Prédation
Loup : L’indemnité de la perte génétique en vue

Jean-Paul Célet, le préfet référent loup, s’est rendu en Saône-et-Loire le 31 août. Ils étaient nombreux pour l’interpeller sur le contenu du futur Plan national d’actions (PNA) loup, dont la parution a été reportée.

Loup : L’indemnité de la perte génétique en vue
Élus professionnels, dont de nombreux représentants des organismes de sélection, et politiques ont interpellé le préfet Jean-Paul Célet (au centre). ©EA71

En termes d’indemnisation, lors d’une attaque lupine, le lait ou encore la viande sont pris en compte mais pas la sélection, au grand dam des éleveurs qui craignent la perte de l’excellence française. Le chiffre d’affaires de la génétique du troupeau français est évalué à 13 milliards d’euros. Comment évaluer dès lors le coût d’une perte de création et/ou de diffusion génétique lors d’une attaque de prédateur ? C’est l’épineuse question à laquelle doivent répondre les éleveurs, les élus et les représentants des filières ovine et bovine réunis à l’occasion de la visite attendue de Jean-Paul Célet, le préfet référent loup. Une question qui n’est pas évoquée dans le projet de Plan d’actions sur le loup qui doit entrer en vigueur en 2024, pour une durée de cinq ans. Et c’est justement en raison de l’échec du précédent Plan à protéger les élevages que les filières ovines et bovines se mobilisent. « La génétique doit être clairement mentionnée dans le prochain PNA. La prédation a un impact sur la création et la diffusion génétique. C’est un problème pour la filière tout entière », insiste Claude Font, secrétaire général de la Fédération nationale ovine (FNO) et coprésident du comité régional ovin.

Au-delà de l’indemnisation, la protection

Difficile de protéger des troupeaux avec des filets, qui plus est en raison du paysage bocager et de la multitude de parcelles. « Pour ce qui est de la génétique, on demande aux éleveurs d’établir une paternité, ce qui implique de mettre en place des lots bien distincts avec chaque bélier. Mais il ne nous est plus possible de travailler dans de bonnes conditions parce qu’il nous est impossible de tout parquer avec une dizaine de lots. Pour ma part, il faudrait que je débourse 47 000 € pour faire le tour de l’exploitation. Mais ensuite qui entretien tout cela ? Il me faudrait un salarié à temps plein », ironise Pascal Chaponneau, président de l’OS mouton charollais. Quant aux tirs de défense, le préfet insiste sur le fait que le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, et celui de la Transition écologique, Christophe Béchu, ne sont certes pas pour le laisser faire... Pierre-Henri Panier, responsable du Massif du Jura et coresponsable de la commission prédation à la chambre régionale d’agriculture BourgogneFranche-Comté avec Alexandre Saunier, l’interrompent aussitôt : « Vous avez dit la même chose l’année dernière et la procédure s’est encore alourdie. Il faut, en plus de l’ancienne procédure, solliciter l’accord du préfet coordinateur pour avoir un tir de défense ». « Nous demandons une intervention systématique des louvetiers pour un tir de défense », insiste-t-il. Une expérimentation de tir à 500 mètres devait être mise en place.

Une filière en danger

Dans ces conditions, il est très difficile de faire perdurer la génétique française, que l’on considère comme l’une des meilleures au monde. « Et tout cela à cause d’un prédateur », s’insurge le président de l’OS charolais France et président de Races de France, Hugues Pichard. « La détresse est partout sur le territoire parce que le Plan loup va encore nous expliquer qu’il y a moins de loups qu’il n’y en avait avant alors qu’il a conquis plus de 20 départements en une année », se lamente Jean-Paul Bouveresse du Doubs.

Propositions concrètes

« Je m’engage à faire remonter la question de la génétique et vous invite à formuler des propositions concrètes en la matière. Le nouveau Plan national va peut-être répondre à certaines de vos questions, notamment sur la biodiversité. Le groupe national loup, qui regroupe ministères de l’Environnement et de l’Agriculture, doit se réunir le 18 septembre pour finaliser son nouveau Plan loup », promet le préfet référent qui soulève une énième question, celle du plafond des prélèvements. Un plafond national qui risque d’être capté par une poignée de départements. « Nous avons réussi à faire accepter que l’on puisse abattre 19 % de la population », à condition, rappellent les éleveurs, que l’estimation de la population lupine soit au plus juste. Les chasseurs et agriculteurs estiment qu’il y a plus de 2 000 loups en France. 1 000 estime l’OFB. Dans les deux cas, on est loin du fameux baromètre des 500 individus affiché lors de la réintroduction de l’espèce.

Ariane Tilve