JEUNES BOVINS
L’efficience alimentaire, un défi pour l’avenir

Amandine Priolet
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JEUNES BOVINS / L’amélioration de l’efficience alimentaire chez les jeunes bovins est un enjeu essentiel dans les élevages de demain. Le programme de recherche Beef Alim 2020 vise à appréhender les déterminants nutritionnels et génétiques de l’efficience alimentaire des bovins viande en s’appuyant sur la compréhension des mécanismes biologiques.

L’efficience alimentaire, un défi pour l’avenir
L’amélioration de l’efficience alimentaire chez les jeunes bovins est un enjeu essentiel dans les élevages de demain.

Rapport entre la quantité de produits animaux issus de l’élevage et les ressources alimentaires utilisées pour les produire, l’efficience alimentaire chez les bovins a un rôle important à jouer. En effet, si l’élevage a comme premier objectif de nourrir les hommes en transformant les végétaux en produits consommables (viande, œufs, lait), le rendement de cette transformation par les animaux est généralement faible. Les productions animales sont donc au cœur des débats alors que la demande alimentaire mondiale est en constante évolution. « L’efficience alimentaire peut être un levier pour répondre à plusieurs problématiques, notamment économiques. Le coût alimentaire représente entre 25 et 30 % du coût de production, hors main-d’œuvre, pour un naisseur engraisseur », explique Clément Fossaert, chargé d’études dans le service Production de viande à l’Idele (Institut de l’élevage).

Au-delà de l’amélioration des revenus des éleveurs, l’efficience alimentaire apporte également des performances environnementales et sociétales : « cela permet non seulement de mieux valoriser les ressources alimentaires, mais aussi de réduire les émissions polluantes (gaz à effet de serre, azote, etc.) », poursuit-il. Si les animaux d’élevage consomment des aliments comestibles par l’homme (céréales), ils mangent aussi des produits végétaux qui ne le sont pas, comme les résidus de culture et les fourrages. Cet aspect présente donc un intérêt environnemental intéressant.

Six ans de recherche

En travaillant sur les déterminismes génétiques et nutritionnels, mais aussi économiques, le programme de recherche et développement Beef Alim 2020 vise ainsi à améliorer l’efficience alimentaire des jeunes bovins en engraissement. Initié en 2015, ce programme est encadré par l’Idele, en partenariat avec l’Inra, Allice et les chambres d’agriculture et financé par Apis-Gene et le Casdar (développement agricole et rural). L’étude a porté sur 600 bovins charolais, issus principalement de vingt-quatre taureaux et engraissés sur deux régimes contrastés, l’un à base de maïs, l’autre d’ensilage d’herbe.

L’un des axes de recherche permet d’observer si les animaux nourris avec une ration de maïs sont aussi efficients qu’avec une ration d’herbe. Après observation et relevés, ces rations semblent être comparables en termes de densité énergétique et protéique, « même si nous avons une densité énergétique un peu plus élevée pour le régime maïs (+ 0.03 UFV1/kg matière sèche) ». Cependant, les objectifs de qualité n’ont pas toujours été atteints avec l’ensilage d’herbe, avec une forte hétérogénéité, probablement causée par les conditions très humides au moment de la récolte. De manière générale, il s’avère que les animaux sont plus « performants » avec la ration maïs, avec une croissance plus forte et des durées d’engraissement plus courtes pour un même objectif de poids de carcasse. Mais les recherches ont permis de voir que les performances étaient également intéressantes avec la ration herbe, lorsque celle-ci est de bonne qualité. Les irrégularités dépendent donc des qualités des fourrages.

Vers une interaction génétique et régime ?

Par ailleurs, l’étude a permis de mettre en relation les effets génétiques selon le type de ration. On observe ainsi une meilleure efficience alimentaire des descendants sur le régime maïs, mais le classement diffère pour un certain nombre de cas. L’interaction génétique et régime, bien qu’elle doive encore être approfondie, ne laisse donc que très peu de place au doute. Les analyses génétiques ont permis de relever « une héritabilité modérée de l’efficience alimentaire et des corrélations génétiques fortes entre les jeunes bovins et leur père. Cela montre que la sélection sur l’efficience alimentaire est possible, quel que soit l’outil de phénotypage », souffle Laurent Griffon, chef du service Outils de gestion des populations à l’Idele. Pour autant, la précision des paramètres génétiques est encore insuffisante et reste à approfondir.

Globalement, le régime maïs démontre une meilleure efficience alimentaire brute. Une hypothèse qui doit toutefois être relativisée en vertu des performances escomptées et des nouvelles exigences environnementales et sociétales. De plus, au regard des variabilités, il existe un certain nombre de marges de manœuvre à prendre en compte pour améliorer l’efficience alimentaire des jeunes bovins à l’engraissement, en particulier par le biais d’un travail sur la qualité des fourrages récoltés et sur le potentiel génétique. Le programme de recherche se poursuit jusqu’en juin 2021, avec notamment l’étude des biomarqueurs de l’efficience alimentaire et la compréhension des mécanismes impliqués, ainsi que sur l’efficience alimentaire des femelles en lien avec la précocité.

Amandine Priolet

1. Unité fourragère viande.