PETITS FRUITS
Saison prometteuse pour les producteurs

Mylène Coste
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PETITS FRUITS / Démarrée début juin, la saison des petits fruits s’annonce prometteuse pour les producteurs ardéchois. Pour autant, le changement climatique et le manque d’eau récurrent sont préoccupants pour la pérennité de ces productions.

Saison prometteuse pour les producteurs
Les petites mains s'adonnent minutieusement à la cueillette de juin à septembre.

Depuis le 15 juillet, la récolte de framboises bat son plein au Gaec Chirouze, à Silhac. Une vingtaine de saisonniers sont à pied d’œuvre pour cueillir minutieusement les petits fruits cultivés par Fabrice Chirouze et sa fille Claire, entre 500 et 700 mètres d’altitude. Le Gaec compte également une trentaine de vaches laitières, mais son activité principale est aujourd’hui la production de petits fruits livrés au groupement d’intérêt économique (Gie) Fruits rouges des Monts du Velay. « Framboise, myrtille, cassis, mûre, groseille rouge et blanche… Nous cultivons une grande variété de petits fruits – au total trois hectares -, indique le producteur ardéchois. Toutes nos parcelles sont sous abris. »

Au Gaec Les petits fruits rouges, à Saint Jean-Chambre, là aussi, les petites mains s’activent : « Juillet est la période la plus laborieuse », indique Daniel Fayard, installé avec son épouse Jocelyne depuis 31 ans. Il cultive 2 ha de petits fruits (framboise, groseille, mûre, myrtille, cassis et mirabelle) ainsi qu’1,5 ha de châtaigniers, de moins en moins productifs du fait du changement climatique. Membre du bureau du Gie Fruits rouges des Monts du Velay, il produit des petits fruits de fin juin à fin septembre. « Tout est vendu en frais via le groupement, conditionné dès la récolte en barquettes de 125 g par les ramasseurs. Nous vendons aussi quelques fruits à Terre Adélice et transformons une petite partie de la production dans notre atelier pour le marché de Tournon. »

Des prix soutenus

Si la culture de petits fruits demande technicité et méticulosité, la rémunération est intéressante pour les producteurs : « Ça paye bien mieux que le lait ! affirme Fabrice Chirouze. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai diminué mon troupeau ces dernières années. Aujourd’hui, les petits fruits représentent les 2/3 de notre chiffre d’affaires (CA). » Même chose pour le Gaec Les petits fruits rouges : « Nos châtaigniers, majoritairement situés versant sud, ne produisent plus rien. La châtaigne ne représente plus que 5 % de notre CA, souligne Daniel Fayard. Les petits fruits rapportent en revanche plus de valeur ajoutée aujourd’hui qu’il y a vingt ans, même si les contraintes de production sont de plus en plus importantes. »

L’irrigation, une vraie préoccupation

Daniel Fayard ne cache pas son inquiétude après quatre années marquées par la sécheresse : « Le marché des petits fruits est aujourd’hui porteur mais il est de plus en plus difficile de produire du fait du changement climatique. À surface équivalente, on consomme aujourd’hui deux fois plus d’eau qu’il y a 10 ans ». Le producteur, qui irrigue à hauteur de 10 000 m3 pour 2 ha de petits fruits, a pourtant créé en 2016 un second lac collinaire. « Mais il est presque déjà à sec. S’il ne pleut pas dans les prochaines semaines, la saison sera difficile à passerLorsque je me suis installé il y a 30 ans, un seul lac irriguait pour toute l’exploitation. Aujourd’hui, deux sont insuffisants ! Et de conclure : La culture de petits fruits est très intéressante, à condition d’avoir de l’eau ! »

Cette année, Daniel Fayard a installé des filets d’ombrage sur plusieurs tunnels pour éviter la catastrophe de 2019 : « Le cassis et la moitié de la production de groseille avaient brûlé du fait du trop fort rayonnement du soleil. Les filets semblent bien fonctionner, et offrent un meilleur confort aux ramasseurs. La mise en place est aussi plus simple que le blanchiment. » Un investissement de l’ordre de 900 € / 500 m, qui semble plutôt prometteur.

Mylène Coste

Daniel et Jocelyne Fayard cultivent les petits fruits sur les pentes de Saint-Jean-Chambre.
Daniel et Jocelyne Fayard cultivent les petits fruits sur les pentes de Saint-Jean-Chambre.
Fabrice Chirouze et sa fille Claire , producteurs de petits fruits à Silhac
Fabrice Chirouze et sa fille Claire , producteurs de petits fruits à Silhac.
Petits fruits : « La demande est là »

Petits fruits : « La demande est là »

TROIS QUESTIONS À / Adeline Mialon, responsable vente, marketing et communication au groupement d’intérêt économique (Gie) des fruits rouges des Monts du Velay.

Quelles perspectives laisse augurer la saison 2020 ?
Adeline Mialon : « La saison, qui s’étend de juillet à la fin du mois de septembre, démarre bien. Si nous sommes encore incapables de donner des chiffres, on perçoit déjà une augmentation des volumes produits, une hausse que l’on peut imputer à plusieurs facteurs : le groupement compte quelques nouveaux producteurs et certains ont augmenté leurs surfaces. Par ailleurs, les conditions climatiques ont été plutôt propices cette année. Nous pourrions atteindre les 1 200 t de fruits rouges produits, contre 1 120 t pour la campagne 2019. »

Que pèse aujourd’hui le groupement des fruits rouges des Monts du Velay ?
A.M. : « Nous comptons aujourd’hui 44 producteurs dont 14 en bio. Parmi eux, 10 sont Ardéchois. Notre atout : notre zone de production située en altitude. Côté volumes, nous avons produit sur la saison passée 1120 t de fruits rouges, principalement fraise (710 t) et framboise (190 t). Nous produisons et commercialisons également de la groseille rouge, blanche et à maquereau, de la mûre, de la myrtille, du cassis… Nous sommes toujours à la recherche de nouveaux producteurs. »

Quels sont vos principaux débouchés ?
A.M. : « Nous faisons principalement du B to B auprès de grossistes et de la grande distribution principalement, pour le frais comme pour l’industrie (confiture, sirop, etc). Nous ouvrons également durant tout l’été notre magasin de vente directe à Saint-Jeures (Haute-Loire), à côté de notre site d’expédition. Nous y vendons des produits frais mais aussi des produits transformés par certains de nos producteurs (coulis, confiture, nectar…) et avons déployé une gamme de produits du terroir pour compléter notre offre (crème de châtaigne, lentilles du Puy, bières locales…). Le marché des petits fruits se porte plutôt bien et la demande est là. Nous jouissons aussi de l’attrait pour les produits locaux et de qualité qui s’est manifesté lors du confinement. »

Propos recueillis par M.C.

AGRICULTURE BIOLOGIQUE / Des traitements alternatifs
Daniel Fayard a investi dans des filets d'ombrage pour éviter les coups de secs qui peuvent être fatals.

AGRICULTURE BIOLOGIQUE / Des traitements alternatifs

Converti en bio depuis 2011, Daniel Fayard ne cache pas les quelques difficultés qu’il rencontre. La première d’entre elles : « Le désherbage ! Dans l’inter-rang, tout est fauché. Et sous le rang, je fais tout à la main ! Avec les années qui passe, c’est de plus en plus contraignant physiquement. Par ailleurs, certains parasites et champignons sont difficiles à contenir en bio. »

Le producteur fait aussi partie du groupe Dephy petits fruits dans lequel il échange ses observations avec des confrères d’Ardèche et Haute-Loire. « Nous utilisons des plantes en infusion pour traiter les cultures : la presle, riche en silice, est par exemple très efficace pour le démarrage des plantes. Je réalise également des décoctions de ténésie en insecticides. J’utilise aussi un peu de purin d’ortie et de fougère. »

La récolte en images