ÉLEVAGE
Le recyclage : « une responsabilité morale »

Cette année, la mobilisation des éleveurs ardéchois a permis de collecter 209 tonnes de déchets utilisés pour le conditionnement du fourrage. Des matériaux qui vont être recyclés en quasi-totalité et servir à la fabrication de nouveaux produits agricoles.

Le recyclage : « une responsabilité morale »
Organisée par la chambre d’agriculture de l’Ardèche depuis 2006, la collecte des déchets d'élevage mobilise toujours plus d'exploitants.

Patiemment, Vincent Perrier remplit des sacs de ficelles. Sa tâche est régulièrement interrompue par des voitures, tracteurs et autres remorques chargées de plastiques et de sacs. Depuis, près de 10 ans maintenant, l’éleveur organise une fois par an, au printemps, une collecte de déchets d’élevage sur sa ferme, à Vernosc-lès-Annonay. « Au début dans le secteur, on devait aller en déchetterie, mais la structure n’était pas du tout adaptée », se souvient l’éleveur. « Il n’y avait pas la place pour manœuvrer, les bennes et l’espace de stockage n’étaient pas suffisants pour récolter nos déchets… » Voyant que les collectes peuvent être organisées dans les fermes, Vincent Perrier décide de se lancer à son tour. Avec l’aide de la chambre d’agriculture qui chapeaute cette action, il accueille chaque année une dizaine d’éleveurs des communes alentour. Mais aujourd’hui, il s’inquiète de la pérennité de la démarche. « Deux éleveurs bovins ont arrêté leur activité. Les bâches d’ensilage vont être moins nombreuses. Cette année, ils viennent encore, car il leur en reste, mais pour la prochaine ? », s’interroge-t-il.

Maintenir un maillage territorial

Trois tonnes de bâches d’enrubannage ou d’ensilage et une tonne et demie de ficelles ou filets, tel est le poids minimum attendu pour que Plancher Environnement se déplace (transporteur mandaté par Adivalor). « D’où l’importance des estimations demandées aux agriculteurs au moment de leur inscription à la collecte », explique Laëtitia Boffelli, conseillère en charge des déchets à la chambre d’agriculture de l’Ardèche. « Selon ce qui est indiqué, je vois les collectes qui peuvent être maintenues et celles qu’il faut regrouper. Le tout, c’est de maintenir le maillage territorial », poursuit la conseillère. D’une quarantaine de sites il y a 15 ans, il n’en reste plus que seize, ainsi que trois déchetteries, à Coucouron, Saint-Etienne-de-Lugdarès et Villeneuve-de-Berg, gérées par le Sidomsa. Une évolution qui s’explique par la baisse du nombre d’élevage mais surtout par une optimisation pour réduire le coût global d’enlèvement des déchets.

En Nord-Ardèche, en l’occurrence, plusieurs lieux de collectes existent encore. Si celle de Vincent Perrier venait à disparaître, les éleveurs devraient parcourir une dizaine de kilomètres supplémentaires tout au plus. « Je ne suis pas inquiète pour ces collectes », assure Laëtitia Boffelli. Il faut dire que les éleveurs sont de bons élèves en matière de recyclage. Malgré une réduction progressive du cheptel bovin ardéchois, le volume de déchets collectés ne cesse de grimper, passant de 175 tonnes en 2020 à 209 tonnes en 2023. Cette année, plus de 300 éleveurs ont participé à la collecte. « L’Ardèche fait partie des dizaines de départements qui collectent le mieux les déchets d’élevage en France », précise Charlène Ducrey, animatrice collecte à Adivalor.

Bien trier pour bien recycler

Si le recyclage n’est pas toujours une obligation réglementaire pour les déchets d’élevage, « c’est une responsabilité morale », insiste Charlène Ducrey. Aujourd’hui, le recyclage est entré dans les mœurs, mais la sensibilisation concerne surtout le conditionnement. Les plastiques, ficelles et filets doivent être triés séparément dans des saches prévues pour. En Ardèche, ce sont notamment la société Perret et la coopérative Agrial (ex Natura Pro) qui les mettent à disposition. « Selon ce qu’on a vendu, on connaît le potentiel de collecte et on commande un nombre de saches à partir de ces estimations », explique Magalie Helit, technico-commerciale pour le groupe Perret. La coopérative Natura Pro, devenue Agrial au 1er juin, est aussi un partenaire historique de ces collectes. « Cette année, sur nos douze magasins agricoles en Ardèche, on a distribué 4 500 saches de 250 litres », détaille Alexia Nury, en charge du dossier Adivalor à Agrial Alpes sud-est.

Une fois conditionnés dans ces saches et collectés par Plancher Environnement, ces déchets sont compactés à Lavilledieu avant de partir en Haute-Loire, en Normandie ou aux Pays Bas. Après le recyclage commence pour eux la transformation pour aller vers une nouvelle vie de ficelles, de sacs-poubelles, de tubes ou encore de raccords pour l’irrigation.

Pauline De Deus

Derrière le recyclage agricole : l'éco-organisme Adivalor

En France, les filières de recyclage des déchets agricoles sont particulièrement développées grâce à un partenariat entre tous les acteurs. À la logistique, Adivalor est le principal éco-organisme français du secteur depuis plus de 20 ans. Pilotée par des agriculteurs, des fabricants de produits agricoles et des distributeurs, la structure met en lien ces trois métiers pour organiser la collecte et le recyclage des déchets. Grâce aux contributions des fabricants et distributeurs, 22 types de déchets sont aujourd’hui traités par Adivalor. Un nouveau programme vient même de voir le jour pour recycler les emballages des produits de nutrition animale. 10 000 tonnes d’emballages consommés chaque année en France et qui pourront être recyclés. « Cette nouvelle collecte devrait avoir lieu début octobre », informe Charlène Ducrey.