AURA
« Permettre aux populations d’avoir un avenir meilleur »

Propos recueillis par Pierre Garcia
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AIDE AU DÉVELOPPEMENT / Association accompagnant les organisations paysannes dans les pays en développement, l’Afdi Auvergne Rhône-Alpes a vu ses derniers projets perturbés par l’épidémie de Covid-19. Retour sur une année un peu particulière avec sa présidente, Nicole Bruel.

« Permettre aux populations d’avoir un avenir meilleur »
Nicole Bruel, présidente de l’Afdi Auvergne Rhône-Alpes. ©Afdi Auvergne Rhône-Alpes

Le 7 octobre dernier, l’Afdi Auvergne-Rhône-Alpes organisait un débat sur la souveraineté alimentaire. Que retenez-vous de ces échanges ?

Nicole Bruel : « Ce que je retiens, c’est que l’on parle toujours de la même chose car les besoins restent les mêmes. Avec cette crise qui paralyse le monde entier, nous avons d’autant plus besoin de parler de sécurité et de souveraineté alimentaire. Heureusement, il semble que les pouvoirs publics des pays en développement prennent aujourd’hui ces problématiques à bras le corps. La sécurité alimentaire, c’est le fait de pouvoir se procurer de la nourriture de base et l’objectif pour les pays qui y sont déjà parvenus, c’est de passer à l’étape suivante : la souveraineté alimentaire, qui est le fait pour un état de pouvoir définir de manière autonome sa propre politique alimentaire. La souveraineté alimentaire ne pourra venir que d’une prise de conscience citoyenne globale qui permettra d’aider les agriculteurs des pays en développement à vivre de leurs produits. »

Quelles sont les problématiques structurelles qui empêchent encore certains pays en développement d’accéder à la souveraineté alimentaire ?

N.B. : « La plupart du temps, le problème principal est le manque d’organisation. Dans un pays comme le Sénégal par exemple, il y a beaucoup de jeunesse mais on manque encore de projets structurés et rassembleurs. Dans les pays en développement, certains ne sont là que pour utiliser les terres et exploiter les personnes au lieu de chercher à donner à manger à tous. L’autre problème, c’est le commerce international. Bien sûr on ne peut pas le freiner mais la marchandisation des produits alimentaires de première nécessité ne devrait pas exister. Au Sénégal encore, on voit par exemple que la population ne consomme pas le riz produit par les agriculteurs locaux, ils mangent du riz chinois. Dans les pays en développement, nous avons un public très précaire avec de l’agriculture familiale. Leur voix ne porte pas auprès des plus hautes instances du commerce international et nous sommes là pour les y aider. »

Quelles sont justement les principales missions de l’Afdi ?

N.B. : « Tout au long de l’année, nous menons ce que l’on appelle des actions au Nord, en France. Ces actions visent à nous faire connaître, à parler de ce que l’on fait. Nous nous rendons régulièrement dans les structures des membres fondateurs de l’Afdi pour rappeler nos principales valeurs : la solidarité, la réciprocité, la citoyenneté. Nos actions au Sud, ce sont les missions d’accompagnement de structures paysannes que nous menons dans les pays en développement. Nous travaillons à ce que leurs projets soient économiquement viables et qu’ils puissent permettre aux populations d’avoir un avenir meilleur, que les familles puissent manger et les enfants aller à l’école. Nous essayons aussi, non pas de leur imposer le bio, mais d’intégrer le développement durable à la réflexion. »

Comment la crise du Covid-19 impacte-t-elle les projets que vous menez dans ces pays ?

N.B. : « Depuis notre dernière mission au Sénégal en février 2020, nous ne pouvons plus nous déplacer. Heureusement, les outils technologiques nous permettent de garder un contact régulier. Nous restons engagés dans nos deux projets au Sénégal : la création de jardins maraîchers collectifs et le développement d’une unité de transformation d’arachides. Nous poursuivons aussi notre travail à Madagascar où nous proposons depuis plus de vingt ans des formations techniques aux paysans. Depuis peu, nous soutenons aussi des projets d’apiculture et de maraîchage. Enfin au Burkina Faso, nous travaillons avec l’Union nationale des mini-laiteries qui regroupe 3 500 producteurs et 70 laiteries. Nous espérons que les échanges avec des paysans auvergnats pourront bientôt reprendre. Nous réfléchissons actuellement à nous ouvrir à d’autres pays mais nous attendons que les conditions sanitaires le permettent et que le bon projet se présente à nous. »

Propos recueillis par Pierre Garcia