MARAÎCHAGE
Le réchauffement climatique change les pratiques

Mylène Coste
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MARAÎCHAGE / Plusieurs maraîchers se sont retrouvés le 28 janvier à Aubenas et Tournon pour faire un bilan de la saison 2020. Dominique Berry, référent en maraîchage bio des Chambres d’agriculture Auvergne Rhône-Alpes, était présent lors de cette rencontre organisée par la Chambre d'agriculture de l'Ardèche.

Le réchauffement climatique change les pratiques
Plusieurs producteurs ont constaté un arrêt soudain des productions de tomates ou encore aubergines au cours de l'été .

Cette année encore, la saison maraîchère a été marquée par les fortes chaleurs de l'été, qui n'ont pas été sans conséquence sur la production. Nombre de producteurs ont en effet relaté un arrêt soudain des productions de tomates ou encore aubergines au cours de l'été (fin juillet, début août), malgré, bien souvent, une forte productivité en début de saison. « Cela pourrait s'expliquer par les conditions climatiques caniculaires, qui ont pu provoquer des blocages des plantes et des phénomènes de coulure, analyse Dominique Berry, conseiller spécialisé en maraîchage biologique à la Chambre d’agriculture du Rhône et référent technique régional. Ce stress a pu engendrer un regroupement des floraisons et de la production en début d'été. » Des phénomènes de blocage ont également été observés sur les salades. Pour éviter ces phénomènes, le blanchiment des abris à la peinture acrylique, l’argile, ou avec des filets d'ombrage est vivement recommandé, bien que parfois insuffisant.

Contre les acariens sur tomate, Macrolophus s'avère plus efficace qu'aucune autre technique pour une maraîchère. Si la technique est onéreuse, un lâcher peut parfois suffire, même si la technique n’est pas infaillible, comme toujours avec les lâchers d’auxiliaires.

Certains maraîchers ont par ailleurs connu des problèmes de champignons, comme la verticilliose. « Cette maladie cryptogamique se transmet par les vaisseaux des plantes qui brunissent, explique Dominique Berry. Elle engendre un jaunissement des feuilles qui finissent par se dessécher, et peut causer un dessèchement de la plante. » Il existe plusieurs variétés de tomates résistantes à la verticilliose, ainsi que des porte-greffes résistants en aubergines.

Raccourcir le cycle des choux ?

Cette année, on observe également une grosse pression de punaises sur les crucifères (chou, radis noir, rave), mais également des blocages de croissance sous l'effet des fortes chaleurs. Pour faire face, plusieurs producteurs ont adapté leurs pratiques en plantant le chou plus tardivement pour éviter le stress lié aux fortes chaleurs de l'été. « Plutôt que de planter les crucifères en début d'été, on peut repousser la plantation vers la fin juillet voire le mois d'août, affirme Dominique Berry. Mieux vaut un cycle court réussi qu'un cycle long avec une croissance bloquée par le stress hydrique / climatique. Dans ce cas, attention à bien choisir des variétés à cycle court. »

De nouvelles espèces de taupins

Des dégâts de taupins ont également été remarqués cette année. Une nouvelle espèce – au cycle de reproduction plus court – pourraient en être à l'origine. La lutte contre ce ravageur n’est pas simple : « Le tourteau de ricin peut avoir un intérêt mais à forte dose (5 à 6 t/ha), et concentré sur le rang au moment de la plantation. Attention toutefois, c'est aussi un engrais », signale Dominique Berry. Le plus efficace reste la lutte mécanique avec des binages durant les périodes de remontée des larves vers le sol, au printemps et en début d'automne (sols chauds et humides). « Aujourd'hui, on ne sait pas intervenir sur les taupins adultes, mais on sait que l'accouplement se fait dans des parcelles où la végétation est verte et dense, de la mi-juin à la fin juillet : implanter tardivement ou détruire ces couverts végétaux peut ainsi avoir un effet pour réduire les populations. »

M.C.

Nourrir les sols, un exercice d'équilibriste
Pour bien nourrir ses sols, il faut trouver les apports les plus adaptés et les doses appropriées.

Nourrir les sols, un exercice d'équilibriste

FERTILISATION / Améliorer la fertilité des sols demande des apports de matière organique (MO) bien pensés. 

Pour bien nourrir ses sols, il faut trouver les apports les plus adaptés et les doses appropriées. « Un fort taux de matière organique dans les sols ne garantit pas forcément que cette MO soit facilement et immédiatement assimilable par les bactéries, souligne Dominique Berry. Inversement, nourrir la vie bactérienne ne suffit pas : il faut aussi apporter de quoi nourrir la structure des sols. » En effet, la matière organique peut se décliner en deux catégories : d'un côté, la MO « libre » (fumiers frais, engrais verts) immédiatement disponible, riche en azote et micro-organismes, qui favorise l'activité biologique et bactérienne des sols. De l'autre, la MO « stable » (broyat d'engrais verts, déchets verts compostées) riche en minéraux et en calcium, qui favorise la rétention d'eau, la structure des sols et relève le pH. « Il faut trouver un équilibre entre les deux, en diversifiant les apports selon les caractéristiques de nos sols », insiste Dominique Berry.

OIGNONS / « Une catastrophe sur les bulbilles »

Plusieurs producteurs ont rencontré d’importants  problèmes de conservation en oignons et échalotes. Cette problématique semble globale à l'échelle de la région : « 2020 a été une catastrophe pour les cultures issues de bulbilles avec, probablement, un problème de qualité des bulbilles puisque les problèmes étaient bien moindre sur les cultures semées », souligne en effet Dominique Berry.

Un séchage réussi dépend notamment de deux éléments : le mode de séchage et le stade de récolte. « Si l'on est équipé d'un système de séchage dynamique, on peut récolter l'oignon lorsqu'il est couché et avec encore 3 ou 4 feuilles vertes. Sinon, on doit attendre un peu plus, jusqu'à ce que l'oignon n'ait plus qu'une feuille verte, mais il ne faut pas trop attendre non plus. On laisse alors sécher au sol une demi-journée au champ, puis en intérieur ventilé. » Une fois séché, il convient de le conserver au froid (0°C) ou en bâtiment ventilé.