FRANCE
Bien-être animal : « Ne pas pénaliser ceux qui travaillent bien »

Christophe Soulard
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ASSEMBLÉE NATIONALE / Alors que la ministre de la Transition écologique présentait ce mardi 29 septembre des mesures sur le bien-être de la faune sauvage captive, la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale a organisé, six jours plus tôt, une table ronde sur le bien-être animal au sein de l’Union européenne. Une demande sociétale de plus en plus vive qui, selon les députés, peine à se mettre en place et crée des distorsions de concurrence.

Bien-être animal : « Ne pas pénaliser ceux qui travaillent bien »

Selon le rapport de la députée Typhanie Degois (LREM, Savoie), adopté le 17 septembre dernier (voir ci-contre), le bien-être animal correspond aujourd’hui à une attente forte des citoyens et des consommateurs européens. Ainsi, un sondage de 2016 rapporte que pour 57 % des Européens, il est « très important » de protéger le bien-être des animaux d’élevage. En France, un autre sondage de 2019 rapporte que pas moins de 89 % des personnes interrogées affirment que la cause animale est importante. L’Union européenne a beaucoup légiféré dans ce domaine, au point que ses normes sont « parmi les plus strictes au monde. »

« Arrêtons de punir les bons élèves »

Cependant, chacun des orateurs à cette table ronde le constate : la législation européenne n’est que très partiellement et mal appliquée, « notamment pour la politique agricole commune », a indiqué Typhanie Degois, qui ne nie pas les enjeux économiques qui sous-tendent ce dossier. « Il existe une concurrence déloyale entre ceux qui respectent les normes et ceux qui s’en affranchissent et il n’est pas normal que les premiers fassent financièrement les frais des méthodes des seconds », a lancé le député européen Pascal Durand (Verts/ALE). « Oui, arrêtons de punir les bons élèves », a résumé Louis Schweitzer, ancien PDG de Renault et président de La Fondation droit animal, éthique et sciences1. Il est vrai que les conditions d’élevage et le coût social sont plus favorables dans certains pays de l’Est qu’en France, ont laissé entendre les intervenants. Ce qui fait que « l’agriculture française ne sera jamais compétitive sur le premier prix », a indiqué Louis Schweitzer. Il préconise la mise en place d’un étiquetage à l’image de la filière oeufs, avec une étiquette selon la gamme de produits et le mode d’élevage. « Car certains consommateurs ont besoin d’accéder au prix parce qu’ils ne possèdent pas le même pouvoir d’achat que leurs voisins », a-t-il justifié. Le consommateur y est de plus en plus sensible et « comme ça, on assure une dynamique de progrès pour les éleveurs et les consommateurs », a-t-il ajouté. Cependant, la députée Liliana Tanguy (LREM, Finistère) a remarqué que « la Pac incite trop peu les agriculteurs à se saisir du sujet ».

« Protéger nos éleveurs »

Le député Cédric Villani (LREM-Essonne) établit, comme Pascal Durand, un parallèle entre ce dossier du bien-être et celui des intrants (néonicotinoïdes et glyphosate). « Le combat est le même. On risque de perdre des pans entiers de nos filières et devoir importer des produits qui ne respectent pas les normes que nous nous sommes imposées », a-t-il expliqué. Pascal Durand demande de « protéger nos éleveurs, ceux qui fournissent des efforts pour élever leurs animaux dans des conditions saines. Sinon, on va à l’échec et on risque de bloquer le dialogue entre les éleveurs et le mouvement associatif ». Mais plus peut-être que l’élevage, c’est le transport qui semble être dans le collimateur des parlementaires. « Certaines sociétés ne respectent pas les normes en vigueur concernant le transport des animaux. Cette situation est scandaleuse pour les éleveurs » qui voient leurs efforts parfois réduits à néant, a jugé Pascal Durand. C’est pourquoi Louis Schweitzer souhaite interdire l’exportation d’animaux hors de l’Union européenne pour abattage et préconise plutôt l’envoi de carcasses. « Parce qu’elle raisonne en silo et uniquement par vision catégorielle, l’Europe n’a pas de vision politique du bienêtre animal », a tranché Pascal Durand.

Christophe Soulard

1. Reconnue d’utilité publique, cette fondation créée en 1977 a pour objectif « d’améliorer la condition animale par une transposition juridique des nouveaux acquis scientifiques et des évolutions éthiques, liés à la vie des animaux et à leurs relations avec l’homme ».