PERSPECTIVES
L’agriculture a encore du mal à recruter

Confrontée au vieillissement de sa population, l’agriculture française peine aujourd’hui à endiguer la baisse constante de ses effectifs. Apecita, Anefa, Ocapiat ou encore Pôle Emploi sont aujourd’hui pleinement mobilisés pour redonner de la visibilité aux métiers agricoles.

L’agriculture a encore du mal à recruter
Au quatrième trimestre 2020, 29 140 offres d’emploi étaient disponibles sur le site pole-emploi.fr pour la famille des métiers agriculture et pêche, espaces naturels, espaces verts et soins aux animaux. DR

L’agriculture a besoin de bras ! Au quatrième trimestre 2020, 29 140 offres d’emploi étaient disponibles sur le site pole-emploi.fr pour la famille des métiers agriculture et pêche, espaces naturels, espaces verts et soins aux animaux. D’après l’organisme, plusieurs filières agricoles apparaissent aujourd’hui en tension. C’est le cas de la filière forêt pour les métiers de conducteur d’engins agricoles ou forestiers, bûcheron, sylviculteur salarié et agent forestier. Mais elle n’est pas la seule, en témoigne les difficultés de recrutement pour les métiers de technicien et agent d’encadrement d’exploitations agricoles, de production en maraîchage, viticulture et arboriculture ou d’aménagement des espaces verts. Si le secteur agricole n’a pas décroché, il a lui aussi subi les effets de la crise Covid avec 3 % de déclarations préalables à l’embauche en moins recensées en 2020 par Pôle Emploi par rapport à 2019.

Des métiers qui peinent à être attractifs

« Il existe aujourd’hui un écart entre l’offre et la demande », confirme Jean-Michel Sotton, délégué régional à l’Apecita, association pour l’emploi en agriculture, agroalimentaire et environnement. En 2019, l’Apecita a en effet proposé 18 500 offres d’emploi au niveau national pour 17 800 personnes en recherche d’emploi soit un différentiel de 3,93 %. « Les deux principales difficultés pour trouver des candidats sont les conditions de travail difficiles et la rémunération qui n’est souvent pas à la hauteur. Pour un poste de directeur d’exploitation par exemple, il arrive que nous n’ayons qu’une seule candidature à proposer », raconte-t-il. Un constat partagé par Nicolas Savary, directeur de l’Anefa, association travaillant pour l’emploi et la formation en agriculture : « Les métiers de l’agriculture ne sont pas suffisamment bien connus du grand public, ou avec une vision passéiste. Même si les choses ont évolué, les métiers manuels restent encore souvent dénigrés. L’agribashing, cette tendance à mettre dans le même sac l’ensemble du monde agricole, peut aussi être une cause à nos difficultés de recrutement ».

200 000 euros pour le dispositif « L’agriculture recrute »

Conscients de ces difficultés, les ministres de l’Agriculture et du Travail, Julien Denormandie et Elisabeth Borne, ont réuni le 11 mars dernier la FNSEA, la FNEDT (travaux agricoles), l’UNEP (paysage) et des organismes liés à l’emploi comme Pôle emploi pour trouver des solutions concrètes. Concernant l’emploi saisonnier pour la saison 2021-2022, les ministres se sont engagés à tenir des « points régionaux » avec les opérateurs, organisés par les Draaf et les Direccte « au début du printemps », pour s'assurer que les besoins de main-d’œuvre sont pourvus. Julien Denormandie a par ailleurs confirmé une enveloppe de 200 000 euros pour le dispositif « L’agriculture recrute » de l’Anefa. « L’idée est d’organiser des opérations terrain qui nous permettent d’aller davantage à la rencontre des jeunes. En novembre 2020, nous avons par exemple organisé la première édition de la Semaine des métiers de l’agriculture qui a été un vrai succès », confirme Nicolas Savary de l’Anefa.

Valoriser la formation

Pour Cécile Gueux, cheffe de projet du domaine agriculture à Pôle Emploi Auvergne-Rhône-Alpes, la crise de la Covid-19 pourrait aussi représenter un virage pour l’emploi en agriculture. « On constate ces derniers mois un regain de valorisation des métiers agricoles qui passe par une prise de conscience du rôle de l’agriculture : dans la fonction nourricière, dans la résilience pendant la crise, dans notre souveraineté alimentaire et par l’envie de certains Français de renouer avec la nature. L’enjeu est de continuer à travailler avec nos partenaires pour augmenter la visibilité des métiers agricoles. » Pour y parvenir, l’ensemble des organismes liés à l’emploi s’accordent sur l’importance de miser sur la formation, qu’elle soit interne à l’entreprise ou qu’elle concerne des personnes en reconversion. Une stratégie qui commence à porter ses fruits. « Aujourd’hui, les salariés agricoles comptent pour plus de la moitié des salariés pour lesquels nous proposons des formations », confirme Florence Bert, directrice régionale de l’organisme Ocapiat en Auvergne-Rhône-Alpes

Pierre Garcia

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