ADAPTATION
Plus qu’un chien, un moyen de protection

Le chien de protection dit « patou » est utilisé par les bergers pour dissuader les prédateurs de s’approcher de leurs brebis. Une tradition pastorale à laquelle se sont passionnés Alexandre Perrier et Vanessa Vivert, éleveurs sur le Coiron.

Plus qu’un chien, un moyen de protection
Chienne de race Montagne des Pyrénées âgée de 18 mois, « Snow » garde un troupeau de 90 brebis sur un site de pâturage près de Taverne depuis quelques semaines.

Vanessa Vivert et Alexandre Perrier de la Ferme de Claut élèvent une trentaine de vaches Aubracs et 90 bre­bis Rouges du Roussillon et Mérinos d’Arles dans un système allaitant tout en herbe. Une pratique traditionnelle à laquelle ils sont très attachés. Sur les 90 hectares dont ils disposent, 60% sont destinés au pâturage, répartis sur deux sites à Saint-Gineys-en-Coiron et au hameau de Taverne. Les brebis pâturent de manière autonome habituellement, mais les attaques identifiées loup se succèdent depuis septembre 2021 sur le Coiron. La Ferme du Claut en a été victime au printemps 2022 : 4 brebis tuées et une blessée sont retrouvées devant la bergerie. Dans ce contexte, deux chiennes de protection vont être intégrées au troupeau. La première est âgée de 18 mois et entame sa première saison au pâturage, la seconde nommée « Taïga » est en phase d’imprégnation. 

Des chiens indépendants et protecteurs

18 mois pour 80 cm de haut et 50 kg, « Snow » en impose. Chienne de race Montagne des Pyrénées, elle garde un troupeau de 90 brebis sur le site de Taverne depuis quelques semaines. « Elle va rester là tout l’été et même l’hiver », précise Alexandre Perrier. « Elle est en confiance, elle ne monte pas en pression bêtement. Dès que les brebis sont en mouvement, elle est en éveil. Dès qu’elles se calment, elle aussi. » Les Montagne des Pyrénées sont des chiens indépendants qui ont une relation fusionnelle avec les brebis s’ils y sont bien imprégnés, explique-t-il. Des chiens « réputés sociables, très attachés à leur troupeau et pas trop à leur territoire ». Un paramètre important vis-à-vis des voisins éleveurs et des usagers. L’acquisition d’un 3e patou est prévu cet hiver, pour en laisser un sur chaque site de pâturage et pallier d’éventuelles blessures ou maladies. « Pour le moment, nous avons affaire à des loups isolés », mais les éleveurs se tiennent prêts à en acquérir davantage si une meute se constitue. Ils veillent aussi au renouvellement de leurs patous, car leur efficacité au pâturage dure en moyenne 6 à 8 ans maximum. Par la suite, ils peuvent être utiles en bergerie ou pour de petits lots de brebis.

Investissements humains et accompagnement

Intégrer un chien de protection à son troupeau ovin n’est pas à la portée de tous les éleveurs. « Tout dépend de la configuration de l’exploitation, du parcellaire, du secteur… Cela demande aussi beaucoup d’investissement humain et de patience. Il faut vraiment que l’éleveur soit prêt et partant », constate Vanessa Vivert. La Ferme du Claut présente des atouts indéniables : un parcellaire de pâturage regroupé, pas de chemins de randonnées, un élevage extensif mais pas trop… Elle a su aussi mettre toutes les chances de son côté, en demandant conseils, en se formant, en prenant le temps. Grâce à l’accompagnement d’une conseillère spécialisée de l’Idele, elle-même éleveuse ovine et utilisatrice de patous, le couple a obtenu de nombreuses informations utiles sur la mise en place d’un chien de protection. Ils ont été mis en contact également avec des éleveurs utilisateurs de patous pour retenir un chiot.

Une imprégnation forte

Snow est issue d’un élevage ovin du Vercors. Elle a rejoint l’exploitation à l’automne 2020, une période où les éleveurs étaient disponibles en bâtiment. « Nous l’avons immédiatement placé dans un lot d’une quinzaine de brebis en bergerie. L’imprégnation au troupeau doit être forte. Les brebis doivent devenir sa famille. » Petit à petit, la chienne sera imprégnée à des lots plus importants. Elle sera aussi habituée à être manipulée, tenue en laisse, aux chiens de conduite, aux tracteurs, à ne pas sauter les clôtures et les filets, au salarié du service de remplacement, aux enfants des exploitants, aux passages de vélos près des pâturages… Objectif : « Ne pas en faire un chien dangereux. Il doit être sociable mais pas trop et rester toujours près des brebis », résume Alexandre Perrier. « Aujourd’hui, les patous font partie de la ferme, nous avons conscience que nous ne sommes pas protégés à 100%, et nous nous serions bien passés de la charge de travail supplémentaire que sont d’installer des filets et d’élever des patous, mais nous ne voyons que cette solution pour nous défendre. L’important est que notre troupeau soit protégé. Il faut faire front au loup. »

A.L.

Vanessa Vivert et Alexandre Perrier de la Ferme de Claut, accompagnés de la jeune recrue « Taïga », destinée à la protection des brebis.