POINTS DE VUE
La profession demande plus de souplesse et d’adaptation

Alison Pelotier
-

POINTS DE VUE / L’assurance récolte est l’un des grands dossiers agricoles qui dépendent du prochain budget de la Pac 2021-2027. Les professionnels craignent une enveloppe en baisse due au Brexit, tiennent à rappeler leur attachement au fonds des calamités et reviennent sur leurs attentes pour améliorer la politique assurantielle des agriculteurs.

La profession demande plus de souplesse et d’adaptation
Texte
Gérard Gallot est en charge du dossier assurance climat à la FRSEA Aura.

La moyenne olympique sur cinq ans. C’est sans doute le critère de calcul d’indemnités le plus remis en cause par les agriculteurs ayant souscrit à une assurance climat. Le calcul du rendement assuré tient compte de la moyenne des rendements historiques individuels déclarés par l’exploitant sur cinq années en excluant la meilleure et la pire. « Quand on subit des pertes d’exploitation régulièrement, ça ne devient plus intéressant de s’assurer », affirme Gérard Gallot, en charge du dossier assurance climat à la FRSEA Auvergne Rhône-Alpes. C’est le cas en arboriculture, en viticulture, mais aussi en grandes cultures et en maraîchage lors d’épisodes de gel ou de grêle virulents. Ce qui, d’année en année, devient de plus en plus fréquent. « Au lieu d’assurer ton potentiel, tu assures un rendement mais lorsque tu as eu plusieurs aléas climatiques d’affilée sur tes cultures, ça n’a vraiment plus aucun intérêt. Cela revient trop cher de s’assurer, on le voit très bien chez les arboriculteurs, c’est flagrant ! », ajoute le responsable professionnel.

Arboriculture : quid des moyennes départementales ?

Quelle serait alors la solution la plus adaptée ? « En arboriculture, nous demandons d’augmenter les franchises pour amener plus d’attractivité et faire rentrer plus de producteurs dans le système assurantiel. À partir de deux sinistres causant une perte totale de production, nous suggérons de prendre en compte les moyennes départementales (barème des calamités) sur un ou deux ans, au lieu de calculer la moyenne olympique sur cinq ans. Cela permettrait au producteur d’avoir une référence plus forte et de pouvoir au moins rentrer dans le système assurantiel », explique Bruno Darnaud, président de l’AOP pêches et abricots de France. La filière a aussi demandé aux assureurs « d’enlever les frais de cueille non engagés » sur les contrats, une somme qui peut avoisiner les « - 20 à - 30 % » sur les indemnisations versées aux producteurs. « C’est non négligeable. Les assurances partent du principe que dès que nous subissons un aléa, nous ne faisons plus rien. Ce que nous leur expliquons, c’est qu’on est loin de faire du résultat et de s’enrichir lorsque nous sommes touchés par un aléa climatique. Au contraire, ces situations difficiles à gérer nous donnent beaucoup du travail », ajoute celui qui a participé à la consultation sur la gestion des risques lancée par le ministère de l’Agriculture en juin 2019, dans le groupe de travail « gouvernance économique des fruits et légumes ».

Plus de liens entre assurances et fonds de calamités agricoles

Autre dossier chaud : le lien entre les contrats d’assurance et le fonds de calamités agricoles. Aujourd’hui, les contrats d’assurance ne permettent pas d’avoir accès à ce fonds public pour toutes les cultures assurables, en cas de perte de récolte. « Les prairies sont, par exemple, compliquées à assurer. D’autant plus que dans la région Aura, nous avons des sécheresses à répétition... Pour que l’indemnisation soit intéressante, il faut indéniablement le soutien de l’État qui ne doit pas laisser toute la charge et la responsabilité aux assureurs. Nous pourrions imaginer un système de réassurance mais que mettrons-nous dedans ? Des fonds d’État, européens ? Le budget qui sera accordé à la France dans la prochaine Pac sera déterminant et, je l’espère, nous permettra de réaliser des choix concrets. Nous espérons qu’il sera à la hauteur de nos espoirs », précise Gérard Gallot. L’éleveur ligérien tient à souligner l’attachement des agriculteurs au fonds des calamités agricoles « bien qu’il soit loin d’être parfait ». « En l’état actuel des choses, il a toute sa place, tant qu’on n’a pas trouvé un système assurantiel solide qui peut gagner encore en transparence et lisibilité », estime-t-il. Parallèlement, il y a une forte attente des producteurs de continuer à travailler sur une politique d’investissement forte avec le reste de la société. « Lorsque vous installez des ballons anti-grêle, ils ne sont pas profitables qu’à l’agriculteur. Ils vont aussi protéger les voitures, le parc immobilier, les installations communales, évolue Gérard Gallot, il y a sans doute de nouveaux partenariats à trouver pour que ces investissements pèsent moins sur les agriculteurs. »

Alison Pelotier

A lire sur le même sujet :

Y aura-t-il une rupture dans les dispositifs d'indemnisation ?

Décryptage de l'assurance récolte