GDS
« Le changement climatique pèse lourdement sur les abeilles »

La section apicole du groupement de défense sanitaire (GDS) de l'Ardèche tenait son assemblée générale samedi 11 mars. Très vulnérable face au changement climatique, la filière apicole tire la sonnette d'alarme. Étienne Bruneau, ingénieur agronome et président de l'association Cari est intervenu. Entretien.

« Le changement climatique pèse lourdement sur les abeilles »
L'emplacement, l'isolation et la ventilation des ruches sont essentiels pour favoriser la résistance des colonies aux fortes chaleurs.

Quels sont les effet du changement climatique sur les abeilles ?

Étienne Bruneau : « Le cycle des abeilles dépend complètement des fleurs et des cycles de floraison. Or, avec des sécheresses de plus en plus intenses, des vagues de chaleurs extrêmes et autres aléas, on observe des floraisons plus précoces, et les cycles de floraison sont totalement perturbés. De ce fait, les cycles naturels des abeilles sont eux-aussi chamboulés. Si elles ont une capacité de résilience, les colonies se retrouvent fortement impactés. Cette année, de juin à septembre, elles n'avaient plus rien à manger. Cela chamboule aussi les séquences "ordinaires" de l'apiculteurs et les tâches saisonnières que l'on connaissait sont totalement bouleversées. » 

Quel impact sur la production de miel ?

E.B. : « Elle est très impactée. Les sécheresses et chaleurs extrêmes amènent à des floraisons précoces, à un moment où les colonnies ne sont pas encore prêtes. On observe aussi de gros déficit de pollen, et donc de nectar. Les abeilles sont aussi très affaiblies par le manque de nourriture et les colonies ont du mal à se refaire après l'été, avec des impacts sur l'hivernage. Avec les floraisons précoces, on a aussi plus de risques de gel sur certaines espèces comme le robinier ou certains fruitiers, avec des bourgeons qui gèlent et donc un impact sur certaines miellées. »

Et sur l'aspect sanitaire ?

E.B.: « On a de plus en plus de mal à maîtriser le varroa, fléau numéro un de l'abeille. Avec des températures plus douces en hiver, il se reproduit désormais toute l'année et on n'a plus de rupture de ponte. Cela rend aussi les traitements moins efficaces: aujourd'hui, 60 % des varroas ne sont plus touchés traitements. »

Que peuvent faire les apiculteurs ?

E.B. :  « Sur le terrain au quotidien, il faut prendre en compte ces changements : mettre à disposition de l'eau de qualité l'été, car les abeilles en ont besoin et les sources l'eau, très réduites, sont souvent polluées. Veillez également à isoler au maximum les ruches, à les placer à l'ombre. Les apiculteurs ont aussi tout intérêt à diversifier leur gamme de produit, en faisant des produits moins liés à la flore que le miel: propolis, gelée royale... Et si il est d'usage de dire qu'il faut homogénéiser au maximum les colonnies, je conseille au contraire de varier les espèces pour avoir une plus grande diversité biologique au sein du cheptel et donc de meilleures résistances aux aléas climatiques. Sur le moyen et le long terme, il nous faudra mettre en oeuvre des programmes de sélections pour trouver des abeilles plus résistantes à la chaleur et au sec. Il faut surtout prendre à bras le corps ce changement climatique et tout faire pour le freiner. »

Propos recueillis par Mylène Coste