Ce vendredi 28 avril, Jeunes agriculteurs (JA) Ardèche a réuni de nombreux représentants du monde agricole et des élus autour d’Aurélien Jourdan, éleveur bovin. Il a rejoint l’exploitation familiale en décembre 2021 sur la commune du Cros-de-Géorand.

Gaec de l’Alliance : une histoire de famille
L'installation d'Aurélien Jourdan a été inaugurée en présence de nombreux élus et proches.

Aurélien Jourdan, 25 ans, originaire du petit village blotti dans la vallée du Tauron, a commencé par s’installer seul en location d’une ferme, aux Estables en Haute-Loire, en 2019. Il fait la fierté de son père, Michel Jourdan, qui souligne la détermination et l’implication de son fils dans son métier d’éleveur. « Il a fallu qu’il aille tout seul acheter et monter son cheptel, à 22 ans. S’il est là aujourd’hui, c’est grâce à lui-même », confie ému le père de famille.

"Une inauguration, c’est une réussite pour l’ensemble des acteurs"

Fort de cette expérience en solitaire où il a pu « s’impliquer à fond », Aurélien Jourdan, revient sur ses terres en 2021. Suite au décès de Véronique Jourdan, éleveuse en Gaec avec son époux Michel, Aurélien reprend le flambeau et fusionne en Gaec avec son père au sein de l’exploitation familiale, qui élève environ 80 bovins allaitants. L’éleveur demande alors la Dotation Jeune agriculteur (DJA). « J’étais déjà installé quand je me suis tourné vers les JA. Ils m’ont apporté des échanges au niveau savoir-faire, des conseils, et m’ont permis de me tenir au courant de l’actualité du monde agricole », reconnaît l’agriculteur. Julien Beaume, trésorier de JA Ardèche, est fier d’assister à l’installation d’Aurélien : « Ça crée du dynamisme dans le village, même si en montagne, c’est un climat difficile ». Concernant l’aide apportée à Aurélien au travers de la DJA, il poursuit : « La chambre d’agriculture aide au montage du projet, on suit les nouveaux agriculteurs pendant quatre ans, pour que ce soit un projet viable », explique Julien Beaume. Un enthousiasme partagé par Clément Guillaud, directeur du développement agricole au sein du Crédit Agricole. « C’est important d’accompagner les jeunes, pour qu’ils restent sur le territoire, on s’adapte à leurs besoins. Lors d’une inauguration, c’est une réussite pour l’ensemble des acteurs », affirme-t-il.  Michel Mialon, représentant sur place de Groupama, renchérit : « On est là pour soutenir les jeunes agriculteurs en cas de problèmes dans leurs parcours ».

Passionné dès son plus jeune âge, après un BTS production animale au lycée agricole de Brioude-Bonnefont, Aurélien, de son côté, ne se voyait pas entamer une autre carrière, loin de ses montagnes ardéchoises. « L’élevage, ça m’a toujours plu, je ne me suis jamais imaginé faire autre chose et j’ai toujours voulu reprendre l’exploitation. La ferme existe depuis mon arrière-grand-père, on en est à la 4ème génération, c’est une histoire de famille. »

"C’est un acte écologique de manger de nos viandes"

Dans un secteur montagneux où il y a en majorité des élevages, Aurélien Jourdan souhaiterait diffuser le message suivant : « J’aimerais faire comprendre que c’est un acte écologique de manger de nos viandes ». Il prévient : « Chez nous, s’il n’y a pas d’élevages, tout partira en friche et un désert finira par se créer. Les paysages vont se fermer, s’embroussailler et brûler l’été. On ne pourra jamais y faire pousser de cultures ».

Objectif : viser les circuits courts

L’éleveur est conscient de l’importance de communiquer autour de la consommation de viande qui est aujourd’hui montré du doigt. « Il faut arriver à expliquer aux gens que manger de la viande fait partie de la chaîne alimentaire. » Il souhaite mettre en valeur le Fin Gras du Mézenc, produit en AOP depuis 2006, avec une production par an d’une vingtaine de génisses qui ont entre de deux et trois ans : « On souhaite continuer à produire de la qualité et viser les circuits courts. Pour l’instant, on est en circuits semi-courts, nous vendons au grossiste la Sovisal, près d’Aubenas ». Encensé par Bernard Bonnefoy, président de l’association du Fin Gras du Mézenc, qui admire la force de caractère et le courage du jeune homme face à l’adversité, celui-ci souligne l’évidence : « Véronique Jourdan a transmis des valeurs humaines et le goût de l’élevage a son fils, ce qui lui permet aujourd’hui une réussite économique, mais aussi, une réussite sociale. Un homme bien dans son travail, c’est la base pour faire ce métier car on ne compte pas les heures ».

Faire évoluer l’exploitation, pour une meilleure qualité de travail

Justement, Aurélien Jourdan aspire à modeler une nouvelle façon de travailler en commençant par se simplifier les tâches au quotidien, mais aussi en améliorant les bâtiments et le matériel. De nouvelles façons de travailler, stimulées par les échanges entre agriculteurs. « En regardant ce qu’il se fait chez les autres, ça peut nous donner des idées », observe le jeune éleveur. Au niveau foncier, il concède espérer à terme agrandir la taille de son exploitation pour ainsi augmenter ses revenus.

Un souhait entendu par le maire du Cros-de-Géorand, Sébastien Pradier, qui révèle : « Aurélien vient d’avoir un complément de surface validé par la mairie juste à côté de son exploitation. La mairie met à disposition 230 hectares de terrain, car c’est une commune qui vit de l’agriculture et d’une vie de village ». Pour lui, il est important de répondre à « la nécessité qu’une agriculture ardéchoise reste, s’accroisse et prenne en compte la diversification des exploitations. D'ailleurs, cette année nous accueillerons au Cros-de-Géorand la Fête de l'agriculture le 20 août ».

Cette inauguration d’installation souligne l’importance de mettre en avant de jeunes agriculteurs afin de continuer à produire localement en vue d’enrichir les connaissances de chacun, de développer de nouvelles visions et de renforcer les liens entre partenaires pour rendre plus fort tout un secteur agricole.

Marine Martin

Le Gaec de l'Alliance au milieu des jonquilles.
Les deux éleveurs Aurélien et Michel Jourdan dans leur ferme bovine.
Maria, la compagne d'Aurélien, se dit fière de son parcours et l'accompagne au quotidien.
De gauche à droite : Aurélien Jourdan, Fabrice Brun, Sébastien Pradier et Jacques Genest, représentant de l'association des maires.

Les chiffres clés de l’installation en Ardèche

  • Chaque année en moyenne, 45 installations sont accompagnées en Ardèche.
  • En 2021, 61 projets de demande de DJA ont été accompagnés et présentés en Commission départementale d’orientation agricole (CDOA), dont 43 en zone de montagne.
  • Depuis 2019, la part des répartitions d’installations présentées en CDOA en cadre familial ne cesse d’augmenter : 58% en 2019, 64% en 2020 et 61% en 2021.
  • Concernant la répartition des installations présentées en CDOA, selon si l’on s’installe en individuel ou en société, on constate que les installations individuelles sont supérieures depuis deux ans : 54% en 2020 et 51% en 2021.
  • La part des installations accompagnées avec au moins un atelier en conduite AB ne cesse d’augmenter depuis 2018 et atteint les 62% concernant les installations de 2021.

"Il faut conserver notre capacité à être présent sur le territoire"

Benoit Claret, président de la chambre d'agriculture de l'Ardèche, met en avant l’importance de célébrer chaque installation dans le département, qui contribue au renouvellement des générations. « Il faut conserver notre capacité à être présent sur le territoire et à transmettre les exploitations. Car bon nombre de territoires sont transformés en estives. Ici, on conserve l’installation. » De plus, le Président souligne la nécessité de conserver une production locale, pour des enjeux économiques et sociaux d’une commune.  « C’est une société qui se construit autour d’un exploitant. Ce territoire de montagne, aux prairies naturelles, met en avant deux marques qui caractérisent le territoire : le Fin Gras du Mézenc et le Bœuf des Prairies Fleuries. » Sur le département, l’élu compte une installation pour un départ en moyenne. « On a toujours eu un fort taux de renouvellement, on a un nombre de cédants qui ne cesse d’augmenter d’où l’ambition forte que l’on porte sur la transmission. » La chambre d’agriculture offre un soutien aux personnes qui souhaiteraient s’installer. À ce sujet, Benoit Claret précise : « Une part de l’impôt disponible est mise à profit pour le parcours de l’installation. Nous assurons un accueil gratuit pour tous, afin de se renseigner sur comment devenir agriculteur. L’accompagnement est en partie pris en charge, pour qu’il soit le moins cher possible ».

"Une installation agricole, c’est un évènement familial, économique, social et politique"

Fabrice Brun, député de la troisième circonscription de l’Ardèche était présent lors de cette inauguration. « C’est un événement pour une famille, une commune, un territoire et même un pays. » En effet l’enjeu à l’échelle du pays est de favoriser la souveraineté alimentaire, en accompagnant l’installation de jeunes agriculteurs. « C’est ici que tout commence », annonce-t-il en désignant le Gaec de l’Alliance. Sur le territoire montagneux ardéchois, l’installation de nouveaux agriculteurs répond à « des enjeux locaux d’aménagement du territoire. Sans l’élevage, les paysages se ferment. De plus cette installation participe à la valorisation du Fin Gras du Mézenc, qui est une filière de qualité ». Il termine en rappelant que cet automne, la loi d’orientation agricole sera soumise aux députés. L’occasion de discuter des grands enjeux autour des « capacités à produire pour nourrir les Français et les Européens. Il faut retravailler sur l’inflation des normes, sur les matières actives, qu’on ne supprime pas tant qu’il n’y a pas d’alternatives, et également réfléchir à stocker l’eau qui tombe de façon irrégulière ces dernières années » alerte Fabrice Brun.