ALÉAS CLIMATIQUES
Au Verger du futur, des cerisiers couverts contre les aléas climatiques
À Saint-Laurent-d'Agny, des arboriculteurs se sont rassemblés pour tester différentes méthodes de couvertures sur cerisiers. L'occasion de mieux cerner leur efficacité et les adaptations nécessaires.
« La culture de cerises vit une véritable révolution depuis une quinzaine d'années, avec le passage de vergers extensifs à des vergers beaucoup plus intensifs et sécurisés. Or, ce changement a un coût. Globalement, on est passé de 10 000€ d'investissement à l'hectare à 100 000€. Dans ces conditions, les producteurs n'ont pas le droit à l'erreur. » C'est ce constat, dressé par Christophe Gratadour, responsable d'équipe arboriculture et maraîchage à la chambre d'agriculture du Rhône, qui a poussé plusieurs producteurs des Monts du Lyonnais (69) à se regrouper pour créer un verger à vocation expérimentale et pédagogique. Inauguré en 2017 à Saint-Laurent-d'Agny, le « Verger du futur » est porté par l’Association Fruits Rhône Et Loire (Afrel), Sicoly, Califruits et l'Association Fruits Plus et accompagné par la chambre d'agriculture du Rhône.
Un verger triplement protégé
« L'objectif de ce verger n'est pas du tout de travailler sur la sélection variétale. Alors les agriculteurs ont choisi deux variétés de cerises et surtout des porte-greffe nanifiant, permettant d'obtenir des arbres de 2m à 2m50, et de tester différentes modalités de couverture », explique Christophe Gratadour. Ainsi, les cultures sont accompagnées de trois types de protections superposées : des bâches anti-pluie, des filets anti-grêle et des filets anti-insecte à maille serrée contre la Drosophila Suzukii. Et ce selon deux modalités : une disposition de filets en monorang et une en filets monoparcelle.
Une efficacité approuvée
« Globalement, les deux modalités ont montré une très bonne efficacité. Ils sont parfaitement performants contre les risques de grêle. Et les filets anti-pluie ont permis de limiter les pertes liées au phénomène de cracking à moins de 5%. Alors qu'en plein champs, en fonction de la variété, on peut atteindre 50 à 60% de perte », compare Christophe Gratadour.
Potentiellement, les filets pourraient avoir également une utilité contre les gels printaniers puisque « l'effet confinement permet de gagner 1 ou 2°C. Mais nous ne n'utilisons pas les filets à cet effet car nous les installons après la floraison pour laisser l'accès aux abeilles. Et que nous n'avons pas assez de main-d'œuvre pour déplier et replier les bâches lors des épisodes de gel ».
En effet, la protection sous filet demande un temps de travail non-négligeable. « Il faut compter entre 600 et 700 heures de travail par hectare pour le montage. Et le pliage et le dépliage demandent entre 80 et 100 heures de travail par hectare chaque année. »
Une conduite adaptée
L'efficacité face à la Drosophila Suzukii s'est elle aussi montrée très bonne, notamment grâce à la vigilance des arboriculteurs face aux risques de percement. « Or, s'il y a une porte d'entrée pour les drosophiles sur le système monoparcelle, les dégâts concerneront l'ensemble de la parcelle alors qu'ils se limiteront à un rang en monorang », avertit Christophe Gratadour, pour qui « chaque modalité de protection a ses avantages et ses inconvénients et nécessite d'adapter sa façon de travailler ». En effet, « en monorang, les arbres sont plus confinés. On peut voir de la pourriture se développer en année humide, par exemple sur des arbres situés en fond de vallée. Ainsi, le monoparcelle sera plus adapté aux variétés sensibles à l'humidité. Et il est recommandé en terrain plat de forme régulière. Au contraire, le monorang s'adapte aux terrains pentus ou de forme irrégulière. Mais il nécessitera plus de travail pour garder une forme d'arbre régulière. Le monoparcelle demande moins de travail de taille. Par contre, la structure est plus sensible au vent ».
Par ailleurs, la protection sous filet nécessitera une vigilance accrue face à la chaleur. Ainsi, en plus des goutte-à-goutte, de la micro-aspersion a été installée pour rafraîchir l'atmosphère lorsque nécessaire, en général quelques jours par an.