ÉLEVAGE CAPRIN
Zoom sur les travaux de la station expérimentale du Pradel

Amandine Priolet
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EXPÉRIMENTATION / La ferme expérimentale caprine du Pradel a profité de sa journée portes ouvertes, le 6 octobre, pour présenter un certain nombre de travaux conduits ces dernières années.

Zoom sur les travaux de la station expérimentale du Pradel
Pour le projet FASTOChe, les chèvres pâturent dans des parcelles de sainfoin, afin d’étudier les effets antiparasitaires potentiels de cette culture.

GESTION DU PARASITISME / Les alternatives aux traitements allopathiques

Le projet FASTOChe (fourrage alicament strongle gastro-intestinaux ovins chèvre), initié en 2019, étudie l’intérêt d’un pâturage de prairies à base de plantes bioactives riches en métabolites secondaires bioactifs pour contrôler les niveaux d’infestations parasitaires par les strongles gastro-intestinaux (SGI) chez les petits ruminants. Cette expérimentation repose sur des périodes de pâturage de sainfoin, en cure de 15 à 17 jours, avec la comparaison des évolutions parasitaires de deux lots de 48 chèvres. Si un faible niveau de parasitisme a été relevé durant les deux années d’essai, il apparaît que le niveau d’excrétion de SGI du lot témoin (luzerne et prairie multi-espèces) augmente régulièrement au cours des trois mois de pâturage alors que celui du lot expérimental (sainfoin) se stabilise. Cependant, un même essai caprin, réalisé cette fois-ci en cure de 19 jours dans le cadre du dispositif de l’Inrae Patuchev1, n’a pas permis de confirmer ces résultats.

Des résultats diffusés en 2022

La variabilité des niveaux de parasitisme et d’effets antiparasitaires potentiels du sainfoin peut s’expliquer par des différences de conduite de système, des conditions climatiques variables induisant des différences agronomiques dans la culture du sainfoin, etc. Ces résultats seront mis en parallèle avec des expérimentations sur les ovins, puis diffusés à l’issue de l’étude, en 2022. Dans la même lignée, le projet Pepit2 ParCap AuRA (2020-2022) vise à acquérir de nouvelles connaissances sur la gestion des SGI pour les diffuser auprès de la profession. Les premiers résultats, consécutifs à une enquête réalisée auprès d’un panel d’éleveurs de la région, montrent une marge de manoeuvre importante par rapport au respect des préconisations pour prévenir et traiter le parasitisme. Sur le même thème, la ferme du Pradel étudie actuellement des traitements en phytothérapie à travers le projet « Plantes et santé caprine ». Médecine complémentaire à l’allopathie, les références scientifiques manquent pour prouver son efficacité. Les résultats de ces travaux seront présentés fin 2021.

1. Plus d’informations : https://www6.inrae.fr/experimentations-systeme/Les-experimentations/Elevage/Caprin/Patuchev
2. Pôles d’expérimentations agricoles partenariales pour l’innovation et le transfert aux agriculteurs d’Auvergne Rhône-Alpes.

 

Au-delà des conditions de travail plus favorables, la nouvelle salle de traite permet la mise en place d’expérimentations.

PRODUCTION LAITIÈRE / Une étude pour évaluer les incidences d’un changement de salle de traite

Depuis sa rénovation en 2019, la ferme du Pradel jouit d’une nouvelle salle de traite, avec une configuration inédite en France. La salle compte deux machines à traire identiques, montées en parallèle, avec 12 postes et 24 places chacune. Cette configuration permet de procéder à des essais avec modalités (témoin / essai), sur la traite, la qualité du lait, les données technico-économiques, etc. Un remplacement ou une rénovation de machine à traire est l’occasion pour le biofilm en place (communauté de micro-organismes) d’évoluer, voire de se renouveler. Dans un contexte de transformation à la ferme de lait cru, cet apport de micro-organismes au lait, par le biais de la machine à traire, a toute son importance.

Mieux connaître les groupes microbiens

À ce titre, le projet CMaFLAuRA 2019-2021, co-financé par La Région (projet Pepit) et l’Anicap (interprofession), a pour but d’étudier l’évolution du biofilm de l’installation de traite à la ferme du Pradel, depuis sa mise en route et selon diverses modalités de nettoyage. Il s’agit également d’observer le pouvoir acidifiant du lait et sa « fromageabilité » grâce à l’atelier de transformation en picodon AOP. Ces études permettront à terme de mieux connaître les différents groupes microbiens généralement présents dans ces biofilms afin de pouvoir les maîtriser et éviter la prolifération de flores indésirables. Les premiers résultats montrent que le changement d’installation a partiellement modifié le biofilm : les flores d’affinage sont présentes en plus grande quantité, contrairement aux levures et moisissures. Plusieurs explications à cela : les modifications de conception de la salle de traite, l’état neuf des consommables utilisés mais aussi l’ambiance du bâtiment, impactée par l’agrandissement de la chèvrerie.

 

TRANSFORMATION LACTIQUE / Résultats de l’étude des niveaux de flore des laits

Dotée d’un atelier de fabrication de fromages, la ferme du Pradel a mené de multiples expérimentations sur la maîtrise de la transformation lactique. En transformation fermière, le plus souvent au lait cru, le producteur doit s’adapter au lait de son exploitation, du fait de l’évolution de la charge microbienne. Le fromager doit donc ajuster ses paramètres technologiques au quotidien. Mais on assiste aujourd’hui, et majoritairement, à un appauvrissement de la flore des laits crus au sein des exploitations, causé par des pratiques d’hygiène de plus en plus rigoureuses.

En 2019, le Pradel a étudié le niveau de flore des laits mis en transformation, par un appauvrissement volontaire du lait généré par une pasteurisation. Il s’avère que cet appauvrissement volontaire n’a pas entraîné de défaut d’acidification ni de transformation sur une durée limitée au sein même de la fromagerie du Pradel, où l’ensemencement par le matériel de fabrication et l’air ont sans doute joué un rôle important. Car de précédentes études avaient montré que l’appauvrissement du lait était un facteur de risque de non-pérennité du lactosérum. Par ailleurs, les ferments du commerce ont également fait l’objet d’études. « Il est bon de conduire des essais à petite échelle (10-20 l de lait par exemple), quand on change de façon d’ensemencer, car le comportement des bactéries n’est pas identique sur chaque lait cru », rappelle la ferme du Pradel. Ces ferments sont donc à étudier au cas par cas, et avec précaution (adapter les conditions de température et la dose), et nécessitent d’établir des roulements de souches ou de types pour éviter le développement des bactériophages.

 

Le projet ValCabri, reposant sur l’alimentation des chevrettes et des chevreaux, prendra fin en 2021.

SYSTÈMES D’ALIMENTATION / Plusieurs programmes de recherche en cours

Reconquérir l’engraissement du chevreau à la ferme en améliorant sa valorisation, de l’éleveur jusqu’au consommateur, c’est l’objet du projet ValCabri (2019-2021), conduit par l’Idele (Institut de l’élevage) au sein de la ferme du Pradel. Plusieurs axes de recherche ont été retenus, dont l’alimentation en fin de gestation. Deux rations, aux niveaux protéiques différents, ont été proposées à deux lots de chèvres dont la mise-bas était prévue dans les 15 jours. Aucune différence n’a été mise en évidence, tant sur la production laitière des chèvres que sur la croissance ou les poids de carcasse des chevreaux. Il convenait aussi d’étudier trois aliments d’allaitement des chevreaux : un lait maternel brut et deux laits reconstitués et enrichis d’oméga 3. La présence d’oméga 3 a justement tendance à améliorer la qualité nutritionnelle de la viande. Cependant, les carcasses des chevreaux, élevés au lait maternel, sont moins lourdes et moins grasses. Elles ont une couleur plus claire, paramètre important qui répond aux attentes des consommateurs d’avoir une viande blanche. Enfin, l’optimisation de l’itinéraire technique de chevreaux croisés (race Boer et race Alpine) constituera le dernier essai de ce projet en 2021.

L’alimentaton post-sevrage des chevrettes

Autre expérimentation suivie par la ferme du Pradel (2019-2020), avec la comparaison de deux systèmes d’alimentation post-sevrage des chevrettes : un itinéraire préconisé (foin de qualité + apports limités de concentrés) et un itinéraire basé sur l’apport de concentrés à volonté avec du fourrage ou de la paille. L’alimentation à volonté semble pallier certaines conditions d’élevage défavorables (absence de foin de bonne qualité par exemple), mais il ne s’agit pas ici de la solution ultime : production de lait légèrement inférieure, coût d’élevage légèrement supérieur, quantité de fourrage nécessaire moins importante, etc. Enfin, le partenariat européen pour l’innovation technique d’allaitement des chevreaux (PEI TALC), piloté par le Pep Caprin, avait comme objectif de créer et proposer de nouvelles références aux éleveurs. Les résultats de l’étude, menée entre 2016 et 2019, sont en téléchargement sur la page Cap’Pradel du site de l’Idele.

Amandine Priolet

Toutes les informations sont à retrouver sur le site de l’Idele : http://idele.fr/