Vendredi 9 juin, la filière castanéicole a signé son deuxième plan régional. Pendant cinq ans, 4,6 millions d’euros seront dédiés au développement de la production de châtaignes en Ardèche et dans le Cantal.

Un plan régional pour la châtaigne
La signature a eu lieu à l’EARL de la Combe, à Silhac, au cœur de la châtaigneraie.

Une ressource économique fondamentale, un enjeu de souveraineté alimentaire, un réel héritage patrimonial... Lors de la signature du plan châtaigneraies traditionnelles 2023-2027, le vice-président régional en charge de l’agriculture, Fabrice Pannekoucke a salué « une filière qui coche toutes les cases ». Pour l’occasion, l’élu régional s’était déplacé à l’EARL de la Combe à Silhac, en Ardèche, le principal département français producteur de châtaignes (5000 tonnes par an dont 2000 en AOP).

Pourtant, le fruit emblématique ardéchois n’a pas toujours connu une telle dynamique. Ce n’est que depuis une quinzaine d’années, avec l’obtention de l’AOC en 2006, que la production de châtaignes a repris une place importante sur le territoire. « Ça a toujours été un à côté sur la ferme, mais depuis 10-15 ans la rentabilité de la châtaigne a vraiment augmenté », témoigne Yoann Courtial, à la tête de l’EARL de la Combe. Au sein de cette exploitation en polyculture-élevage (châtaignes, PPAM, bovins allaitants, poulets de chair), la castanéiculture, pratiquée depuis cinq générations, représente aujourd’hui une part non-négligeable du chiffre d’affaires (environ 20 %).

Dix ans de reconquête 

Pourtant, ce regain d'intérêt de la part des castanéiculteurs, n'a pas permis de répondre à la demande des quelque 6 entreprises de transformation et 7 metteurs en marché installés sur le territoire. Face à ce constat, les acteurs de la filière ont cherché des soutiens publics afin de rénover les châtaigneraies ardéchoises abandonnées. Après une phase d’expérimentation débutée en 2013, un premier plan de filière a été signé en 2017. Dix ans de reconquête qui ont permis de planter 6000 arbres, d'en remettre 30 000 en production, et d'augmenter la récolte en AOP d'environ 750 tonnes chaque année. « Maintenant, même les privés qui ne bénéficient pas des aides remettent leur châtaigneraie en état. Ça a créé un réel engouement ! », se félicite Daniel Vernol, ancien président du syndicat de défense de la Châtaigne d'Ardèche.

Et cette reconquête ne fait que commencer ! Alors que la balance commerciale de châtaignes est toujours déficitaire dans le pays, le potentiel de production peut encore largement être amélioré. C’est d'ailleurs l’objectif de ce nouveau plan. Au total, 4,6 millions d'euros vont être mobilisés au cours des cinq prochaines années autour de trois axes. Le principal reste, évidemment, la reconquête de la châtaigneraie avec des subventions pour l’élagage, le greffage, la plantation, les diagnostics ainsi que la création de pistes individuelles et collectives dans les massifs. Le deuxième axe de travail concerne l’ensemble de la filière, avec un travail autour de la gestion et de la promotion de l’AOP Châtaigne d'Ardèche. Un ancrage régional de la châtaigne est également envisagé en intégrant la marque « Ma Région, ses terroirs ».

Le défi climatique au cœur du plan

Enfin, la nouveauté concerne surtout le troisième axe de ce plan, avec une perspective d’adaptation au changement climatique. Pour répondre à ce défi climatique, plusieurs projets sont prévus, et notamment la création de deux vergers conservatoires, ainsi que le développement de porte-greffes tolérants à l’encre, à la sécheresse et compatibles avec les variétés sativa ardéchoises. Le parc à greffon et la pépinière développés seront aussi maintenus pour fournir du matériel végétal local et adapté. Enfin, un outil sera utilisé pour calculer avec précision le bilan carbone de chaque châtaigneraie, afin de diminuer les émissions et surtout de mettre en avant le rôle de cette production en matière de stockage du carbone.

Pauline De Deus

Dans le Cantal aussi, la châtaigne est emblématique

Le Cantal est également bénéficiaire du plan régional Châtaigneraies traditionnelles. Sur ce territoire, la châtaigne est un fruit traditionnel, progressivement délaissé au profit de l'élevage. Grâce au premier plan, une reconquête a pu être menée pour remettre des châtaigneraies en production (potentiel de production augmenté de 50 tonnes par an) et commencer à travailler sur l’aval de la filière. Deux premiers ateliers collectifs de transformation ont ouvert leurs portes l’année dernière. Désormais, la prochaine étape est la réalisation d’un état des lieux pour améliorer la connaissance de la castanéiculture cantalienne. « On est en train de passer à la vitesse supérieure », se réjouit Léa Dubois, conseillère de la filière châtaigne à la chambre d’agriculture du Cantal. Grâce à ce plan régional, le Cantal et l’Ardèche peuvent désormais travailler en réseau pour le développement de la filière à l'échelle locale et régionale.

Chiffre : 4,6 millions d'euros

C'est le montant de l'enveloppe dédiée au plan Châtaigneraies traditionnelles 2023-2027. Dont 1 685 000 € financés par la Région, 565 000 € par le Département de l'Ardèche, 100 000 € par le Cantal, 280 000 € pourraient être financés par l'Europe (encore incertain), ainsi qu’un financement propre de la filière de 1 970 000 €.

Brèves

Le plan booste l'AOP

En Ardèche, pour bénéficier du plan Châtaigneraies traditionnelles, l'AOP est obligatoire. Une condition qui a permis de dynamiser la filière avec 473 adhérents au syndicat de défense de la Châtaigne d'Ardèche en 2022. Ils étaient deux fois moins nombreux dix ans plus tôt.

Top départ pour la demande d'aide

Les producteurs qui voudraient faire une demande d'aide cette année sont invités à réaliser les diagnostics dès maintenant. En 2023, les délais de dépôt des dossiers risquent d'être très courts, d'où la nécessité d'anticiper. 

Une aire géographique agrandie ? 

Lundi 12 juin a eu lieu une première réunion avec l'Inao pour évoquer un potentiel agrandissement de l'aire géographique de l'AOP Châtaigne d'Ardèche. Les discussions sont en cours pour décider si l'AOP va chercher, ou non, à faire évoluer son territoire de référence. 

Yoann Courtial est la 5e génération de castanéiculteur sur ces terres escarpés à Silhac.