SANITAIRE
Influenza aviaire : une nouvelle feuille de route

Lors de l'assemblée générale d'Anvol (interprofession des volailles de chair) le 28 juin, professionnels et pouvoirs publics ont esquissé les grands axes de la nouvelle feuille de route sur l'influenza aviaire. Un chantier qui nécessitera une approche collective dans une filière rudement éprouvée cette année.

Le ministère de l’Agriculture est en train d’analyser les propositions des parties prenantes pour la nouvelle feuille de route sur l’influenza aviaire, a indiqué sa sous-directrice adjointe à la santé et au bien-être animal, Karen Bucher, lors de l’assemblée générale d’Anvol le 28 juin. « Le cabinet est mobilisé pour définir un plan d’actions prioritaires », qui comprendra des mesures à « court, moyen et long terme ». À court terme, « les instruments disponibles consistent à réduire la densité et augmenter l’intensité de surveillance », estime Jean-Luc Guérin, de l’École nationale vétérinaire de Toulouse. Afin de « détecter les signaux le plus précocement possible », le renforcement de la surveillance fera l’objet d’un arrêté ministériel, d’après Karen Bucher. « L’État peut prendre en charge une partie des coûts, mais nous demanderons probablement des autocontrôles avant le mouvement d’animaux. » « Ce qui nous manque, ce sont les ressources humaines », a-t-elle fait valoir, estimant que les pouvoirs publics souffrent d’une « pénurie d’effectifs ».

Les poussières contaminées

Sur la mise à l’abri, du point de vue scientifique, « il y a de la place pour retravailler sur un confinement adapté au niveau de risque », d’après Jean-Luc Guérin. De quoi envisager une application plus fine des mesures de claustration, aujourd’hui en vigueur dès le passage en risque « élevé ». « Il n’est pas possible que les volailles sortent seulement quelques mois dans les élevages plein air », comme ce fut le cas en 2021-2022, reconnaît le président d’Anvol Jean-Michel Schaeffer. Mais cet éleveur alsacien exclut de « revenir à la situation d’avant crise » avec une dérogation systématique pour les petits élevages. L’heure est aussi au serrage de vis en matière de biosécurité et de réduction des densités. À l’assemblée générale d’Anvol, Jean-Luc Guérin a pointé le rôle des « poussières contaminées bourrées de virus ». Un vecteur « redoutablement efficace, qui peut jouer un rôle dans la diffusion du virus, peut-être plus que les aérosols ». Considérant ce risque et les mouvements de personnels entre élevages, « clairement, nous ne sommes pas au niveau » en termes de biosécurité, tranche le spécialiste toulousain de l’influenza aviaire.

La génétique

Du côté de la vaccination, les essais en cours devront confirmer que « l’abaissement de la charge virale est suffisant pour atteindre un niveau que l’on peut gérer par la biosécurité classique », résume Jean-Luc Guérin. Au-delà de l’efficacité du produit, l’application d’une éventuelle stratégie vaccinale soulève selon lui de nombreuses questions : Vaccine-t-on uniquement les palmipèdes ou inclut-on les gallus (poulets et dindes notamment) ? Qui paie la vaccination ? Comment gérer la surveillance et la traçabilité ? Quelle sera la réaction des consommateurs ? Enfin, deux chantiers portent sur le maillon génétique, selon le président du SNA (accouveurs), Louis Perrault, avec l’objectif « d’arriver à restructurer ce maillon ». Il s’agirait d’une part d’implanter « des sites de sélection dans des régions de moindre densité, dans des zones où on évite d’implanter des élevages », dans le cadre du plan d’investissement France 2030. L’autre volet consisterait à « travailler à une méthode de protection des sites sensibles » pour sécuriser les couvoirs, pour lesquels « il y a un besoin de proximité dans les territoires ». Là aussi, une des pistes serait « d’éviter d’avoir des sites de palmipèdes à proximité », car ces animaux sont réputés excréter massivement le virus avant même l’apparition des signes cliniques.

Besoin de collectif

Réactivité des professionnels et des pouvoirs publics, accès et renseignement des bases de données, etc. Si elles veulent éviter de nouvelles crises, les filières des volailles de chair - mais aussi des œufs et du foie gras - ont devant elles de nombreux chantiers. Une tâche qui nécessitera une approche collective, maintes fois soulignée lors de l’assemblée d’Anvol. Après la tempête du printemps, une phase plus délicate s’ouvre. « Au plus fort de la crise, tout le monde a été capable de s’entendre, constate Louis Perrault. Mais maintenant qu’on en est sortis, j’ai peur que chacun se fasse rattraper par le quotidien. »

YG