PRODUCTION LAITIÈRE
Comment gérer l’élévation cellulaire du lait en été ?

En été, la qualité cellulaire du lait peut vite se dégrader. Les éleveurs doivent rester vigilants sur les conditions de traite et adapter si besoin leur stratégie de tarissement.

Comment gérer l’élévation cellulaire du lait en été ?
Les vaches en stress thermique se couchent souvent sur une même zone, ce qui multiplie le risque de contamination de coliformes sur les mamelles. L’éleveur devra vérifier que des zones ombragées sont suffisantes pour favoriser une bonne répartition des vaches. Crédit photo S.Lathuille - EDS

Comme chaque année, les données issues du contrôle laitier montrent une élévation significative, pour certains éleveurs, du niveau cellulaire du lait sur la période d’été. C’est généralement pendant les mois les plus chauds de l’année que ce niveau atteint son pic annuel (voir graphique 1). Pas de doute, la chaleur doit avoir, directement ou indirectement, des répercussions sur la santé mammaire des vaches. Bien sûr, tout n’est pas à mettre sur le compte du stress thermique. Cette augmentation cellulaire s’explique aussi en partie par ce que nous appelons dans notre jargon d’élevage le « mois moyen » ou plus précisément le nombre de mois de lactation moyen de l’ensemble des vaches du troupeau. En effet, chaque année, cette moyenne du nombre de mois de lactation est au plus haut (6,5 mois) sur cette même période d’été et tous les éleveurs savent que plus une vache s’avance dans sa lactation (et donc sa gestation), plus sa mamelle concentre des globules blancs (cellules) dans son lait. C’est une moyenne évidemment ! Tout ne pouvant être expliqué par ce mois moyen, quels sont les autres facteurs de risque dus à la période et comment les prévenir au mieux ?

Conditions de traite et environnement

La machine à traire est un important vecteur de pathogènes. Les coliformes, par exemple, des microbes souvent impliqués dans les montées en cellules l’été, se sentent bien lorsque les températures approchent voire dépassent les 35 °C, car ils retrouvent les conditions proches d’un intestin de mammifère.

À ces températures, ils prolifèrent vite et restent parfois présents dans le matériel de traite en attendant d’infecter d’autres vaches à la traite suivante. C’est pareil pour le matériel d’hygiène comme les lavettes : le lavage de celles-ci doit être impeccable, autrement c’est un potentiel nid à bactéries.

Le produit de post-trempage a également un rôle à jouer. En été, les trayons ont tendance à s’assécher, en particulier si le produit contient de l’iode. Un produit contenant des cosmétiques permet d’atténuer cet assèchement des trayons et l’apparition de crevasses. Ces dernières sont un lieu de prédilection d’autres germes (staphylocoques dorés et autres) et rendent difficile le nettoyage des trayons avant traite. Lorsque les vaches sont en intérieur, avec l’augmentation de la température, les litières sont également favorables au développement des coliformes. Leur entretien régulier est primordial. Par ailleurs, le fait que les vaches subissent un stress thermique les amène souvent à se coucher sur une même zone, y compris au pâturage. Dans ce cas, le fait de se rassembler multiplie aussi les contaminations de coliformes sur les mamelles. L’éleveur devra a minima vérifier que des zones ombragées sont suffisantes pour favoriser une bonne répartition des vaches.

Stress, immunité et mouches

Les vaches souffrent rapidement de la chaleur. Au-delà de 15 °C, elles luttent déjà pour en évacuer. Les conditions d’été provoquent donc un stress thermique les amenant à sélectionner ce qui se digère facilement (les concentrés) et minimiser la fibre qu’il faut longuement ruminer. L’herbe est moins appétente et nécessite de marcher. La salive s’étant en partie évaporée, elle n’est plus suffisante non plus pour contrer l’acidose. Nous avons donc des vaches moins bien nourries, en déséquilibre, qui sont pour finir plus fragiles et moins aptes à se défendre contre les agressions pathogènes.

Pour finaliser le tableau, les mouches viennent profiter du sel de la sueur et des larmes et aussi de la moindre goutte de lait des vaches les plus faibles. Les queues battent dans tous les sens et répandent les bouses d’une vache à l’autre.

Et les vaches taries ?

Comme nous l’avons mentionné plus tôt, la période chaude voit son mois moyen de lactation s’avancer, ce qui induit que plus de vaches arrivent en fin de lactation. Il faut donc gérer au mieux cette période de tarissement qui doit être une période d’assainissement pour les mamelles, malgré la chaleur. Il faut séparer les deux troupeaux pour respecter des besoins alimentaires différents et le repos mammaire. Il existe des minéraux spécialement produits pour les taries qui inversent la BACA (balance anion-cation) et permettent un meilleur démarrage post-vêlage. Si un protocole de soin sélectif pour le tarissement a bien été défini par le vétérinaire de l’exploitation, les données issues du contrôle laitier permettent de bien différencier les vaches à risque nécessitant un traitement ciblé de celles qui peuvent se permettre un protocole minimal. 

Noémie Pawlicki, référente qualité du lait à Éleveurs des Savoie

Les coliformes, souvent impliqués dans les montées en cellules, se développent lorsque les températures approchent voire dépassent les 35 °C. ©CNIEL
Un outil de suivi utile pour la santé mammaire
MIL'KLIC

Un outil de suivi utile pour la santé mammaire

Le logiciel d’élevage Mil’Klic valorise les résultats du contrôle laitier tout au long de l’année. Il permet d’obtenir des données intéressantes, notamment concernant le tarissement. L’exemple ci-dessous permet  d’observer le niveau d’infection cellulaire des vaches avant et après tarissement. Il permet de voir si les vaches guérissent ou ont tendance à rester infectées après tarissement.

Dans l'exemple ci-dessous, on observe que sur 11 vaches au-dessus de 300 000 cellules avant tarissement, 10 ont guéri, soit 91 %. C’est bien. En revanche, sur les 27 considérées saines avant tarissement, 2 se sont infectées. Il faut creuser. En un coup d’œil, cela permet donc de remettre en cause ou non le protocole de tarissement de chaque catégorie. Avec le conseiller de l’élevage et le protocole du vétérinaire, cet outil est entièrement paramétrable pour affiner les tris des vaches selon des niveaux de risque qui prennent en compte l’historique vache, l’historique troupeau, le mode d’élevage, l’environnement, la physionomie mammaire… Ce suivi se fait en quatre étapes pour arriver au bilan et définir l’action à mener. Une vache infectée dès le début de sa lactation et qui l’était déjà lors de sa lactation précédente est une vache qui a peu de chance de guérir et qui engendre une perte financière via son traitement, sa perte de production, son lait écarté, la contamination éventuelle du lait… Alors mettez toutes les chances de votre côté pour avoir un maximum de vaches saines y compris après la période chaude !