COHABITATION /
Partage de l’espace pastoral : une enquête pour évaluer les risques

Amandine Priolet
-

COHABITATION / Le réseau pastoral Auvergne Rhône-Alpes vient de lancer la seconde campagne d’enquête menée dans le cadre du plan de sauvegarde du pastoralisme, intitulée « Mon expérience avec les chiens de protection ».

Partage de l’espace pastoral : une enquête pour évaluer les risques
Au-delà de la pression de la prédation subie par les éleveurs, ceux-ci sont également confrontés à de nouvelles problématiques sur le partage de la nature : randonneurs et chiens de protection ne font pas toujours bon ménage.

Depuis quelques années, le retour du loup inquiète grand nombre d’éleveurs. La question de la prédation, au coeur de discussions bien souvent sensibles, soulève le sujet du partage de l’espace pastoral. En effet, la présence des chiens de protection parmi les troupeaux peut poser un certain nombre de difficultés aux différents usagers de la montagne : randonneurs, vététistes, traileurs, cavaliers, etc. Ces chiens ont pour rôle de protéger les troupeaux de la prédation (loups, lynx, chiens), de jour comme de nuit, en alpage ou plus proche des villages. Ils ont ainsi comme mission d’éloigner ce qu’ils considèrent pouvoir être une menace. Malheureusement, beaucoup d’usagers de la nature ne savent pas comment se comporter en présence d’un chien de protection. À ce titre, la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal Aura) propose des supports et des outils d’information sur les chiens de protection sur son site internet : (https://urlz.fr/cpIo).

Améliorer la cohabitation

Le développement des pratiques de loisirs en plein air et l’évolution des pratiques pastorales dans un fort contexte de prédation mettent en avant la question de la coexistence entre ces différentes activités, mêlant tourisme et élevage. Ainsi, afin d’améliorer la cohabitation de tous et le partage de ces espaces ruraux, les services pastoraux de la région Auvergne Rhône-Alpes (Aura) ont mis en place, en 2019, une première enquête en ligne « Mon expérience avec les chiens de protection ». Ce questionnaire, auquel tout usager de la nature peut répondre en allant à l’adresse (https://urlz.fr/9Seq), permet ainsi d’évaluer la situation et agir avec l’ensemble des acteurs des territoires. Le recensement de ces bonnes – ou mauvaises – expériences de rencontre avec un chien de protection apportera une meilleure connaissance sur ce qu’il se passe réellement sur le terrain : Quelle est la réalité des problèmes ? Sommes-nous en mesure de les localiser, de les décrire et de les quantifier ? Comment agir sur les territoires pour limiter les difficultés de cohabitation ?

Une première enquête à confirmer

L’an passé, l’enquête 2019 a recueilli 528 témoignages, dont 70 % de randonneurs, avec un âge moyen de 57 ans. Quarante-sept cas de morsures ont été identifiés dont quatorze en région Aura. Parmi les personnes victimes de morsures, 43 % ont consulté un médecin et 5 d’entre elles ont reçu des jours d’incapacité temporaire de travail. 23 % ont même fait l’objet d’un recours judiciaire. Pour autant, ces cas restent rares et les chiens de protection ont plutôt tendance à aboyer ou à grogner. Il faut savoir que l’agressivité des chiens est bien souvent liée à un état de surprise : dans 30 % des rencontres, le manque de signalement ou la topographie des lieux peuvent surprendre, aussi bien le pratiquant que le chien.

Augmenter la diffusion d’information

Malgré tout, les usagers réagissent différemment face à cette problématique du multiusage : 40 % ont avoué éprouver un sentiment de colère envers les éleveurs et les bergers, tandis que 38 % d’entre eux portent une attention particulière au choix des secteurs fréquentés. Mais d’une manière générale, 36 % des répondants ont avoué que la diffusion d’information quant au comportement à adopter face à ces situations est insuffisante. Ce déficit d’information sera comblé cette année avec la mise en place de nouveaux outils de sensibilisation, mais aussi par le biais de temps d’échanges entre éleveurs et acteurs du territoire. L’enquête 2020 permettra de consolider les résultats et de faire le constat d’éventuelles évolutions des pratiques. Disponible et ouverte à tous les utilisateurs de la nature sur internet, elle a également été transmise à de nombreuses structures : offices de tourisme, refuges et gîtes, structures d’accueil du public, chasseurs et forestiers, mairies et gendarmeries, magasins de location de matériel de randonnée, etc. Tous sont concernés, au même titre que les éleveurs et les bergers à cette nouvelle problématique qu’est le multiusage des espaces naturels et pastoraux.

Amandine Priolet

A lire sur le même sujet :

Entretien avec Jean-Luc Chauvel, président du Coram, sur la pastoralisme
« Une pratique singulière répandue partout dans le monde »

Laurent Garde, directeur adjoint du Cerpam retrace l'histoire du pastoralisme et son adaptation