Résultats financiers
Une caisse régionale secouée mais solide

Marianne Boilève
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Le Crédit agricole Sud Rhône Alpes a présenté ses comptes le 9 février. Comme partout, la crise sanitaire a eu un sérieux impact sur l’activité, mais la banque affirme avoir « tenu son rang » grâce à son modèle et son autonomie territoriale. 

Une caisse régionale secouée mais solide

Après une « année atypique » bouleversée par la crise sanitaire, le Crédit agricole Sud Rhône Alpes présente des résultats financiers arrêtés au 31 décembre 2020, en insistant sur sa « solidité » et son implication territoriale. « Nous avons été secoués, mais nous avons tenu notre rang grâce à notre modèle coopératif et à notre agilité », s’est félicité son président, Jean-Pierre Gaillard, lors de la présentation des comptes à la presse le 9 février dernier à Grenoble. 

Choc inédit

La pandémie de Covid et ses effets co-latéraux ont constitué pour la caisse régionale « un choc inédit » qui l’a tout de même fait un peu tanguer. Le Crédit agricole Sud Rhône Alpes (Casra) affiche malgré tout une belle robustesse et un ratio crédits/collecte bilan conservée de 122% au 31 décembre 2020. Son produit net bancaire (400 millions d’euros) s’est néanmoins détérioré de 4,3% par rapport à 2019, en raison de la contraction de l’activité commerciale et de taux bancaires toujours très bas. Le résultat brut d’exploitation est quant à lui en retrait de 11%, tandis que le résultat net consolidé a fondu de moitié (47,5 millions d’euros au 31 décembre 2020 contre 93,4 millions en 2019). « La crise sanitaire et les périodes de confinement ont eu des répercussions au niveau du développement de l’activité et des commissions associées », commente sobrement la banque, qui souligne que ses charges de fonctionnement restent maîtrisées (-258,9 millions d’euros), « en dépit de l’accroissement des coûts liées à la crise sanitaire » et à la hausse des taxes et cotisations aux fonds.

La caisse régionale a les reins solides et elle l’a démontré tout au long de la crise, selon ses dirigeants. « Dans le modèle comme le nôtre, c’est l’autonomie territoriale qui nous a permis de prendre des décisions à hauteur d’homme pour nous mobiliser et accompagner nos clients malgré la crise, tout en assurant la sécurité de nos collaborateurs », a insisté Jean-Pierre Gaillard. Revenant sur la situation particulière générée par la pandémie de Covid-19, le président ardéchois a fait observer que « cette crise n’a rien n’à voir avec celle 2008, qui était une crise bancaire et financière. Cette fois-ci, il y avait une vraie inquiétude, non pas sur les banques, mais sur l’avenir de chacun. Dans ce contexte, nos agences de proximité sont restées ouvertes dans leur grande majorité, avec les mesures barrière qui s’imposent, et nous avons été présents par tous les canaux pour assurer nos missions. Il y avait un regard, un sourire, une relation humaine très forte. Nous avons démontré nos valeurs, c’est une vraie fierté. »

Maintenir les trésoreries à flot

A l’appui de ces déclarations, Pierre Fort, qui a remplacé Christian Rouchon à la tête du Casra, a détaillé comment la banque s’était « mobilisée en un laps de temps très court pour mettre en place des solutions adaptées » et « maintenir les trésoreries de bons nombres d’entreprises ». La caisse régionale a ainsi réalisé plus de 5 100 prêts garantis par l’État (PGE) pour 543 millions d’euros et consenti près de 10 000 reports de crédits sur l’ensemble des marchés. Tout en continuant de jouer son rôle de banque classique. Elle a ainsi financé l’agriculture – « notre ADN », a rappelé Jean-Pierre Gaillard – avec l’installation de 129 jeunes agriculteurs et le financement de matériel agricole à hauteur de 71 millions d’euros. 

Cette « mobilisation générale » a eu une incidence nette sur l’activité commerciale. Les encours de crédits, tirés notamment par les PGE, s’élèvent ainsi à 18, 431 milliards d’euros au 31 décembre 2020, en augmentation de 6,9% par rapport à 2019 (hors PGE, la croissance s’élèverait à 3,7%). Sur l’ensemble de ces encours, la part des crédits habitat représente 11,921 milliards (+ 3,7% par rapport à 2019), l’effet « 1er confinement » ayant joué à plein son rôle. Interrogé sur les conséquences d’un « emballement » en faveur des acquisitions en milieu rural, Jean-Pierre Gaillard a précisé que la caisse régionale avait récemment rencontré la Safer pour évoquer le sujet. « Il faut qu’on s’en empare pour voir comment éviter une tendance inflationniste trop forte », a-t-il reconnu.

Comportements prudents

Pour ce qui est de l’activité de collecte, les encours se sont envolés : + 9,2 % par rapport à 2019. Une hausse record directement liée aux effets de la crise sanitaire. Les confinements successifs ont engendré une baisse de la consommation, qui se combine avec des « comportements prudents » de la plupart des clients. Pour preuve : la hausse spectaculaire de l’épargne de précaution, observée sur les dépôts à vue (+30,7%) et les livrets (+12,2%), qui tire la croissance de la collecte bilan (+14,2%). Une logique assez voisine affecte l’activité assurance et prévoyance. Le portefeuille de contrats IARD (Incendie, accidents et risques divers) et prévoyance progresse de 4,8% (488 000 contrats à fin décembre 2020, dont 74 300 nouveaux contrats).

Pour le Crédit agricole Sud Rhône Alpes, le bilan 2020 est donc plutôt satisfaisant et 2021 s’annonce favorable. « Nous allons continuer d’accompagner tous nos clients, les entreprises qui ont des projets, mais aussi les commerces et les professionnels fragilisés, a déclaré Pierre Fort. Avec les aides de l’État et le dispositif assoupli du PGE, il ne devrait pas y avoir de problème de trésorerie. » Le directeur général est en revanche plus inquiet pour 2022, quand la « bulle protectrice » voulue par l’État se sera dégonflée. « Il faudra rembourser les prêts et il y aura des défaillances, anticipe-t-il. Nous nous y préparons, mais sans être fébriles. Nous avons fait les provisions nécessaires. » Ce qui permet à la banque d’afficher un optimisme teinté de prudence.

Marianne Boilève

Agricole et solidaire

Mesures sanitaires obligent, la caisse régionale du Crédit agricole Sud Rhône Alpes s’est appuyée sur le numérique et le distanciel pour répondre aux besoins de ses clients. Elle a également accompagné la transformation des entreprises, en facilitant notamment le développement des systèmes click&collect ainsi que des modes de paiement en ligne et sans contact. Pour les commerces fermés par décision administrative, elle a mis en veille des terminaux de paiement. 

A ces dispositifs de soutien s’ajoute un volet solidaire, décliné en différentes actions mutualistes (aide de 596 000 euros versée aux structures accompagnant les seniors, « geste mutualiste » envers 1 200 clients assurés ayant signalé une baisse d’activité…). Le Crédit agricole a par ailleurs lancé deux plateformes, l’une, non marchande, pour faciliter l’entraide territoriale (jaimemonterritoire-ca.fr), l’autre pour permettre aux producteurs locaux de vendre leur production en ligne (jaimemonproducteur.fr).

M.B.