ÉTAT DES PRAIRIES
Des croissances de l’herbe très hétérogènes

En fonction des conditions pédoclimatiques et des secteurs, les prairies connaissent des fortunes diverses en ce début d’année. Tour d’horizon.

Des croissances de l’herbe très hétérogènes
La pousse de l’herbe varie beaucoup entre les exploitations de la région. ©J.C.COUTAUSSE Cniel

Le début d’année 2023 est marqué par des conditions déjà extrêmes pour les prairies, avec un déficit hydrique cumulé depuis le 1er janvier déjà très avancé dans certains territoires. En Drôme et Isère, durant la période du 27 mars au 9 avril, dix-huit des vingt-trois stations météorologiques suivies ont affiché moins de 20 mm de précipitations. Dans certains secteurs, les sommes de température cumulées depuis le 1er février atteignent même plus de 500 °C. Dans ce contexte, la pousse de l’herbe varie beaucoup entre les exploitations de la région. Jean-Pierre Manteaux, conseiller élevage et fourrages à la chambre d’agriculture de la Drôme (CA26), encourage les éleveurs à réduire les quantités distribuées en bâtiment pour les animaux laitiers, et à sortir les animaux en zones de montagne pour qu’ils pâturent l’herbe résiduelle d’hiver (exemple : dactyles).

Malgré un déficit hydrique déjà marqué (- 135 mm), l’exploitation du lycée agricole du Valentin, à Bourg-lès-Valence (Drôme) connaît actuellement une pousse importante avec 72 kg de matière sèche/hectare/jour, soit une croissance de l’herbe qui suit la moyenne des douze dernières années depuis le début du mois de février.

Au Centre d’élevage de Poisy (Haute-Savoie), « la pousse de l’herbe est conforme à la moyenne des six dernières années sur février, mars et avril. Elle est à + 40 kg de matière sèche/hectare/jour sur les vingt derniers jours », indique le bulletin Pâtur’RA publié par les chambres d’agriculture de la Drôme et de l’Isère le 17 avril dernier. La région haute-savoyarde a connu 150 mm de précipitation au mois de mars, et 60 mm début avril.

Le surpâturage de 2022 entraîne des conséquences

En Isère, la ferme de l’Aurore, basée à Thodure, constate que la pousse de l’herbe 2023 est inférieure à la référence sur les dix dernières années. « Le surpâturage de 2022 s’ajoute au manque de pluies », prévient le responsable d’exploitation. Pour augmenter le pâturage malgré le changement climatique, Jean-Pierre Manteaux conseille de mettre en place une double culture : méteil pâture puis sorgho pâturé. La double culture a été expérimentée en petits ruminants, sur un élevage ovin viande en agriculture biologique, dans la Gervanne en Drôme, en montagne sèche et dans un élevage caprin lait productif, à la ferme du Pradel en Ardèche. « Les résultats 2021 et 2022 ont confirmé la pertinence de la double culture : les méteils pâture sont un bon complément des prairies naturelles et des prairies temporaires à la sortie de l’hiver. Ils permettent trois cycles de pâturage, avec un bon taux de valorisation. Les sorghos multi coupes semés tôt peuvent lever avec des pluies de mai ou de juin : même desséchés, ils attendent le retour des pluies pour se développer », explique Jean-Pierre Manteaux.

En Bourgogne-Franche-Comté, les conditions météorologies de début avril (températures inférieures aux normales de saison et perturbations, ndlr) ont eu un impact direct sur la pousse de l’herbe. Le Groupe Herbe Franche-Comté relate, dans sa dernière publication du 11 avril, que « les croissances d’herbe bien amorcées sont à la peine en altitude, mais plus avancées en plaine ». En Saône-et-Loire plus particulièrement, les pousses de l’herbe sont normales, avec une somme des températures en ce début d’année relative à une année classique. « Après la sécheresse 2022, les pluies de fin d’année dernière ont permis une bonne repousse de l’herbe et des prairies bien denses », remarque Véronique Gilles, conseillère élevage à la chambre d’agriculture. Entre janvier et mars 2023, 1 415,60 mm de pluie ont été cumulés dans les onze stations météo de Saône-et-Loire.

Amandine Priolet