FILIÈRE PORCINE
« La question n’est plus de savoir si nous allons être touchés par la PPA mais quand »

Pierre Garcia
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FILIÈRE PORCINE / En ce début d’automne, l’actualité autour de la filière porcine est dense : la peste porcine africaine progresse sur le front Est de l’Europe et le coronavirus continue d’impacter les échanges commerciaux. Le point avec Thierry Thenoz, président d’Interporc Rhône-Alpes.

« La question n’est plus de savoir si nous allons être touchés par la PPA mais quand »
Le dispositif d’aide doit permettre aux petits détenteurs de porcs, hors élevage conventionnel, de mettre en place des mesures de biosécurité.
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Thierry Thenoz. ©L’Ain Agricole

La pression de la peste porcine africaine s’accentue, avec des cas détectés en Allemagne. Qu’avons-nous à craindre ?

Thierry Thenoz : « Si on se place par rapport à la France et à l’Union européenne, la première inquiétude que nous avions jusqu’ici était le front belge qui s’était constitué il y a environ deux ans. Sur ce front, nous sommes aujourd’hui plutôt rassurés car il n’y a pas eu de cas positifs depuis longtemps et la Belgique pourrait revendiquer un statut indemne dans les mois qui viennent. Aujourd’hui, le plus gros sujet en Europe est la frontière entre la Pologne et l’Allemagne. Le 10 septembre, un cas a été retrouvé à 6 km de la frontière polonaise mais cette fois-ci côté allemand, dans le Land du Brandebourg, au Sud du pays. Depuis le 10 septembre, plus de quarante cas positifs ont été détectés. Bien sûr, ce ne sont pour le moment que des cas sur des animaux sauvages, mais la maladie progresse inexorablement. La question n’est plus de savoir si nous allons être touchés par la PPA mais quand, c’est pourquoi il est nécessaire de nous protéger. Il faut d’ailleurs rappeler que tout éleveur doit suivre une formation à la biosécurité afin de définir un plan sur son exploitation et protéger son cheptel de tout contact avec des animaux sauvages. »

Où en est le dispositif régional d’aide aux éleveurs pour la mise en place de mesures de biosécurité ?

T.T. : « Le dispositif régional d’aide aux éleveurs est entré en vigueur au printemps 2020 et concerne environ 1 600 sites. Il devait initialement s’achever à la fin de l’année, mais nous souhaitons tout faire pour le prolonger en 2021. Ce dispositif comprend une aide de 1 000 e allouée par la Région, qui peut être doublée par les Départements, soit 2 000 e au total. Ce dispositif s’applique aux investissements de 5 à 10 000 e, des montants que l’on atteint rapidement lorsqu’on parle d’investissements pour la biosécurité. Lors des discussions, il a été décidé de viser très large pour permettre à tout le monde d’avoir accès aux aides. Notre objectif, c’est surtout de permettre aux petits détenteurs de porcs, en dehors de l’élevage conventionnel, de mettre en place des mesures de biosécurité. Celles-ci sont vues au sens large du terme, puisque même des bottes ou des lances à haute pression sont considérées comme des mesures de biosécurité. La procédure est simple : l’éleveur envoie par Internet à la Région la copie de son devis d’investissement, son attestation de formation à la biosécurité et un RIB. Dès que le dossier est enregistré et validé, ce qui prend en moyenne 48 à 72 h, l’éleveur est informé et peut déjà enclencher les travaux. »

Quelle est aujourd’hui la conjoncture pour la filière porcine, confrontée à la fois à la PPA et au coronavirus ?

T.T. : « La situation est plutôt satisfaisante, nous avons de la fluidité dans les enlèvements et nous ne connaissons aucun problème de stocks en élevage. Nous sommes aujourd’hui à 1,36 e au cadran soit une chute d’environ 15 cts. Malgré tout, nous ressentons aujourd’hui une pression assez forte en lien avec la peste porcine africaine. Depuis l’annonce de cas positifs en Allemagne, leurs prix ont dévissé et les marchés se sont fermés. La conséquence a été rapide pour nous avec une pression très forte de la viande allemande sur le marché français. Nous gardons d’ailleurs un oeil attentif sur l’accord post-Brexit qui doit être trouvé entre l’Union européenne et le Royaume-Uni et qui pourrait permettre aux Britanniques d’aspirer une partie de la production allemande. Le coronavirus n’a pas arrangé les choses en matière d’exportations mondiales et les Etats-Unis continuent toujours de faire pression sur le marché chinois pour écouler leurs produits à bas prix. »

Pierre Garcia