VITICULTURE / INSTALLATION
Au Mas de Bagnols : une transmission en douceur

À l'occasion d'un évènement dédié à la transmission agricole, Pierre Mollier et Louis de Moerloose ont présenté leur expérience. Récit d'une passation réussie.

Au Mas de Bagnols : une transmission en douceur
Mardi 8 novembre, les communautés de communes Bassin d'Aubenas et Val de Ligne, en partenariat avec l'Addear et la chambre d'agriculture de l'Ardèche ont organisé un après-midi dédié à la transmission agricole. La vingtaine de participants a été accueillie au caveau du Mas de Bagnols, où Louis de Moerloose et Pierre Mollier ont présenté leur expérience.

Louis de Moerloose et Pierre Mollier se sont rencontrés au bon moment de leur vie. Pierre, vigneron en fin de carrière avait fondé le caveau, sur son vignoble de 6 hectares, en 2002. Il cherchait à transmettre son exploitation depuis plusieurs années, en vain. C'était en 2017. Alors âgé de 31 ans, Louis se présente spontanément au Mas de Bagnols. Il a entendu dire, lors d'une formation que le gérant cherche un repreneur.

À Vinezac, la cave située le long de la départementale 104 est loin des châteaux dont Louis rêvait en quittant sa Belgique natale, deux ans auparavant. Mais après plusieurs projets avortés, le jeune vigneron est cette fois prêt à faire des compromis. « Le modèle qu'on avait imaginé avec ma compagne était trop obtus. Ce n'était pas réalisable, reconnait-il. Pour une reprise et une installation en général, il faut se laisser porter par le hasard. C'est aussi une question de chance. »

Un an de travail main dans la main

Côté cédant, la première impression est la bonne. Après avoir vu plusieurs candidats sans que le projet n'aille au bout, Pierre sent qu'avec Louis, « il y a quelque chose », témoigne-t-il. Le rendez-vous est donné dès la semaine suivante et dans la foulée les conditions de reprise sont mises sur la table. « Pierre m'a proposé que l'on travaille ensemble pendant un an, explique le jeune vigneron. En 2017, j'ai vendangé avec Pierre et ensuite on travaillait déjà pour ma première récolte. »

Petit à petit, Pierre se retire, s'occupant davantage de la commercialisation pendant que Louis apprend à connaître et à travailler la terre du domaine. « Pierre me disait : il faudrait que tu fasses ci, ça... Au début ça me faisait un peu râler mais en fait j'étais déjà en train de travailler pour ma propre récolte ! » Aidé par la météo, le travail aura payé avec un très beau millésime 2018 qui permet à Louis de vivre de la production du domaine dès sa première année d'installation.

15 années de gagnées

Quatre ans après sa reprise, Louis ne regrette pas d'avoir saisi sa chance au Mas de Bagnols. « Je n'avais pas du tout imaginé les chose comme ça, reconnait-il. Mais assez rapidement j'ai compris que l'objectif c'était de faire du bon vin et d'avoir une production assez régulière. » Et pour ça, il a pu compter sur les conseils de Pierre.

Car cette exploitation est dans la famille de Pierre Mollier depuis plusieurs générations. Ses parents et grands-parents avant eux, avaient des vignes, mais aussi des oliviers, des mûriers ou encore des chèvres. L'expérience a aussi pu bénéficier à Louis de Moerloose, grâce à cette transmission en douceur.  « C'est gigantesque d'avoir accès à toute ces connaissances ancestrales », se réjouit Louis, reconnaissant.

Le jeune vigneron a aussi pu compter sur le matériel acquis avec le domaine et surtout sur les circuits de vente déjà développés. « Ce qui est génial dans cette entreprise c'est que tout existait », ajoute-t-il avant de conclure : « J'ai bénéficié de tout le travail passé... J'ai gagné 15 ans ! C'est une chance énorme. »

Pauline De Deus

Le bonheur est dans le vignoble
Au Mas de Bagnols, Louis de Moerloose produit 30 à 40 000 bouteilles chaque année, dont la moitié est vendue directement au caveau.
PORTRAIT

Le bonheur est dans le vignoble

Pendant plusieurs années, Louis de Moerloose a cherché un métier qui le comblerait. Aujourd'hui, à Vinezac, le vigneron indépendant s'épanouit dans son domaine ardéchois et il ne voit plus le temps passé !

Professeur de science, contrôleur de médicaments, importateur de crustacés... En Belgique, Louis de Moerloose s'est essayé à de nombreux métiers avant de trouver sa voie. « J'aime la nature et le vivant depuis toujours, surtout la flore et la production végétale », explique-t-il. Ses études d'agronomie l'amènent vers un milieu scientifique : « J'avais envie de travailler dans l'agriculture mais les offres c'était plutôt des choses très techniques en laboratoire... Rien qui ne m'excitait vraiment. »

En 2015, à l'âge de 29 ans, lui et sa compagne décident de venir s'installer en Ardèche. « Olivier de Bournet, chez qui j'avais fait un stage au début du mes études, m'a proposé de venir travailler sur son domaine à Grospierres », se souvient-il. Il saute sur l'opportunité sans vraiment savoir ce qui l'attend. Travail de la terre, des raisins, commercialisation... Il touche à tout et se rend vite compte que c'est ce qu'il aime : produire du vin de A à Z. « C'est ce qui m'amuse, assure-t-il. Et je trouve qu'il y a peu d'autres métiers où on va aussi loin. »

Ces deux années à Grospierres lui permettent de mûrir son idée avant de chercher à s'installer. Près des Vans, un premier projet tombe à l'eau. Puis il entend parler du Mas de Bagnols à Vinezac, c'est là que tout se précipite : « J'ai toujours voulu me lancer mais c'est l'opportunité de la rencontre avec Pierre qui a accéléré les choses. »

Changer sans oublier le passé

Aujourd'hui, il entretient toujours de très bons rapports avec l'ancien vigneron, qui passe le voir tous les jours. Si le domaine est resté le même, Louis a peu à peu apporté ses propres changements. Le plus important, le passage en bio « même si dans les faits, on en était déjà pas loin », précise Louis. Dans la foulée, les vendanges manuelles ont aussi fait leur apparition sur le domaine. Visuellement aussi, Louis s'est approprié le lieu : nouvelle façade, quelques modifications en termes de communication... Des touches personnelles, sans pour autant faire table rase du passé.

À 36 ans, c'est finalement dans les vignobles ardéchois que le Belge a trouvé son bonheur. Et quand on lui demande si vigneron, c'est pour la vie ? Il répond, hésitant : « Je ne sais pas... Mais c'est vrai que ça fait déjà 5 ans. Ça passe tellement vite qu'à mon avis, oui, ça sera pour toute ma vie. En tout cas je me vois vigneron longtemps ! »

PDD