Prédation
Se défendre face au loup

Une centaine d’élus, d’éleveurs et de syndicalistes ont manifesté le 5 octobre à Grenoble en soutien au président du Département des Hautes-Alpes dans l’affaire de la queue de loup et pour réclamer le « Zéro attaque ».

Se défendre face au loup
Après les prises de paroles, les agriculteurs ont défilé calmement dans les rues de Grenoble jusqu’au palais de justice.

Élus locaux, syndicalistes, éleveurs, bergers, tracteurs… Ils étaient plus d’une centaine à s’être mobilisés à Grenoble, mardi 5 octobre, pour soutenir le président du Département des Hautes-Alpes, convoqué pour une audience en appel, suite à sa condamnation à 10 000 € d’amende en février dernier. Il avait offert une queue de loup à l’ancienne préfète de son département pour rappeler la détresse des éleveurs face au loup. Sonnailles en tête, les JA savoyards ont rejoint devant la préfecture leurs collègues haut-alpins, isérois, drômois, ardéchois, appuyés par quelques éleveurs ovins de l’OS charollais, venus de Saône-et-Loire. Ils attendent « que Jean-Marie Bernard soit relaxé, qu’il y ait un vrai comptage des loups et une vraie régulation », lance Josselin Dubost, le président des JA de l’Isère.

"Zéro attaque"

Après une rapide entrevue avec Jean-Paul-Célet, préfet référent national sur le Plan loup, élus et responsables syndicaux ont pris la parole. Dans leurs discours, une seule revendication : le « Zéro attaque » sur les troupeaux. Et un hommage unanime à l’élu haut-alpin, Jean-Paul Bernard, dont le « geste provocateur mais symbolique, a eu le mérite de médiatiser le sujet ». « Merci à Jean-Marie Bernard de soutenir notre élevage », résume une banderole. Tout autour, des éleveurs, des jeunes, des moins jeunes, installés en montagne ou en plaine, qui tous ont en tête le souvenir d'attaques commis par le loup sur leurs troupeaux, dénoncent une situation intenable. Comme Charlotte et Mariette, descendues de Matheysine pour défiler jusqu’au palais de Justice avec leurs pancartes couvertes de photos d’agneaux ensanglantés. « Se lever le matin en sachant qu’on peut retrouver nos bêtes dans cet état, c’est l’horreur. Les indemnisations, c’est bien, mais nous on préfère nos bêtes que les sous », souffle Charlotte. « On est là pour revendiquer le zéro attaque, pas pour demander l’éradication du loup, insiste François Chamot, président des JA de Haute-Savoie. On demande le droit de se défendre et d’avoir les moyens de le faire ! » Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère, est plus direct encore : « On ne peut plus cohabiter avec le loup. Nous avons réclamé que la profession ou les chasseurs puissent faire un réel comptage des populations de loups pour que les éleveurs puissent protéger correctement leurs troupeaux ». Son collègue des Savoie, Bernard Mogenet, avertit : « En laissant le loup se développer, on prépare la mort de nos territoires. C’est la mort de l’élevage de plein air qui répond pourtant aux attentes de la société. C’est un acteur économique, comme le tourisme ».

Le piège du loup

Un propos partagé par les élus locaux présents, écharpes tricolores en bandoulière. Solidaire avec son collègue des Hautes-Alpes, Fabien Mulyk, vice-président Département en charge de l’Agriculture, a rappelé que « si les éleveurs sont en première position face au loup, les élus, eux, sont en seconde ligne. Nous avons de gros soucis avec les chiens de protection. La prédation a un impact sur le tourisme comme sur nos enveloppes budgétaires ». Eric Lions, le président de la Chambre d’agriculture des Hautes-Alpes, de poursuivre : « Je ne veux pas être le président de la prédation. Nous avons autre chose à faire, à commencer par installer des jeunes, mais pas dans le piège du loup. Le préfet Célet nous a écoutés, mais il n’est qu’un pompier : il ne règlera pas le problème ». Cette situation ne concerne plus seulement les territoires de montagne, comme en témoigne la présence de nombreux éleveurs de plaine. « Je ne suis pas contre le loup en soi et ne suis pas un viandard, mais il faut choisir : le loup ou l’élevage, clame David Lacour, éleveur à Baron, en Saône-et-Loire. Depuis l’automne 2020, j’ai été prédaté trois fois. Chez nous, c’est du bocage, on ne peut pas protéger les troupeaux. » Après les prises de paroles, les agriculteurs ont défilé calmement dans les rues de Grenoble jusqu’au palais de justice. Jérôme Crozat et quelques représentants de la profession sont entrés pour soutenir « jusqu’au bout » Jean-Marie Bernard.

Marianne Boilève