TECHNIQUE
Quel enjambeur pour le travail du sol ?

Ludovic Vimond
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AGRONOMIE / Revêtant une importance grandissante en viticulture, le travail du sol oriente de plus en plus le choix du tracteur enjambeur.

Quel enjambeur pour le travail du sol ?
Plus lourds et plus chers, les gros enjambeurs polyvalents offrent des débits de chantier au travail du sol plus importants. Par ailleurs, ils peuvent accueillir une cellule de pulvérisation ou un épandeur sur leur plateforme. ©Bobard

Avec la disparition de certains herbicides en viticulture, les méthodes de travail sont remises en question. Cela se concrétise par un retour en force du travail du sol, notamment sur le rang. Aussi, les constructeurs s’accordent sur le fait que ce travail constitue la tâche demandant le plus de réflexion dans l’achat d’un tracteur enjambeur hydrostatique. Plus que le désherbage chimique, le désherbage mécanique exige une attention permanente, qui plus est si la vigne n’est pas parfaitement alignée. Il faut réussir à travailler au plus près du cep, sans le casser. Cette vigilance est d’autant plus délicate que la vigne est étroite et haute, compliquant la visibilité directe sur le rang.

Premier critère : la vision directe

La vision directe constitue l’un des premiers critères dans le choix d’un enjambeur destiné au travail du sol. Le plancher vitré et des vitrages frontaux et latéraux qui descendent jusqu’en bas du poste de conduite permettent d’avoir une vue vers les outils. Certains viticulteurs font le choix d’une cabine abaissée dans le rang, soit un trois roues enjambant deux rangs avec une cabine centrale, soit un monorang avec la cabine sur le côté. Seule contrainte, pour descendre la cabine dans le rang, il faut bien souvent un interrang minimal de 1,30 m. Placé dans le rang, le poste de conduite offre une vue privilégiée sur les rangs adjacents et abaisse le centre de gravité, rendant l’engin plus stable. De plus, l’accès en cabine est moins haut, un avantage quand il faut descendre pour décoincer un cep par exemple. En revanche, si le viticulteur travaille également l’interrang, cela nécessite de conduire avec le cou et le dos recourbé pour regarder sous le plancher vitré. Une position qui n’est pas forcément confortable dans la durée.

C’est la raison pour laquelle certains constructeurs proposent des enjambeurs avec un poste de conduite reculé. Tous les porte-outils sont devant le conducteur qui n’a pas à se courber. C’est le cas notamment des Laboureur de Vermande ou GRV. Les modèles de GRV sont des petits monorangs tandis que celui de Vermande enjambe deux rangs. Son châssis s’appuie sur une poutre centrale en col-de-cygne, limitant les angles morts et offrant un dégagement important pour relever les outils centraux les plus imposants. En revanche, qui dit cabine reculée, dit plateforme arrière réduite, pour ceux qui souhaiteraient équiper l’enjambeur d’une cuve arrière pour la pulvérisation.

La configuration des vignes limite le choix

La polyvalence du tracteur constitue également un critère d’achat. Ce choix va souvent de pair avec la taille de l’exploitation. Une petite structure privilégie un tracteur polyvalent, tandis que des plus grosses exploitations tendent à investir dans plusieurs enjambeurs spécialisés dans leurs tâches. Cela permet de limiter les temps d’attelage et de dételage des outils, mais également d’adapter les besoins de puissance aux opérations. Dans cette configuration, le tracteur dédié au travail du sol est généralement un modèle léger, maniable et souvent peu puissant. La consommation de GNR et la compaction des sols s’en trouvent limitées. À l’inverse, le partisan d’un tracteur puissant et polyvalent cherchera à optimiser les passages en combinant plusieurs travaux. Le chef d’exploitation doit alors s’assurer à l’achat d’un débit de pompe et d’un nombre de sorties hydrauliques suffisamment important pour ses besoins actuels mais aussi futurs.

Autre critère à prendre en compte, la configuration des vignes. Avoir des vignes d’interrangs divers implique un monorang ne travaillant que le rang enjambé ou un double rang à voie variable, afin de toujours travailler au plus près des ceps. Des fourrières de taille réduite orienteront vers des trois roues, voire des monorangs à empattement court et angle de braquage important.

Lorsque les vignes sont pentues, il peut être nécessaire de privilégier la stabilité en optant pour un double rang et/ou pour la correction de dévers. Un tracteur puissant chaussé de pneumatiques larges (ou des chenilles) évoluera plus aisément dans les pentes importantes. Le choix des pneus doit également prendre en compte la nature des sols (pierreux, argileux) et la présence d’enherbement ou non en surface. S’ajoute à cela la perception du travail du sol par les viticulteurs. Ceux qui pratiquent le travail du sol depuis des années privilégieront les critères agronomiques avec une maîtrise fine de la qualité de travail. Ceux qui ont récemment abandonné le désherbage chimique chercheront majoritairement un débit de chantier et donc un enjambeur travaillant deux voire trois rangs à chaque passage. Or, l’attention portée simultanément sur trois rangs n’est pas la même que celle concentrée sur un rang.

Le choix du porte-outil pour se faciliter la vie

Dernier point important lorsqu’on parle de travail du sol : le porte-outils. Tirée ou poussée, cette interface permet d’atteler un ou plusieurs outils. Afin de faciliter le montage et démontage des outils, certains constructeurs proposent des attelages semi-automatiques ou automatiques, parfois sans outil. Cela réduit la pénibilité et l’immobilisation du tracteur entre deux travaux. Parmi ces solutions, GRV se distingue avec le Click-tools qui extrait le porte-outils d’entre les roues en le pivotant à 180 degrés et en le ramenant vers l’avant.

En outre, ces porte-outils peuvent être dotés d’un déport hydraulique, pour travailler au plus près des ceps dans les vignes irrégulières, mais également d’une correction hydraulique d’inclinaison. Le contrôle de profondeur constitue un paramètre important à piloter depuis la cabine. En effet, sur sols irréguliers, l’outil ne travaille pas assez profond si l’enjambeur monte sur une butte et trop profond s’il descend dans un trou. Si le contrôle de profondeur se limite bien souvent à une chaîne qui empêche l’outil de trop piocher, certains constructeurs proposent en option un terrage hydraulique piloté depuis la cabine. Pour soulager le conducteur, GRV propose un contrôle automatique de profondeur par ultrasons, garantissant un travail constant.

Ludovic Vimond