AIDE À LA DÉCISION
Valsoleil et Sencrop déploient un réseau de stations agri-météo connectées

Depuis deux ans, la coopérative Valsoleil a noué un partenariat avec la startup Sencrop pour permettre aux agriculteurs d’accéder à des données météo ultra-locales. Objectifs : optimiser l’utilisation des intrants ou encore piloter l’irrigation au plus près des besoins des cultures.

Valsoleil et Sencrop déploient un réseau de stations agri-météo connectées
Denis Farfouillon et Mathis Champion, respectivement responsable protection des plantes et référent station météo chez Valsoleil devant une station Sencrop. ©AD26-S.S.

C’est un réseau météo de plus en plus précis que déploie Valsoleil sur son territoire, à savoir la moitié nord de la Drôme et une partie de l’Isère. « Nous comptons déjà 230 stations sur quatre-vingt-dix exploitations », annonce Denis Farfouillon, responsable « protection des plantes » au sein de la coopérative. Ce déploiement est le fruit d’un partenariat lancé il y a deux ans avec la startup Sencrop. « Certains de nos adhérents s’équipaient individuellement auprès de Sencrop. Nous avons souhaité aller plus loin en mutualisant ces équipements et en offrant la possibilité aux agriculteurs de s’abonner1 à l’ensemble des données issues de ces stations », indique le responsable. Les 230 équipements déjà en service permettent d’accéder aux données de base : cumul de pluie, températures, humidité, point de rosée… 40 % de ces équipements sont complétés par un anémomètre qui mesure la vitesse du vent, sa direction et les rafales. Ces stations sont toutes connectées pour permettre d’accéder en temps réel, depuis un smartphone, aux données météo et recevoir des alertes en cas de gel ou de cumul de pluie nécessitant le déclenchement d’un traitement.

Optimiser les pratiques des agriculteurs

Si la station météo n’a rien d’un outil révolutionnaire, le maillage fin du territoire permet lui d’optimiser les pratiques des agriculteurs. « Dans le Diois par exemple, nous pouvons avoir des pluviométries très différentes d’un versant à l’autre. Jusqu’à présent les données météo dont nous disposions n’étaient pas assez précises pour développer sur ce secteur un outil d’aide à la décision (OAD) pour la lutte contre le mildiou en viticulture », illustre Denis Farfouillon. Parmi les OAD déjà disponibles auprès de la coopérative : ceux pour la modélisation des maladies sur céréales à paille (Xarvio® ou Abelio par exemple) ou sur le mildiou de la pomme de terre (Mileos®). Tous peuvent récupérer les données du réseau météo déployé par Valsoleil et Sencrop et coller ainsi à la réalité du territoire, avec l’ambition d’aller jusqu’à une gestion à la parcelle. « Ces OAD redonnent de l’autonomie à l’agriculteur dans un contexte où notre coopérative ne peut plus apporter de conseil2 en matière phytosanitaire », estime le responsable.

Aide à la décision pour l’irrigation

Autre volet sur lequel Valsoleil compte se positionner via ces stations météo : celui de la gestion de l’eau. La coopérative vient d’investir dans des pyranomètres connectés, distribués par Sencrop, qui permettent de mesurer l’irradiance solaire et d’en déduire l’évapotranspiration (ETP). Onze « Solarcrop » - dont deux acquis préalablement par des agriculteurs - maillent déjà le territoire. « Notre objectif est de développer un outil d’aide à la décision pour l’irrigation. Notre cible : les grandes cultures où l’utilisation des sondes tensiométriques s’avère beaucoup moins pratique qu’en arboriculture, détaille Denis Farfouillon. Nous sommes pour l’instant en phase d’expérimentation pour comparer les réponses obtenues par les sondes et celles du dispositif météo de Sencrop associant le Solarcrop. Pour l’instant, les données sont quasiment similaires. » Valsoleil, en partenariat avec la coopérative Drômoise de céréales, pourrait proposer bientôt aux agriculteurs un OAD qui leur permette d’utiliser l’eau disponible avec un maximum d’efficacité, notamment grâce aux courbes de disponibilités d’eau dans le sol (voir exemple dans le graphique ci-dessous) consultables via une application.

Sophie Sabot

Contact : Mathis Champion au 06 09 33 41 69 ou [email protected]

1. Différentes formules tarifaires sont proposées : avec fourniture d’un ou plusieurs outils connectés (pluviomètre, anémomètre, pyranomètre…), avec abonnement au réseau de données (seul ou avec station météo)…
2. Suite à la séparation des activités de vente et de conseil phytosanitaire, entrée en vigueur au 1er janvier 2021.

CHRISTIAN NAGEARAFFE

« Avec ces outils, je peux démontrer ce que je fais »

Nuciculteur sur 40 ha à Montmiral, Christian Nagearaffe utilise depuis cinq ans les outils Sencrop, notamment le pluviomètre, l’anémomètre, le capteur d’humectation [qui permet de recevoir des alertes sur les risques maladies ou gel, ndlr]… L’année dernière, il s’est également équipé d’un pyranomètre (capteur d’irradiance) Solarcrop et a rejoint le réseau de stations connectées déployé par Valsoleil et Sencrop. Grâce aux données collectées, il a désormais accès via son téléphone à un outil de pilotage de l’irrigation. « Je sais ainsi dans quel état hydrique se trouvent mes sols et j’ai une visibilité à sept jours pour anticiper la mise en route de l’irrigation, explique le producteur. Auparavant, j’utilisais des sondes tensiométriques qu’il fallait relever. Là, c’est beaucoup moins contraignant. » S’il est satisfait de la fiabilité et de la facilité d’utilisation de ces outils, Christian Nagearaffe tient à alerter sur la situation de son territoire en matière d’irrigation. Compte tenu des restrictions imposées sur ce secteur du Nord de la Drôme, il n’a droit qu’à 1 000 m³/ha/an. « Avec ces équipements [théoriquement destinés à optimiser la conduite de la culture, ndlr], je gère en fait la pénurie d’eau et la survie de mes arbres, résume-t-il. Et je peux démontrer ce que je fais, et que ce n’est absolument pas une vue de l’esprit quand je parle de gestion de pénurie. »

Bilan hydrique en blé tendre d’hiver

Bilan hydrique en blé tendre d’hiver
Les données recueillies par les stations météo (pluviométrie, irradiance, vitesse du vent…) permettent à Sencrop et Valsoleil de fournir à l’agriculteur un bilan hydrique quotidien, en fonction du type de sol et du stade de croissance de la culture. Ainsi, l’agriculteur peut suivre la disponibilité de l’eau dans la zone racinaire et déclencher l’irrigation au plus près des besoins de la plante. © Capture d’écran bilan hydrique Sencrop.

Un réseau à développer

Le réseau de stations agri-météo connectées couvre déjà une bonne partie du territoire de Valsoleil. Mais la coopérative souhaite développer de nouvelles stations sur les zones céréalières autour de Chabeuil et Valence, ainsi que sur le territoire nucicole du Royans. Et Denis Farfouillon insiste : « Avec les épisodes orageux récents, nous avons mesuré de gros écarts de pluviométrie jusqu’au sein d’une même commune. Cela peut changer les données par rapport au déclenchement d’un traitement. Avoir un maillage le plus fort possible est pertinent. »

S. S.

Le réseau des stations connectées gagne aussi le Sud-Drôme
Crédit Crieppam

Le réseau des stations connectées gagne aussi le Sud-Drôme

Depuis 2020, le centre régionalisé interprofessionnel d’expérimentation en plantes à parfum, aromatiques et médicinales (Crieppam) a initié la création d’un réseau météorologique en collaboration avec les lavandiculteurs, grâce à l’installation de stations météo connectées. En couplant ces données avec celles de différents opérateurs, notamment la coopérative du Nyonsais Vignolis, « ce réseau permet l’accès aux données de plus de 400 stations », indique le Crieppam. Pour les producteurs, iI est possible d’acheter la station météo à plusieurs au travers d’une coopérative ou d’une Cuma de distillation.