RAPPORT PAPIN
Négociations commerciales : la matière première au cœur du prix

Serge Papin, a remis le 25 mars au ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie et à la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, son rapport sur le rééquilibrage des relations commerciales entre l’amont agricole et l’aval de la distribution. Il propose neuf mesures.

Négociations commerciales : la matière première au cœur du prix
Serge Papin et ministre de l’Agriculture Julien Denormandie le 25 mars lors de la remise du rapport sur le rééquilibrage des relations commerciales entre l’amont agricole et l’aval de la distribution.

« Si on ne bifurque pas, c’est la pérennité même de notre modèle agricole qui est remis en cause », a affirmé Serge Papin peu après la remise officielle de son rapport au gouvernement. Regrettant que « l’agriculture reste le maillon faible de ce rapport de force, dans des négociations dures, parfois brutales », il croit néanmoins en des lendemains meilleurs et souhaite, pour ce faire, pousser à la « contractualisation pluriannuelle sur trois ans renouvelables ». Saluant la prise de conscience collective qui souhaite « mettre un terme à la guerre des prix », il propose de garantir le prix de la matière première agricole lors de la première contractualisation. La prise en compte du coût des matières premières agricoles doit devenir « non négociable », a-t-il indiqué. Pour ce faire, il suggère d’instaurer une mécanique d’indexation pour revoir ce prix à la hausse ou à la baisse en cas de forte variation. En termes de contrôles, c’est la commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC) qui devrait être chargée du respect de cette bonne application, étant entendu que les indicateurs de prix doivent prendre en compte tous les investissements réalisés au nom des enjeux sociétaux : bien-être animal, RSE, normes, protection de l’environnement etc. Cependant cette première proposition devra certainement passer devant le législateur pour être appliquée. « Mais elle reste la recommandation la plus engageante », a-t-il justifié.

Une interprofession des interprofessions ?

Sa deuxième recommandation entend lever le voile sur l’opacité des relations commerciales, mais sans aller jusqu’à trahir le secret des affaires. Cette mission de transparence s’effectuera via un cabinet dûment mandaté, c’est-à-dire un cabinet neutre, externe à toutes les parties, en l’occurrence le cabinet Oliver Wyman. L’ancien PDG de Système U encourage aussi un renforcement de la médiation, rejoignant ainsi, en partie, les préoccupations de la FNSEA et de JA (lire encadré). S’il entend encourager le patriotisme agricole, en valorisant l’origine France et l’origine des territoires, il suggère également que les agriculteurs se regroupent afin de « créer des entités plus fortes », dans l’objectif de peser sur les négociations. Citant quelques interprofessions qui parviennent à faire entendre leur voix, il estime que leur « efficacité est liée à la capacité d’être solide et homogène (…) L’idéal serait d’avoir une interprofession des interprofessions qui soit capable de négocier », a-t-il dit, sous-entendu être la voix unique de la filière agricole et agroalimentaire française pour peser face à la grande distribution. Par ailleurs, Serge Papin recommande d’améliorer la perception de la valeur de l’alimentation, notamment lors des promotions de dégagement en cas de surplus de certaines matières premières agricoles. « Quand on vend du porc à 1,58 €/kg, il faut que la communication soit uniquement une communication magasin, et non sur des médias externes, sinon le consommateur peut penser qu’il s’agit d’un prix permanent », a-t-il précisé. Enfin, il milite pour la mise en place d’une « véritable éducation nutritionnelle dès le primaire ». Ce qui pourrait faire changer de regard sur l’alimentation.