DRÔME ARDÈCHE
Les entrepreneurs agricoles ont été mis à rude épreuve

Stéphane Blard, président du syndicat des entrepreneurs agricoles de Drôme-Ardèche, réunis au niveau national sous la bannière Entrepreneurs des territoires, dresse le bilan d’un été compliqué. 

Les entrepreneurs agricoles ont été mis à rude épreuve
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Stéphane Blard, président du syndicat des entrepreneurs agricoles de Drôme-Ardèche.

Les récoltes de céréales se sont déroulées dans des conditions climatiques catastrophiques. Comment les entrepreneurs de travaux agricoles ont-ils traversé cette période ?

Stéphane Blard : « Nous avions attaqué une saison a peu près normale avec les orges, puis la pluie est arrivée et tout s’est compliqué. Cette saison a été usante moralement et nerveusement pour nous et nos familles. Nous n’arrivions pas à récolter, la terre était mouillée, il pleuvait tous les deux ou trois jours. Les machines étaient au champ sans pouvoir tourner car l’humidité du grain était trop haute. Nous avons aussi dû faire face à des blés couchés, ce qui a amené beaucoup de casse de matériel et réduit de moitié les débits de chantier. Sans oublier une augmentation de la consommation de carburant et des déplacements supplémentaires pour recommencer au plus tôt sur les parcelles les plus sèches après chaque épisode de pluie. Nous avons tous été mis à rude épreuve et il faut un certain engagement dans son métier d’entrepreneur agricole pour ne pas décider de jeter l’éponge après un tel épisode. Certains collègues envisagent aujourd’hui de diminuer voire d’arrêter les prestations de récolte sur lesquelles nos marges sont très faibles. » 

Qu’est-ce qui vous a permis de faire face ?

S.B. : « En Drôme et Ardèche, les entrepreneurs sont équipés de matériels performants. Heureusement, c’est ce qui leur a permis de mener à bien les récoltes malgré cet épisode pluvieux. Mais être ainsi équipé a un coût, d’où nos marges très faibles. 

Au travers du syndicat, il y a eu aussi de l’entraide entre entreprises pour finaliser les chantiers. Nous pouvons également remercier nos chauffeurs de moissonneuses-batteuses qui ont répondu présents. Enfin, les organismes stockeurs ont travaillé plus tard le soir, ouvert les week-ends et accepté de prendre du blé avec un taux d’humidité un peu plus important, sans pénaliser l’agriculteur, ce qui nous a permis de reprendre les récoltes un peu plus tôt. » 

Où en est le calendrier de vos chantiers ?

S.B. : « Après ce mois de juillet catastrophique, le calendrier des travaux est revenu à la normale. Nous sommes en plein dans la récolte des tournesols semence et consommation mais désormais dans les temps grâce à des conditions chaudes et sèches en août et sur la première quinzaine de septembre. Nous devrions être en pleine saison des maïs autour du 15 octobre. » 

Vos entreprises sont-elles touchées par les difficultés actuelles sur le marché des agroéquipements, liées notamment à la pénurie de matières premières ?

S.B. : « Certaines commandes faites en novembre 2020 ne sont toujours pas arrivées. C’est le cas de bennes pour des pommes de terre par exemple alors que la récolte a attaqué, mais aussi de tracteurs, de déchaumeurs qui devaient être livrés en août et ne sont pas toujours par là. Les entreprises tournent pour l’instant avec le matériel qui devait être remplacé. Ce qui ne pose pas trop de problèmes pour ceux qui avaient renouvelé régulièrement leurs équipements. En revanche, c’est très compliqué pour ceux qui ont du matériel vraiment usé et ont dû dans certains cas suspendre leur activité. 

Du côté des pièces détachées, les concessionnaires ont bien géré leurs stocks. Nous n’avons pas été trop pénalisés sur les délais. Heureusement. Avec les conditions de récolte que nous avons connues, nous ne pouvions pas nous permettre de ne pas être prêts à intervenir au bon moment ». 

Quels sont les sujets qui vont mobiliser votre syndicat dans les prochains mois ? 

S.B. : « Nous sommes préoccupés depuis plusieurs années par les difficultés de circulation de nos machines sur les routes de Drôme et d’Ardèche. Notre matériel est homologué sur route mais parfois nous ne pouvons pas circuler sur la voirie communale. En cause : la présence de branches qui dépassent des propriétés privées. Cela ne pose pas de problème pour les voitures mais avec nos engins, nous subissons de la casse sur les phares, les gyrophares ou sommes obligés de nous déporter. Nous avons écrit aux mairies pour signaler ces dangers et demander que ces arbres soient élagués mais nous n’avons obtenu que très peu de réponses. Aussi, nous comptons cet hiver nous rendre sur place avec les élus concernés. Et nous envisageons de réaliser une vidéo pour faire prendre conscience au public des risques liés à ce laxisme sur l’entretien des arbres en bord de route.

Enfin, dans un contexte où le prix du GNR a bondi de 30 % en neuf mois et où le prix des pièces et des équipements flambent également, j’invite les entrepreneurs de travaux agricoles à se pencher attentivement sur leurs coûts de production. Une hausse des tarifs de prestation devra certainement être envisagée. C’est indispensable pour que nous puissions continuer d’investir et disposer de matériel fiable. »

Propos recueillis par Sophie Sabot