La filière ovine offre l’opportunité de conserver une activité agricole dans des zones difficilement cultivables, notamment sur les hauts plateaux ardéchois. Elle est donc un élément clé de l’économie du territoire.
En Ardèche, plus de 45 000 agneaux sont commercialisés chaque année. La filière ovine concerne 293 éleveurs de plus de 50 brebis1. Le département compte 5 ateliers de découpe collectifs, et quelques-uns dans des fermes. Concernant la commercialisation de cette production, Alain Crozier, éleveur de brebis à Saint-Gineys-en-Coiron et président du syndicat départemental ovin (SDO), précise : « Quelques élevages développent une partie de leur troupeau en laitier et font de la transformation en fromage et yaourt. Mais la plupart des éleveurs produisent de la viande. Le produit principal est l’agneau, commercialisé à 40 % par la coopérative Agneau Soleil. L’autre partie est distribuée par des bouchers, via l’intermédiaire de grossistes pour certains. Une partie est également commercialisée par la marque Agneau d’Ardèche. Finalement environ 10 % de la commercialisation se fait en vente directe ».
Les habitudes de consommation ont changé
Longtemps liée aux périodes des fêtes religieuses, la consommation de viande d’agneau s’est petit à petit démocratisée, grâce notamment à la mise en place de signes de qualité. Les périodes d’agnelage se concentrent au printemps et à l’automne, ce qui permet de produire de la viande d’agneau quasiment toute l’année. « Avec des ventes plus régulières et une meilleure valorisation de la production locale, les cours du marché ont progressé et permettent aux éleveurs de vivre plus décemment aujourd’hui », souligne Alain Crozier. Si les consommateurs dans leur ensemble changent leurs habitudes en privilégiant les circuits courts, Bruno Damiens, ancien président de l’association de promotion de l’Agneau de l’Adret et éleveur de brebis à Champis, s’inquiète : « Les consommations ne se tournent pas forcément sur une autre viande : les gens en consomment moins, car il existe un lobbying contre les viandes en général ».
La commercialisation du label rouge Agneau de l’Adret passe majoritairement par la grande distribution. A contrario, la commercialisation de la marque Agneau d’Ardèche est un peu plus complexe. « Nous ne sommes pas sur le même marché, donc nous ne sommes pas concurrentiels, la marque s’adresse principalement à des bouchers », affirme Mickael Giraud, éleveur de brebis et d’agnelles à Saint-Joseph-des-Bancs et président de la marque Agneau Ardèche. « Tous les agneaux ne sont pas commercialisés en Agneau d’Ardèche, car on est à la recherche de bouchers pour vendre. On a la production, de nouveaux éleveurs souhaiteraient nous rejoindre, mais il nous manque des débouchés pour la commercialisation. »
Face à ce constat, l’Agneau d’Ardèche aimerait se développer autrement : « Avec la loi EGAlim2 , les collectivités doivent proposer des produits issus de labels et agriculture bio. L’idée, c’est qu’au lieu de partir sur une IGP, on se concentrerait sur une démarche label rouge, la stratégie serait de viser le créneau du marché de la restauration scolaire », ajoute Mickaël Giraud.
De son côté, l’association de promotion de l’Agneau de l’Adret privilégie une autre piste : « Nous allons travailler le produit en label rouge, la viande d’agneau a besoin d’être transformée. Nous devons avoir une politique de reconquête des consommateurs. Par exemple, en faisant des interventions dans des lycées hôteliers », envisage Bruno Damiens.
Malgré une consommation en évolution, il est difficile de faire face à la mondialisation des marchés et aux accords de libre-échange.
« Le consommateur a les clés en main »
Mickaël Giraud observe : « Au niveau de la filière ovine en France, il y a une stabilisation de la baisse de la production de viande. C’est un marché qui est fortement concurrentiel avec l’importation, provenant de pays comme la Nouvelle-Zélande, mais surtout du Royaume-Uni. On produit 40 % de ce qui est consommé en France. Il faut que le consommateur demande la viande française, il a les clés en main », affirme-t-il. On recense aujourd'hui environ 293 éleveurs en Ardèche, contre près de 900 en 19963 . Vieillissement de la population, difficultés du métier... Tels sont les arguments avancés par Alain Crozier face à un effectif de producteurs en recul.
Mais selon le président du syndicat ovin, la principale menace qui plane sur les éleveurs viendrait de la présence du loup. « Au fur et à mesure des années, les conditions de vie des éleveurs se sont considérablement améliorées, notamment au niveau des bâtiments et des outils techniques afin de simplifier le travail, mais tout est remis en cause par l’arrivée du loup », déplore-t-il. « La production baisse plus vite que ne baisse la consommation de viande, ce qui permet de maintenir des prix corrects pour l’éleveur. Heureusement que la viande d’agneau se vend assez bien, c’est encourageant », se réjouit Alain Crozier.
M.M.
1. Source Agneau d'Ardèche.
2. Depuis la promulgation de la loi Climat et Résilience, l'ensemble de la restauration collective, publique comme privée, a l'obligation de proposer 50 % de produits de qualité dont 20 % de produits bio à compter de 2022 pour le public, et d'ici le 1er janvier 2024 pour la restauration collective du secteur privé. Source ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire.
3. Source Inao.
Des marques et démarches de qualité
Le label rouge Agneau de l’Adret
À l’origine de la marque Agneau de l'Adret, les éleveurs ovins de la région Auvergne-Rhône-Alpes se réunissent avec une même volonté : garantir une viande de qualité aux consommateurs. Fin mai, l’association de promotion de l’Agneau de l’Adret a fêté ses 30 ans d’existence et les 10 ans de son label rouge, preuve de son succès et de sa durabilité dans le paysage commercial de la production ovine.
Ce label offre en effet des garanties de traçabilité et de qualité : l’agneau, né et élevé par le même éleveur, est nourri au lait maternel par tétée au moins 60 jours. Il offre aussi une meilleure rémunération pour les producteurs : un pacte gagnant-gagnant !
Essentiellement commercialisé par la coopérative Agneau Soleil, basée à Sisteron, l’Agneau de l’Adret est principalement produit en Ardèche, Loire, Isère et Puy-de-Dôme.
« Agneau d’Ardèche », traçabilité garantie
Des agneaux nés, élevés et abattus en Ardèche : la toute jeune marque « Agneau d’Ardèche » (2018) ne transige pas avec la traçabilité. Fruit d’un travail de longue haleine de toute la filière, cette marque valorise une viande d’agneau issue d’un élevage traditionnel, des animaux nourris à l’herbe et élevés au pâturage, dans le respect des milieux naturels. La marque fédère aujourd’hui une quarantaine d’éleveurs passionnés par leur métier, et également 17 bouchers, deux grossistes et 3 magasins de la grande distribution. Le repas du berger (Biassou) proposé lors de la Fête de la transhumance sera composé de viande d'Agneau d'Ardèche !
L’Agneau Soleil, au service des éleveurs
Basée à Sisteron, la coopérative L'Agneau Soleil rayonne dans tout le quart Sud de la France et à ouvert un magasin à Privas, au cœur de l’Ardèche, où elle compte de nombreux éleveurs coopérateurs. Spécialisée dans la collecte et la commercialisation des agneaux, L’Agneau Soleil regroupe 550 éleveurs, 160 000 agneaux et 200 000 brebis sous deux labels : L’Adret et l'Agneau de Sisteron, ainsi que la production bio. « La très grande majorité de nos producteurs ardéchois sont engagés sous le label rouge Agneau de l’Adret, ce qui montre à quel point l’Ardèche est une terre d’élevage qui tire la qualité vers le haut », affirme François Mochet, directeur de la coopérative.