CHRONIQUE JURIDIQUE
Foncier : Le commodat, une formule souple et simple, mais précaire

La mise à disposition à titre gratuit, aussi appelé commodat ou prêt à usage, est une formule souple qui permet à un propriétaire de mettre un bien foncier à disposition d’un exploitant qui peut en faire librement usage, sous réserve de le rendre en l’état. Il se rapproche, dans l’esprit, du service d’ami.

Foncier : Le commodat, une formule souple et simple, mais précaire

Qu'est ce que le commodat ?

La convention de mise à disposition à titre gratuit, aussi appelée le commodat, permet de nouer une relation, sans répondre des obligations du fermage. En effet, cette convention de mise à disposition à titre gratuit est définie, comme « un contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s’en être servi » (article 1875 Code civil).

Cette convention va pouvoir être conclue pour la durée que les parties auront choisie. Cela peut être pour quelques semaines, plusieurs mois ou années. Attention toutefois à bien écarter tout paiement de loyers, ou service rendu : « Ce prêt est essentiellement gratuit » (article 1876 Code civil). Car le fait de donner au propriétaire une partie de la production agricole peut mener à requalifier la convention en bail rural.

Par ailleurs, pour ce qui concerne le cadre rural, il a été spécifiquement jugé que « Le prêt à usage agricole de terres autorise l’emprunteur à faire consommer l’herbe à ses animaux ou à la récolter ».

Plus de liberté dans la durée du contrat

Lorsque le bail rural inquiète une partie, ou qu’elle ne correspond pas à son projet, la convention de mise à disposition à titre gratuit peut apparaître plus adaptée et plus avantageuse.

Pour le propriétaire d’une part, ce type de convention permet de délimiter strictement la durée pendant laquelle il souhaite que son terrain soit exploité et occupé. Ce faisant, le propriétaire peut voir ce commodat comme un moyen d’entretenir le terrain, sans en transférer la jouissance sur le long terme. Pour sa part, on peut imaginer que laisser un exploitant faucher son pré ou le faire pâturer pendant quelques semaines ou mois lui permette d’assurer un entretien de la parcelle.

Pour l’exploitant, le premier avantage est de ne pas avoir à payer de loyer sur cette parcelle, pendant la durée de la convention. C’est aussi une possibilité de faire face aux difficultés de trouver des terrains pour exploiter. En ces périodes de fortes chaleurs et de sécheresses, on peut imaginer que ce type de convention permette d’obtenir une parcelle supplémentaire à faucher, et donc d’assurer plus d’alimentation pour les animaux.

A contrario, la convention de mise à disposition à titre gratuit a quelques défauts : le propriétaire ne perçoit pas de loyer, et l’exploitant est dans une situation plus fragile, car il ne détient pas de certitude de rester plusieurs années sur la parcelle concernée.

Quelques obligations

Même si la convention de mise à disposition à titre gratuit échappe aux nombreuses règles et obligations du bail rural, il demeure des obligations pour les parties, comme dans chaque contrat (article 1875 et suivants du Code civil).

Pour l’exploitant emprunteur, ces obligations consistent à veiller à la « garde et à la conservation de la chose prêtée », à l’emploi du terrain pour l’activité qui aura été convenue, ainsi qu’à l’usage personnel du terrain. Au terme de la convention, intervient une dernière obligation de restitution pleine et entière du terrain au propriétaire.

Du côté du propriétaire, il n’y a qu’une obligation qu’il se doit de respecter, c’est de transférer et d’assurer la libre jouissance du terrain à l’exploitant, pendant la durée convenue. Il retrouvera tous ses droits sur le terrain au terme de la convention.

La fin du commodat

La convention de mise à disposition à titre gratuit est conclue pour une durée déterminée, ce qui signifie que lorsque ce terme arrive, la relation prend automatiquement fin. L’exploitant doit quitter le terrain, et le propriétaire peut le réinvestir.

Si toutefois cette convention a un terme indéterminé, ou imprécis, il est conseillé au propriétaire de donner à l’exploitant emprunteur un congé, dans un « délai raisonnable », souvent arrêté à 6 mois. Cette hypothèse n’est pas nécessairement courante, puisque la plupart du temps, le terme est précisé par écrit. Un second élément peut venir éclairer le terme : l’objet de la convention. Si elle a été conclue pour la fauche d’un pré, on peut considérer que le terme intervient automatiquement après la dernière coupe.

Ambre Girardo, juriste à la FDSEA de l’Ardèche