AGRICULTURE BIOLOGIQUE
« Vous avez un projet en agriculture bio ? »

La décision de « sauter le pas » en agriculture biologique ne se fait pas du jour au lendemain. C’est le résultat d’un parcours personnel en réponse à différents facteurs (économique, environnemental, éthique, santé, technique) et jalonné d’étapes. Une fois certifié en bio, le système est en constante évolution pour s’adapter aux contraintes techniques ou développer de nouveaux débouchés. Rencontre avec Grégoire Clozeau et Nadir Mayou, installés en maraîchage bio, poules pondeuses et apiculture à Vernoux-en-Vivarais.

« Vous avez un projet en agriculture bio ? »
Grégoire Clozeau et Nadir Mayou du Gaec des Abeilles paysannes se sont installés en agriculture biologique. Ils disposent de 4 000 m2 de maraîchage, 23 ruches et un élevage de 249 poules pondeuses.

Originaires de Saint-Ferréol (Haute Loire) et installés depuis avril 2020 à Vernoux-en-Vivarais, Grégoire Clozeau et Nadir Mayou avaient envie de « donner du sens » à leur pratiques et ont fait le choix du bio ! Ils se sont lancés en maraîchage bio, poules pondeuses et apiculture, en créant le Gaec des Abeilles paysannes. « Aujourd’hui, les produits bio sont les plus recherchés par la clientèle. C’est la meilleure manière de valoriser sa production, estime Grégoire Clozeau. Le bio permet aussi de travailler en local, sur de plus petits volumes de production et de petites surfaces, donc d’être plus accessible. C’est aussi une manière de participer à la cohérence durable d’un territoire rural, à son économie et donner la possibilité de se nourrir avec des produits frais et locaux. »

Renforcer la viabilité de son projet

Le Gaec des Abeilles paysannes dispose de 4 000 m2 de maraîchage, 23 ruches et un élevage de 249 poules pondeuses fraîchement arrivées sur l’exploitation. Pour leur installation, Grégoire Clozeau et Nadir Mayou sont passés par le Point accueil installation (PAI) de la Chambre d’agriculture de l’Ardèche « afin de construire notre projet et connaître les acteurs agricoles locaux qui nous étaient inconnus jusqu’ici », puis par un plan de professionnalisation personnalisé (PPP) avec un conseiller projet et un conseiller compétences. « Nous avons appris beaucoup de choses très utiles pour se former et combler nos lacunes, solliciter des aides liées au bio, définir un budget prévisionnel, nous mettre en relation avec des fournisseurs… Tout cela nous a apporté un vrai support pour renforcer notre projet et nous rassurer sur sa viabilité », indique Nadir Mayou.

« Anticiper, savoir réagir assez tôt et au cas par cas »

Ils pratiquent le maraîchage sur sol vivant, qui « nécessite beaucoup moins de matériel qu’en conventionnel mais exige d’anticiper tout ce que l’on fait ». Travailler en bio, « c’est un boulot à plein temps », affirme Grégoire Clozeau. « Il faut être motivé et multi-casquettes. Je pense que ce n’est pas forcément plus compliqué que le conventionnel, mais il y a beaucoup de travail à effectuer et il faut être très vigilant. On doit toujours garder un œil sur la croissance et les phases de production de sa culture, anticiper, savoir réagir assez tôt et au cas par cas. Les formations de la Chambre restent un bon moyen d’apprendre et de se tenir au courant. » Ils ont également rejoint un groupe WhatsApp qui permet aux maraîchers et aux techniciens Chambre d’échanger en temps réels sur les problématiques rencontrées sur les cultures. « C’est très pratique ! Dès qu’on a un souci technique, de maladie, de pression exercée par des ravageurs, ou que l’on souhaite connaître les tendances des prix, on y trouve rapidement des réponses et de bons conseils. »

Être accompagné pour « éviter de belles bêtises »

Durant leur première année de production, ils ont été accompagnés par un technicien Chambre afin de suivre le développement de leurs cultures. « Cette expertise nous a permis d’éviter de belles bêtises », constate Nadir Mayou. Analyses d’amendements organiques, informations sur l’irrigation, observations de terrain… « Cela nous a donné un peu plus de sensibilité sur les problèmes que l’on rencontrait ou que l’on ne voyait pas, ainsi que des réponses et des points de vigilance. En maraîchage, nous avons tardé à tailler nos plants de tomate par exemple et nous avions une maladie qui commençait à se développer sur nos aubergines. Nous avons été immédiatement prévenus des conséquences pour la production à venir et des traitements à effectuer. » Ce suivi les a aussi « réconforté sur le fait qu’il y avait des solutions ! »

Leur parcours de certification en bio se poursuivra pendant deux ans. Cette année 2020 leur a offert « plein de promesses », se réjouissent les jeunes installés. « C’est un bon départ et 2021 se présente bien ! Nous nous organisons pour être plus en avance que l’an passé sur nos cultures et se rapprocher davantage des restaurateurs locaux. » Pour l’heure, ils vendent en direct leurs productions sur les marchés de Vernoux-en-Vivarais et du Chambon-sur-Lignon, ainsi qu’au magasin « La Ruche qui dit Oui ! » au Pertuis. 

Anaïs Lévêque

CHIFFRES CLÉS

La bio en Ardèche

·         938 exploitations en bio ou conversion soit 20 % des exploitations pour 23 % de la SAU. Les estimations réalisées en février 2020 annoncent un total de 1 000 producteurs en bio ou en reconversion.

·         + 8 % d’installation ou de conversion en bio en 2019, représentant 69 agriculteurs.

·         56 % des installations accompagnées par la Chambre en 2019 étaient en bio.

·         Filière la plus dynamique : viticulture.

… et en Auvergne Rhône-Alpes

·         3ème région française en agriculture biologique.

·         6581 exploitations en bio (+ 12,3 % en 2019).

·         274 094 hectares bio et conversion (+ 9,2 % en 2019).

·         10 % de la SAU en bio.

·         3 108 opérateurs aval bio (1er rang français).

Source : Agence Bio 2019.

« Il faut mesurer d'où on part et où on veut arriver »
Rémy Fabre.

« Il faut mesurer d'où on part et où on veut arriver »

Questions à / Rémy Fabre, élu à la Chambre d'agriculture de l'Ardèche et référent sur l'agriculture biologique (AB).

En Ardèche, 20 % des exploitations sont en bio (+8% depuis 2019). Quelles perspectives laisse augurer cette dynamique ?

Rémy Fabre : « C'est extrêmement positif pour le département. Aujourd'hui, le bio est une production qui possède un marché, qui est adaptée à notre territoire, nos modes de production, nos dimensions d'exploitation… Nous avons des filières qui s'organisent de plus en plus, il y a vraiment une carte à jouer et des marges de progression encore ! Même pour les productions qui ne sont consommées en Ardèche, la bio permet d'apporter de la valeur ajoutée. »

Comment la Chambre d'agriculture accompagne-t-elle les projets en AB ?

R.F. : « Des moyens d’accompagnement, en particulier sur l'aspect technique, sont proposés et ont été largement renforcés ces dernières années. Cette offre de services sur l’aspect technique est très importante car le développement de la bio passe par la mise à disposition d’appuis techniques aux producteurs afin de les rassurer rapidement au moment de leur conversion ou de leur installation, de les aider à anticiper et appréhender les enjeux.

Sur la partie « filières, organisation et développement », le marché de la filière végétale est très porteur donc les producteurs ne sollicitent pas trop la Chambre pour les accompagner. En revanche, il y a d'autres filières qui rencontrent des soucis de valorisation, en particulier sur la viande. Nous sommes présents au niveau local pour les accompagner mais au-delà de la vente directe, ce type de filières demandent surtout une organisation régionale voire nationale. Les Chambres y travaillent mais c’est un travail de fond qui prend du temps. »

Quelle est la première étape pour convertir son exploitation en bio ?

R.F. : « La première étape est de mesurer d'où on part et où on veut arriver. Certaines personnes sont très proches de la bio et ont juste un frein psychologique au fait de se certifier. Pour d'autres, la marche est bien plus haute et il vaut mieux prendre le temps de faire évoluer progressivement ses pratiques, même si cela prend deux à trois ans. La Chambre propose une Rencontre info bio qui permet de faire un état des lieux de ses pratiques et savoir comment respecter le cahier des charges de la bio. Il est important aussi d’évaluer l'aspect du marché, le changement de mode de commercialisation que pourrait impliquer une conversion. Bien anticiper et bien se préparer sont la base de la réussite. »

Pour les agriculteurs déjà installés en bio, quels services peuvent-ils trouver à la Chambre ?

R.F. : « Ils peuvent y trouver un appui technique pour résoudre des soucis qui se posent dans leur ferme, optimiser leurs pratiques, gagner en productivité ou avoir une vue d'ensemble sur le développement de l'exploitation. Cet appui technique peut être individuel mais aussi collectif : des journées techniques grand public ou des appuis de groupe qui permettent de bien progresser grâce aux échanges entre agriculteurs et la présence d’un technicien Chambre pour recentrer, argumenter, expliquer, etc. Ces formes d'accompagnement sont fortement soutenues par la Région Auvergne Rhône-Alpes donc proposées à un coût réduit.

Pour les maraîchers, nous avons également créé un groupe WhatsApp avec le technicien AB de la Chambre, Renaud Pradon, pour résoudre rapidement des problèmes rencontrés sur leurs cultures et aussi parfois s’organiser collectivement entre maraîchers ou avec l’appui de techniciens Chambre. »

Propos recueillis par A.L.

Le réseau des Chambres d’agriculture, acteur de la bio, s’implique dans le développement d’une agriculture biologique rentable et créatrice d’emplois. Contactez votre conseiller Agriculture biologique pour vous accompagner dans votre projet : Renaud Pradon de la Chambre de l’Ardèche au 04 75 20 28 00 ou par mail : [email protected]

CHOISIR LE BIO / Les principales motivations des producteurs

·         Respect de l'environnement, de la santé ou du bien-être animal.

·         Recherche de meilleurs prix/débouchés/marge.

·         Défi technique, envie d’innover.

·         Demande des acheteurs/consommateurs.

·         Meilleure reconnaissance de la société.

·         Valider des pratiques déjà similaires par un label.

·         Recherche d’autonomie.

Source : enquête FRAB AuRA (Fédération régionale de l'agriculture biologique d'Auvergne Rhône-Alpes).