CAPRIN LAIT
Accompagner l’installation en élevage caprin et prévenir des risques

Organisée par le Criel Alpes Massif central, une journée installation caprine s’est tenue le mercredi 6 décembre à Épercieux-Saint-Paul (Loire). Au programme : présentation de l’interprofession, éléments de conjoncture, visite de ferme et gestion du sanitaire.

Accompagner l’installation en élevage caprin et prévenir des risques
De bonnes conditions d’élevage couplées à des pratiques de bon sens et un minimum de prévention contribuent à éviter la pasteurellose et à obtenir des chevrettes puis chèvres de qualité. ©Axel_Poulain

Rencontre visant à partager des informations avec l’ensemble des réseaux de la filière, la journée installation caprine du Centre régional interprofessionnel de l’économie laitière (Criel) Alpes Massif central (AMC) s’est tenue le mercredi 6 décembre à Épercieux-Saint-Paul dans la Loire. Ils étaient nombreux – une soixantaine – à assister à ce rendez-vous ouvert à l’ensemble des jeunes éleveurs, porteurs de projet et partenaires de la filière. Cette année, la thématique choisie était : « S’installer en élevage caprin laitier : mettre toutes les chances de son côté lors de la constitution du troupeau ». Au menu du jour : présentations des différents intervenants du Criel AMC, de l’Aurae (Auvergne Rhône-Alpes Élevage) ou encore de la chambre d’agriculture de la Loire, entre rappel du rôle et des missions du centre régional de l’interprofession, partage d’informations sur le parcours à l’installation (voir encadré) et la nouvelle DJA (Dotation jeunes agriculteurs), présentation de la filière caprine régionale, de la conjoncture du lait de chèvre ou encore de la charte à l’installation. Rendez-vous était ultérieurement donné sur la ferme de Clément Morel. Deux groupes s’étaient préalablement formés afin de participer aux ateliers, d’environ une heure chacun. Le premier a porté sur la constitution du troupeau, dans lequel l’hôte du jour a présenté son exploitation. Clément Morel s’est installé au 1er février 2020, après avoir travaillé dans la distribution en tant que technico-commercial. L’exploitation appartenait à d’anciens clients prêts à partir à la retraite. Ces derniers étaient en production vaches allaitantes et volailles. « Pour que la transition se passe bien, l’échange entre cédant et repreneur est très important. Quand je leur ai dit que je souhaitais reprendre leur exploitation, mais plutôt en chèvres, ils ont été d’accord tout de suite », indique le jeune éleveur. À leurs débuts, les anciens propriétaires avaient également un projet en chèvres, car une laiterie devait se mettre en place dans la commune. Aujourd’hui, dans son bâtiment, Clément Morel élève 300 chèvres et 125 chevrettes. Épaulé par Emma Rival, de Loire conseil élevage, il a souligné « l’importance d’adapter son troupeau, lors de sa constitution, aux objectifs de chacun ».

Le sanitaire au coeur des préoccupations

Le second atelier a abordé la gestion du sanitaire sur les premières années d’installation. Johanna Barras, du GDS de la Loire, a expliqué « qu’il n’était pas possible de faire une journée pareille sans parler de ce que l’on appelle la biosécurité ». Elle a partagé quelques règles afin d’éviter l’incident sanitaire sur son élevage. Premièrement, il est important d’appliquer les précautions de base de prévention sanitaire, à savoir : éviter l’introduction d’agents pathogènes ; limiter l’infection de l’Homme par contact direct ou indirect avec les agents pathogènes ; restreindre la diffusion des agents pathogènes à l’extérieur de l’exploitation et leur persistance dans l’environnement. Ce respect des règles est indispensable pour la santé et le bien-être de ses animaux, pour valoriser leurs performances (croissance, production), ainsi que pour limiter les frais et la charge liés aux soins pour travailler plus sereinement. « Ce que l’on propose au GDS, c’est la réalisation de statuts sanitaires, qui comprend quatre maladies (Caev, paratuberculose, chlamydiose et fièvre Q) », a indiqué la technicienne. L’idée est donc de savoir quelles maladies sont présentes dans le troupeau pour en gérer au mieux les conséquences. Ainsi, elle préconise de faire réaliser ces statuts par son vétérinaire lors d’une introduction (boucs, chevrettes, etc.) ; tous les cinq ans au moment de la prophylaxie pour faire un point sur la situation ; en cas de constitution de cheptel dans chaque lot d’achats en amont pour voir la compatibilité des statuts avec celui de son troupeau. « Quand vous êtes jeunes installés, les statuts sanitaires sont pris en charge par nos soins à 100 % », a-t-elle souligné.

Le GDS intervient également au niveau du bâtiment d’élevage, « clé principale de bonne santé et de pérennité d’un troupeau », et ce dès sa conception. Il est ainsi primordial de s’assurer du confort des animaux et des personnes qui vont y travailler, mais aussi de l’utilisation de matériaux sains pour la pérennité de l’environnement. Aussi, il est utile de respecter des normes pour une production optimale et d’apporter une bonne ventilation et luminosité. « Un bâtiment ouvert sans courant d’air favorise le renouvellement de l’air et une bonne ventilation », a insisté Johanna Barras. Par ailleurs, il est possible d’effectuer un diagnostic, ceci afin de s’assurer du bon déroulement du projet.

La pasteurellose, fléau de l’élevage

Francis Mainage, vétérinaire au sein du cabinet SudElvet, s’est focalisé sur les maladies respiratoires chez les caprins. Le choix a été fait de sensibiliser tout particulièrement sur la pasteurellose des chevrettes, fléau subi par Clément Morel quelques années auparavant. Cette maladie infectieuse, pouvant atteindre les adultes comme les jeunes, entraîne des mortalités, des retards de croissance, des saisies à l’abattoir et peut être compliquée par d’autres “malfaiteurs” (comme le mycoplasme). Le vétérinaire a énuméré les trois formes de symptômes : suraiguë (mortalité subite par septicémie), aiguë (hyperthermie, toux, essoufflement, jetage, chevreaux tapeurs … pouvant évoluer vers la mort ou la chronicité) et chronique. Afin d’établir un diagnostic, il faut « procéder à une autopsie », initiative qui peut se révéler salvatrice afin de sauver un troupeau. Le professionnel de santé animale a rappelé que Clément Morel, lors de l’arrivée de la pasteurellose, était passé par cette « étape difficile », ce qui lui avait toutefois permis « d’éviter le pire », à savoir de voir son troupeau décimé. Il a recommandé ensuite la mise en place d’un traitement antibiotique et anti-inflammatoire afin de limiter les pertes, et ce en respectant la règle du « VFL » : vite (dès les premiers symptômes), fort (bien adapter la dose au poids des animaux) et longtemps (couverture de cinq jours minimum). Francis Mainage a suggéré par ailleurs le traitement symptomatique, ceci afin d’aider à respirer, diminuer la toux et assainir. Il a invité également les participants à cette journée à se pencher vers la phytothérapie ou l’aromathérapie
À l’heure de dresser un bilan, Francis Mainage a rappelé que de bonnes conditions d’élevage couplées à des pratiques de bon sens et un minimum de prévention (sanitaire pour limiter les facteurs de risque ; médicale avec la vaccination, bien que les résultats soient encore trop aléatoires et souvent décevants) contribuent à éviter la pasteurellose et à obtenir des chevrettes puis chèvres de qualité.

Axel Poulain

Sur la ferme de Clément Morel, à Épercieux Saint-Paul dans la Loire. ©Axel_Poulain
INSTALLATION

Charte et mode opératoire

En Auvergne Rhône-Alpes, les partenaires de la filière ont pris des engagements envers les porteurs de projet en signant une charte en 2018, dans un contexte favorable pour la valorisation du lait.

La charte à l’installation caprine laitière régionale renvoie à un partage de principes : un revenu satisfaisant qui apporte de l’attractivité pour donner envie aux futurs éleveurs et salariés ; l’installation qui s’appuie sur le dispositif transversal installation-transmission ; une démarche régionale complémentaire qui donne de la visibilité aux démarches départementales d’entreprise. Marie-Laure Berchoux, conseillère Point accueil installation (PAI) de la chambre d’agriculture de la Loire, a présenté les différentes étapes de l’accompagnement à l’installation. Désireux de s’informer et de clarifier son projet, le candidat doit se renseigner auprès du PAI de son département après avoir fixé un rendez-vous au préalable. L’entretien est d’ailleurs gratuit pour le porteur de projet. Le PAI remet donc au candidat l’auto-diagnostic, outil d’aide à la réflexion pour définir le projet et ses objectifs, afin de construire le PPP (Plan de professionnalisation personnalisé). Vient ensuite la phase d’élaboration du PPP, entre entretien individuel avec un conseiller, par exemple, et la réalisation de formations ou stages préconisés par ses soins. Lorsque l’agrément est accordé par l’État, le PPP peut être réalisé, mais doit respecter une durée de validité de six ans maximum (entre l’agrément et la validation du PPP, trois ans maximum ; entre la validation et l’installation du porteur de projet, trois ans maximum). Le candidat doit ensuite élaborer et chiffrer son projet, car son dossier d’installation est composé de trois éléments : diagnostic préalable au projet, étude de faisabilité et plan d’etreprise formalisé. La dernière étape consiste à suivre le processus décisionnel, lequel s’étend sur une période d’un mois, entre le comité d’étude des projets, le comité de sélection régional, l’arrêté du président, le comité de programmation et enfin la décision juridique.