HAUSSE DES CHARGES
Le contrat, une arme de proposition massive que doivent utiliser les éleveurs

Sophie Chatenet
-

Alors que la décapitalisation s’accélère dans un contexte de hausse de charges sans précédent, la vente des animaux aux coûts de production doit s’imposer, selon les éleveurs Delphine Freyssinier et Laurent Courtois, y compris pour les broutards soumis à la contractualisation obligatoire dès le 1er juillet prochain.

Le contrat, une arme de proposition massive que doivent utiliser les éleveurs

La chute du nombre d’animaux dans les cheptels allaitants se poursuit. En un an, plus de centmille vaches allaitantes ont disparu des élevages français. « Ce sont autant de veaux qui ne naîtront pas. Le secteur s’inquiète, car près de cinq-mille bovins manquent chez les abatteurs chaque semaine. En steak haché, certains opérateurs avancent le chiffre de 30 % de manque. Cette décapitalisation ne nous surprend pas avec les coûts de production et les charges qui augmentent alors que du côté des éleveurs, le prix de vente ne suffit pas à couvrir ces hausses », regrette Delphine Freyssinier, éleveuse dans le Cantal. Pour elle, plus que jamais, « les éleveurs doivent impérativement proposer un contrat aux coûts de production comme le prévoit la loi ». En effet, en permettant à chaque éleveur de proposer un tarif de vente en corrélation avec son coût de production, la contractualisation est la meilleure des réponses pour enrayer l’hémorragie. « Que les fournisseurs passent des hausses de charges, c’est compréhensible. Il n’y a pas d’autres solutions, nous avons tous des factures à payer. Et de notre côté, nous devons en faire autant en proposant un prix de vente pour répercuter nos charges. Aucune profession n’accepte de travailler à perte. Il est temps que cela soit vrai aussi pour les éleveurs », estime Delphine Freyssinier. Concrètement, la contractualisation démarre chez l’éleveur. Il doit échanger avec son acheteur et lui faire parvenir une proposition de contrat à laquelle il doit obligatoirement répondre sous un délai légal d’un mois. « S’il ne veut pas jouer le jeu, alors il faut saisir le médiateur », insiste Laurent Courtois, éleveur dans le Rhône et administrateur à la FNB. Alors certes, il est difficile d’envisager de modifier quarante ans de pratiques en quelques mois, mais le jeu en vaut vraiment la chandelle. « Les FDSEA sont là pour accompagner les éleveurs à se familiariser avec cette nouvelle mécanique de tarif évolutif », indique-t-il. Et plus le nombre d’éleveurs qui contractualiseront sera important, plus les opérateurs de l’aval seront contraints d’acheter au prix juste, et pas juste à un prix. C’est mathématique… Pour le moment, la contractualisation ne concerne que les vaches allaitantes, les jeunes bovins (de 12 à 24 mois) et les génisses de plus de 12 mois. Dès le 1er juillet, ce sera au tour des veaux maigres et des broutards d'être concernés (voir le modèle de contrat). « La période de vêlage est pratiquement finie, et au lieu de faire un ticket de vente lorsque les premiers flocons de neige vont tomber, on anticipe, on prépare ses
contrats. Dans des régions comme les nôtres, les éleveurs doivent prendre ce tournant. On n’installera pas de jeunes si rien ne change. Ne ratons pas le coche ! »,
résume Delphine Freyssinier.

Sophie Chatenet