VIGNES EN COTEAUX
Traitement par drones : quel bilan tirer de l’expérimentation ?

Mylène Coste
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Elle touche à sa fin. Lancée il y a trois ans, une expérimentation de traitements par drone dans les vignes de fortes pentes a été conduite par la Chambre d’agriculture, en lien avec des agriculteurs du groupe Dephy des côtes-du-rhône septentrionales. Bilan avec Sophie Buléon, technicienne à la Chambre d’agriculture.

Des essais ont été conduits en Nord Ardèche, ici dans le vignoble de Cornas
Des essais ont été conduits en Nord Ardèche, ici dans le vignoble de Cornas

Quels éléments ont été évalués dans le cadre de cette expérimentation ?

Sophie Buléon : « L’objectif était de comparer sur la base de données chiffrées les différences entre traitement par drone et à dos d’homme, sur quatre grandes thématiques : la pénibilité, l’exposition aux produits, l’efficacité biologique et le temps de traitement. Sur chaque parcelle concernée par l’expérimentation, nous avons testé une application par pulvérisateur à dos et une application par drone, les mêmes jours et dans les même conditions. »

Quels sont les résultats sur le volet pénibilité ?

S.B. : « Les essais ont été conduits avec la MSA, qui a effectué un suivi de l’activité cardiaque lors du traitement à dos puis par drone. Sans surprise, le traitement a dos a été qualifié de « travail intense » par la MSA, avec parfois des phases excessives. C’est beaucoup moins le cas avec le traitement par drone, qui malgré tout sollicite également l’activité cardiaque. En termes de pénibilité, le traitement par drone a donc un véritable intérêt. »

Et concernant l’exposition aux produits phytosanitaires ?

S.B. : « Pour réaliser les essais, nous avons réalisé un traitement à blanc avec un colorant, d’abord avec pulvé à dos puis avec le drone. Le vigneron et le droniste portaient une combinaison, qui a ensuite été étudiée par un laboratoire pour quantifier l’exposition lors de quatre phases : la préparation de la bouillie, le remplissage, le traitement et le nettoyage. Les résultats montrent qu’il n’y a pas de différence significative durant la préparation et le nettoyage. Toutefois, le droniste est six fois moins exposé. Enfin, on a retrouvé 300 fois plus de résidus sur la combinaison du vigneron lors du passage à dos, dans la phase de traitement. »

Qu’en est-il de l’efficacité des traitements ?

S.B. : « Les essais ont été réalisés en 2021, une année qui a été compliquée pour la vigne. On a observé l’impact des deux modes de traitement sur différentes maladies à des étapes clés. Sur les parcelles de l’expérimentation, nous n’avons pas observé de différences significatives entre pulvérisation à dos et par drone en matière d’efficacité. Toutefois, dans d’autres régions où ont eu lieu des essais, on observe une moindre efficacité des traitements par drone, notamment sur la partie inférieure de la vigne. On pourrait donc suggérer de poursuivre les passages à dos dans les phases les plus critiques. »

Concernant le temps de travail ?

S.B. : « Dans le cas de la pulvérisation à dos, le temps de traitement est évalué entre 4 et 6h / ha pour un vigneron. Dans le cas du drone, il est réduit à 1 à 2h/ha, avec un réservoir de 10 litres. Ce temps pourrait encore être réduit avec des cuves de capacité plus importante. »

Propos recueillis par Mylène Coste

Le drone représente une alternative au pulvérisateur à dos, diminuant la pénibilité des traitements
Le drone représente une alternative au pulvérisateur à dos, diminuant la pénibilité des traitements

Expérimentation : et après ?

Les résultats de l’expérimentation sont désormais entre les mains de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire). Celle-ci a plusieurs options : prolonger l’interdiction de l’épandage par drone dans les vignes de fortes pentes, l’autoriser, ou demander des essais complémentaires. 

Pour l’heure l’épandage par drone reste strictement interdit en France. Permis par la loi Egalim à titre expérimental, pour une durée de trois ans, des essais ont également été conduits en Alsace et en Champagne. 

En théorie, l’Anses doit se prononcer au 1er semestre 2022… qui se termine bientôt.