GESTION DES ADVENTICES EN LAVANDERAIES
Des couverts végétaux allélopathiques pour moins d’adventices

Amandine Priolet
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GESTION DES ADVENTICES EN LAVANDERAIES / Dernièrement, le Crieppam s’est penché sur l’évaluation des effets allélopathiques de certains couverts végétaux, dans un objectif de maîtrise des adventices dans les inter-rangs en lavandiculture.

Des couverts végétaux allélopathiques pour moins d’adventices
Le choix des couverts s’est basé sur le pouvoir allélopathique des plantes, c’est-à-dire leur facilité à produire une ou plusieurs substances biochimiques qui influencent la germination, la croissance, la survie et la reproduction d’autres organismes.

Alors que les productions de plantes à parfum aromatiques et médicinales (Ppam) ne cessent de se développer, le centre régionalisé interprofessionnel d’expérimentation en plantes à parfum, aromatiques et médicinales (Crieppam) a présenté, le 12 mai sous forme de webinaire1, les résultats de son dernier essai. Celui-ci, débuté en septembre dernier, visait à évaluer différentes espèces de plantes allélopathiques sur une parcelle de lavandin appartenant à Denis Vernet (Gaec des Fabres), sur la commune de Montagnac-Montpezat (04). Il a été réalisé avec le concours financier du Cihef2.

Après plantation en janvier 2019, cette parcelle a accueilli un couvert de triticale détruit au broyeur en août 2019. Les différentes espèces de couverts inter-rangs ont ensuite été semées le 16 septembre. Le choix des couverts s’est basé sur le pouvoir allélopathique de celles-ci, c’est-à-dire leur facilité à produire une ou plusieurs substances biochimiques qui influencent la germination, la croissance, la survie et la reproduction d’autres organismes.

Huit espèces testées

« Nous avons sélectionné des espèces qui ont déjà prouvé, dans des essais autres, des effets allélopathiques », explique Thomas Costes, ingénieur d’études au Crieppam. Huit espèces ont ainsi été testées, à savoir la crotalaire, le sarrasin, le fenugrec, la phacélie, la moutarde brune, le nyger, l’aneth et le chia. « Le but de notre expérimentation était de déterminer la capacité du couvert végétal à concurrencer et, donc, maîtriser les adventices, poursuit-il. C’est seulement une fois la destruction du couvert réalisée que l’on peut définir l’effet allélopathique de la plante. » La destruction mécanique de ce couvert a été effectuée en février 2020. En amont, le producteur avait épandu 30 tonnes par hectare (ha) de compost de paille de lavandin distillée de 2018.

Plusieurs indicateurs de suivi ont permis d’évaluer la pertinence de chacune des espèces testées : le pourcentage de recouvrement et le dénombrement de plants de chaque espèce dans un premier temps, puis le prélèvement de la biomasse.

À la recherche de propriétés toxiques

Lors de l’expérimentation, il s’est avéré que seule une partie des espèces semées a levé, le nyger, l’aneth et le chia n’étant pas sortis de terre. Les premières observations ont fait ressortir une forte présence de ray-grass sur toute la parcelle, le séneçon apparaissant comme la deuxième espèce adventice persistante même dans les témoins en sol nu et biné. Selon les premiers résultats, les couverts n’ont visuellement pas généré beaucoup de biomasse. C’est le cas notamment du fenugrec et du sarrasin. A contrario, la moutarde et la phacélie ont constitué de fortes biomasses leur permettant de dominer le recouvrement dans les inter-rangs et de diminuer la quantité d’adventices même après destruction du couvert. Ces deux couverts ont donc montré des effets allélopathiques intéressants. Par ailleurs, la crotalaire a gelé et n’apparaît donc pas dans les résultats. « En revanche, la biomasse d’adventices dans cette modalité reste inférieure au témoin adjacent en sol nu. Un faible effet allélopathique est peut-être sous-jacent », indique l’ingénieur.

Pour aller plus loin, l’expérimentation ne s’arrêtera pas là. Chaque année, une récolte sur les lavandins de chaque modalité sera réalisée pour suivre les composantes habituellement suivies : poids frais, poids sec, teneur et rendement en huile essentielle. « Nous envisageons de poursuivre l’essai en semant les mêmes espèces, aux mêmes endroits, afin de multiplier l’impact que ce couvert peut avoir sur le sol », conclut Thomas Costes.

Amandine Priolet,
reportage réalisé par L'Agriculture Drômoise
et à découvrir en vidéo

1. Webinaire : contraction de « web » et de « séminaire », il s’agit d’une conférence en ligne à laquelle plusieurs personnes connectées dans des lieux éloignés peuvent participer.
2. Cihef : Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises.

Le couvert de phacélie, semé sur cette parcelle de lavandin de Denis Vernet située à Montagnac-Montpezat (04), a démontré des effets allélopathiques intéressants.

Qu’est-ce qu’une plante allélopathique ?

Sont allélopathiques les organismes, micro-organismes ou végétaux qui inhibent, de façon directe ou indirecte, la croissance d’autres organismes en libérant des composés chimiques nocifs ou toxiques dans l’environnement. Ainsi, les plantes allélopathiques se révèlent être de précieuses alliées dans la lutte contre les adventices, grâce à leurs propriétés phytotoxiques. Les substances perturbent alors les mycorhizes utiles dans la rhizosphère des racines des plantes. Ces plantes allélopathiques peuvent ainsi réduire l’utilisation de produits phytosanitaires.