, huit maraîchers ont fait le choix de planifier et vendre collectivement une partie de leur production sur le marché de demi-gros à destination des magasins bio spécialisés, des supermarchés locaux, des épiceries et de la restauration collective (via Auvergne Bio distribution) et commerciale. Ils ont ainsi pu limiter le temps consacré à la vente de leurs produits, tout en se positionnant sur un marché prometteur.

Un GIEE pour fixer un cap

La volonté de travailler de concert n’est pas nouvelle. « On a tenté plusieurs fois de se mettre autour d’une table pour travailler ensemble mais ce n’était jamais le bon moment : quand on n’a pas de temps d’animation, c’est toujours difficile de lancer une dynamique », explique Nathanaël Jacquart.

C’est le dépôt en 2018 d’une demande pour se constituer en groupement d’intérêt économique et environnemental (GIEE) qui a permis d’entériner cette émulation collective au sein de l’association Auvabio. Comme le souligne Coralie Pireyre, alors animatrice du GIEE porté et accompagné par la Frab Aura, « on avait besoin de ce cadre pour structurer la réflexion, cela nous a permis de nous poser et de nous obliger à définir des objectifs ».

Une charte pour le groupe

Après un an de réflexion collective, la charte d’Auvabio est finalisée, et instaure une règle centrale : « Les producteurs adhérents ne sont pas autorisés à vendre leur production aux clients d’Auvabio de manière isolée. De cette façon, les clients ne sont pas en mesure de faire jouer la concurrence pour tirer le prix vers le bas. On fixe un prix plancher, cela nous redonne la main », déclare Nathanaël Jacquart, qui ajoute que les acheteurs y trouvent également leur compte : « On n’est pas plus cher que les autres et la planification collective permet d’assurer un approvisionnement régulier du marché ».

Aider à produire mais aussi à vendre

Auvabio a suscité l’adhésion de plus de 50 producteurs. Pour Coralie Pireyre, ce succès s’explique par le fait qu’il n’était pas seulement question d’accompagner les agriculteurs dans l’amélioration de leur système de production, mais aussi de les aider à trouver des débouchés : « Un projet de développement sans réflexion sur la commercialisation peut être déstructurant pour la filière puisque les producteurs seront mis en concurrence les uns avec les autres. Ils vont discuter au sein de leur groupe en oubliant qu’il existe peut-être un autre groupe à côté qui fait la même chose. Il faut sortir d’une réflexion à l’échelle de l’exploitation pour rentrer dans une réflexion à l’échelle d’une filière locale ». Cette réflexion collective sur la partie vente contribue au maintien de l’agriculture dans sa globalité : des exploitations davantage centrées « culture » ou « élevage » peuvent ainsi diversifier leur activité sans déstabiliser les exploitations maraîchères, et comme le raconte Nathanaël Jacquart, « certains agriculteurs préparent la transmission de leur ferme en créant un petit atelier sur un hectare, afin qu’un jeune puisse plus facilement reprendre la suite ».

Comité technique de la région Auvergne Rhône-Alpes

1. Frab Aura : Fédération régionale de l'agriculture biologique d'Auvergne Rhône-Alpes.