SEMIS DIRECT
Le semis direct, une pratique courante en devenir ?

Mylène Coste
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SEMIS DIRECT / Si l’agriculture de conservation commence doucement à prendre de l’ampleur dans les pratiques culturales des agriculteurs, le semis direct est encore peu utilisé. Qu’en est-il vraiment ?

Le semis direct, une pratique courante en devenir ?
Semis sous couvert.

On le sait, l’agriculture ne cesse d’évoluer vers des productions plus durables, pour réduire l’impact environnemental que peuvent avoir certaines pratiques. En ce sens, et depuis ne dizaine d’années, de nouveaux modes culturaux se développent. C’est le cas notamment du semis direct. Cette démarche se définit par une absence totale du travail du sol, donc sans labour ni déchaumage. Le semis direct permet ainsi une implantation plus rapide qu’une technique de semence conventionnelle, sans travail de la terre au préalable.
« Le semis direct permet ainsi de préserver le sol contre une éventuelle érosion. Il joue également un rôle sur la fertilité du sol et son activité biologique, puisqu’il
favorise notamment l’activité des vers de terre », explique Mikaël Boilloz, conseiller légumes et grandes cultures à la Chambre d’agriculture de la Drôme et référent sur l’agriculture de conservation. Avant de rajouter : « L’enjeu ici est de conserver la matière organique en superficie ». Au-delà du semis direct, l’une des approches fondamentales de l’agriculture de conservation, d’autres piliers doivent être associés.

Plusieurs piliers de réussite

 « Pour une meilleure réussite, il convient notamment d’installer une rotation culturale associée à une couverture maximale des sols. Les couverts végétaux, comme des associations légumineuses et graminées, voire crucifères, sont essentiels à intégrer pour plusieurs objectifs : fragmenter la structure du sol, apporter de l’azote et du carbone, favoriser le ressuyage des sols, etc. On recommande également de commencer avec des cultures d’automne, comme le blé, plus facile  d’installation. Il y a ainsi moins de risque de compétition avec les adventices », développe-t-il. Certaines cultures semblent d’ailleurs plus propices au semis direct, comme les céréales.
Si l’intérêt agronomique n’est plus à démontrer, cette technique culturale offre également un gain de temps non négligeable à l’agriculteur, et donc, une réduction des charges, difficilement chiffrable toutefois. « Le semis direct nécessite moins de temps de main d’oeuvre et permet aussi de réaliser une économie de gasoil », poursuit Mikaël Boilloz. Pour autant, cette pratique n’est pas encore courante : « dans la Drôme, le semis direct pur est effectué sur 2 à 3 % des surfaces en grandes cultures », avoue le conseiller. Plusieurs explications à cela : « beaucoup d’agriculteurs craignent de perdre en sécurité, notamment en termes de rendement et de gestion de l’enherbement». Cette pratique culturale réclame ainsi un fort travail d’anticipation, sur les différents apports à prévoir, dans un souci de générer du rendement : « il faut toujours s’adapter, observer et anticiper sa gestion de la fertilisation », prévient-il.

Un investissement lourd

Mikaël Boilloz, conseiller référent sur l’agriculture de conservation à la Chambre d’agriculture de la Drôme, anime un groupe d’agriculteurs sur les différentes techniques de conservation du sol.

De plus, le semis direct nécessite d’avoir un matériel spécifique qui s’avère être onéreux (de 20 000 à 80 000 €). « Les semoirs directs à écartement faible, à dents ou à disque, représentent un vrai investissement de départ », note Mikaël Boilloz.« La plupart des marques développe cette gamme de matériel, qui reste complexe à prendre en main ». Ainsi, les premiers utilisateurs du semis direct dans la Drôme s’accordent à dire au conseiller de la Chambre d’agriculture que la méthode « n’est pas simple à mettre en place et que le retour sur investissement peut paraître long à se dessiner ». Passer au semis direct, c’est donc changer complètement ses pratiques vers une plus grande autonomie de l’agriculture, moins consommatrice d’intrants avec la valorisation des couverts végétaux. Pour s’intéresser de plus près à cette technique et se former, des groupes d’agriculteurs se sont constitués, dans la Drôme notamment, pour échanger autour de ces thématiques (Renseignements et contacts pour rejoindre l’un de ces groupes : Mikaël Boilloz au 06 20 88 81 05).

Amandine Priolet