SOMMET DE L'ÉLEVAGE
Trois ministres, dont le Premier au chevet des éleveurs
Le Sommet de l’élevage, qui s’est tenu à Cournon d’Auvergne du mardi 1er au vendredi 4 octobre, a encore battu des records de fréquentation malgré une situation sanitaire compliquée. Contexte politique oblige, les nouveaux ministres de l’Agriculture et de l’Économie ont fait le déplacement à Cournon, mais c’est la venue de Michel Barnier, Premier ministre, qui a marqué les esprits.
« Que la ministre de l’Agriculture vienne au Sommet de l’élevage, c’est de l’ordre du normal, de l’habituel, mais que le Premier ministre se déplace en personne, c’est de nature exceptionnelle. Cela signifie clairement qu’il est aux côtés des éleveurs. » En préambule de sa déambulation, jeudi 3 octobre, au Sommet de l’élevage, Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, a solennisé le moment, car « la détresse des éleveurs, ovins en particulier, en première ligne de cette épizootie est immense ». Naturellement, elle a donc échangé avec les éleveurs du Hall 4, mais pas seulement.Elle s’est également entretenue avec tout le monde de l’élevage réuni à Cournon (Puy-de-Dôme). En fin d’après-midi, au nom de la Confédération nationale de l’élevage, Patrick Bénézit, éleveur dans le Cantal et président de la Fédération nationale bovine (FNB), a rappelé les revendications de la profession sur les volets sanitaires, climatiques, plan élevage, prédation, accords de libre-échange… Point par point, la ministre a esquissé des réponses, tandis que le lendemain, le Premier ministre, Michel Barnier, accompagné de son ministre de l’Économie, Antoine Armand, les a précisées lors d’une conférence de presse.
FCO, MHE...
Sur le volet sanitaire, Annie Genevard a annoncé la gratuité de la vaccination pour toute la filière ovine pour le sérotype FCO-3 sur l’ensemble du territoire français. Par ailleurs, elle a précisé que les programmes du Fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) dédiés à la MHE et la FCO-8 seront prolongés jusqu’à la fin de l’année. Pas sûr, toutefois, qu’ils soient suffisants, vu l’ampleur des pertes de l’ordre de 10, 40 voire 50 % dans les exploitations, soit autour de200 millions d’euros (M€), selon la FNSEA. En visite, le vendredi 4 octobre, Michel Barnier a confirmé la mise en place d’un fonds d’urgence de 75 millions d’euros pour prendre en charge les pertes des éleveurs engendrées par la FCO-3. Une avancée selon Michèle Boudoin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO), qui « salue l’effort consenti dans un contexte budgétaire contraint et le ciblage annoncé en faveur des éleveurs ovins. Désormais, nous allons regarder avec le ministère pour intégrer les pertes de la FCO-8 ». Consciente de la problématique de disponibilité des vaccins, la ministre s’est engagée a rencontré rapidement ses homologues espagnols. S’il salue des avancées, Patrick Bénézit déplore, à ce stade, des angles morts. « Il n’y a pas d’engagements clairs pour commander des vaccins contre la FCO-8 et la MHE. Par ailleurs, un flou subsiste sur la prise en charge des pertes sur la FCO-8. » Pour l’avenir et parce que l’immunité de masse ne peut se faire qu’avec les vaccins, la ministre a déplacé le curseur à l’échelle européenne en indiquant vouloir défendre la mise en place d’une banque d’antigènes.
Plan élevage : les engagements seront tenus
Annie Genevard a confirmé la concrétisation des mesures promises dans le cadre du Plan élevage par le gouvernement Attal suite aux importantes manifestations de l’hiver. Concrètement, il s’agit de la mesure de déduction fiscale et sociale pour l’élevage bovin qui sera inscrite dans le projet de loi de finances 2025 pour un montant de 150 millions d’euros par an. Sur le volet climatique, la ministre de l’Agriculture a dit « vouloir prendre le temps de réfléchir » à une réforme de l’assurance des prairies, n’excluant pas d’abandonner l’estimation des pertes par satellite pour « revenir à des analyses physiques ». Une revendication portée depuis des mois par la FNB notamment, face à une défaillance du satellite qui « ne voit ni les sécheresses, ni les inondations, ni la grêle ». Par ailleurs, Annie Genevard a annoncé avoir « pris la décision de publier un nouvel appel d’offres, comme s’y était engagé mon prédécesseur », afin d’étendre le réseau de fermes de référence pour la mesure de la pousse de l’herbe. Enfin, la ministre a répondu à une autre demande des éleveurs : « Vous pouvez compter sur ma vigilance pour que les assureurs, en cours de campagne, transmettent aux éleveurs les données fournies par les analyses satellitaires ».
Égalim, pastoralisme et prédation
La ministre de l’Agriculture a confirmé vouloir reprendre les réflexions sur la loi Égalim, tandis qu’au chapitre normatif, elle souhaite stopper la surenchère « en débarrassant les éleveurs de tout ce qui les handicape inutilement ». Au détour du stand pastoralisme, Annie Genevard, qui a été à la tête de l’Association nationale des élus de la montagne, a indiqué : « Le pastoralisme est un modèle que je veux défendre. Personne ne dit qu’il faut éradiquer le loup, mais on veut qu’il reste à sa place. L’avenir du pastoralisme, ce n’est pas de mettre les bêtes à l’intérieur ». Alors que les représentants des pays membres de l’Union européenne ont ouvert la voie à un déclassement du loup d’espèce strictement protégée à une espèce protégée, pour Christine Valentin, présidente du Sidam (Service interdépartemental des chambres d’agriculture du Massif central) : « Les tirs de défense doivent être élargis en cas d’attaques sur les troupeaux bovins, qui sont de plus en plus fréquentes ». La ministre entend y travailler.
Sophie Chatenet
120 000 visiteurs : nouveau record de fréquentation
En quatre jours, le rendez-vous auvergnat du Sommet de l’élevage a accueilli 120 000 visiteurs. Le visitorat international a progressé de 20 %. Rien que sur la journée du jeudi, l’évènement a enregistré 42 000 entrées ! Une belle réussite pour les organisateurs malgré des conditions sanitaires difficiles pour les éleveurs et contraignantes pour le Sommet. « Cette 33e édition s’est notamment tenue grâce à l’aide des services de l’État du Puy-de-Dôme (préfecture et groupement de défense sanitaire 63) », a salué le président du Salon, Jacques Chazalet. « Dans le contexte délicat pour le marché du machinisme agricole et des équipements d’élevage, nous constatons une satisfaction globale des 1 750 exposants », a estimé Fabrice Berthon, commissaire général. Côté convivialité, tous les voyants sont au vert, avec une soirée Jeunes agriculteurs (JA) au Zénith encore très prisée, le jeudi et un temps fort le mercredi, orchestré par le Criel et la section régionale laitière, autour d’une raclette géante très appréciée. Rendez-vous est déjà pris pour l’édition 2025, les 7, 8, 9 et 10 octobre avec, en guest-star, la charolaise, qui y organisera son concours national.
PROMOTION / La Région aime ses éleveurs
À l’initiative des interprofessions régionales bovine, laitière et caprine, et avec le précieux concours de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, une série de six vidéos de promotion de l’élevage de ruminants a été dévoilée, mardi 1er octobre au Sommet de l’élevage. Sous la bannière « Ma Région, ses éleveurs », en écho à la marque régionale « Ma Région, ses terroirs », ses vidéos ambitionnent de promouvoir le travail des éleveurs auprès du grand public, des élus et des collectivités, et qui sait, susciter des vocations auprès des plus jeunes. « Il est important de saisir toutes les occasions pour redire à quel point l’élevage est une chance pour l’économie de nos territoires ruraux. À bien des endroits, des zones partiraient à la friche si elles n’étaient pas valorisées par les troupeaux », a indiqué Patrick Escure, président du Comité de filière élevage à la chambre régionale d’agriculture. Plusieurs éleveurs sont donc passés devant la caméra pour expliquer leur travail : Anaïs Robert, éleveuse de chèvres laitières à Châteauneuf-de-Galaure dans la Drôme, François Garrivier, éleveur de bovins viande à Grezolles dans la Loire, Alexia Frenod, éleveuse de bovins lait à La Motte-en-Bauges en Savoie, Florian et Julien Debard, éleveurs ovins à Arcens en Ardèche (notre photo), Céline Méral, installée en bovins viande à Carlat dans le Cantal, et Anthony Bacquie, éleveur en bovins lait à Ladinhac dans le Cantal.
S.C.
Du lait pour les plus démunis
« Dans l’agriculture, on ne perd pas nos valeurs et surtout pas la plus importante, la solidarité », a souligné Arnaud Rousseau, président de la FNSEA en accueillant les partenaires de Solaal Auvergne-Rhône-Alpes au Sommet de l’élevage. Créée en 2013 par Jean-Michel Lemétayer alors président de la FNSEA, Solaal encourage et organise les dons alimentaires des filières agricoles aux associations caritatives. En Auvergne-Rhône-Alpes, l’association est présente depuis 2021. Chaque année, elle organise un don à l’occasion du Sommet de l’élevage. Cette fois, elle a demandé à ses partenaires de donner de leur personne en faisant une chaîne entre le stand de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes et celui d’Agrica, partenaires de l’opération. L’objet de l’évènement : la remise d’un don de 6 955 litres de lait à la Banque alimentaire du Puy-de-Dôme, cofinancé par le Sommet de l’élevage et Sodiaal. « Nous manquons toujours de lait, a confié le représentant de la Banque alimentaire. Merci aux donateurs. » Depuis sa création en Auvergne-Rhône-Alpes, Solaal a donné près de 29 000 litres de lait et 560 tonnes de produits essentiellement frais. « Cela représente 1 million de repas dans la région, a souligné Grégory Chardon, président de Solaal Aura. Les dons vont croissant et nous avons chaque année de nouveaux producteurs qui s’engagent à nos côtés. »
L’INFO EN + / Les agriculteurs solidaires d’Octobre Rose
Le réseau JA-FNSEA se mobilise chaque année dans le cadre de l’événement Octobre Rose « parce que les agricultrices sont des femmes comme les autres, touchées par la maladie et que le cancer du sein est l’affaire de tous », a indiqué mercredi 2 octobre, Catherine Faivre-Pierret, présidente de la Commission nationale des agricultrices, à l’occasion d’un lâcher de ballons organisé au Sommet. Les mobilisations ont lieu pendant tout le mois d’octobre et revêtent des formes très différentes selon les départements : formation à l’autopalpation, marche rose, ventes caritatives, boîtes solidaires pour les femmes atteintes du cancer, pièce de théâtre avec billetterie solidaire, tombola… Chaque année, ce sont plusieurs milliers d’euros récoltés grâce au travail mené par les agriculteurs et les agricultrices et directement reversés à la ligue contre le cancer ou à des associations partenaires. « Cet engagement est indispensable car près de 33 000 femmes du régime agricole sont touchées par le cancer du sein et près de 4 000 nouveaux cas sont détectés chaque année », ont expliqué les responsables de la MSA.