DÉFORESTATION
Le chef papou, Mundiya Képanga, ambassadeur de la forêt

Pierre-Louis Berger
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Le chef papou, Mundiya Képanga, était l’invité du lycée agricole Le Valentin à Bourg-lès-Valence (Drôme) pour témoigner du réchauffement climatique et lutter contre la déforestation en Papouasie-Nouvelle- Guinée et dans le monde. Une rencontre haute en couleur !

Le chef papou, Mundiya Képanga, ambassadeur de la forêt
Le 8 mars au lycée agricole Le Valentin à Bourg-lès-Valence, le chef papou Képanga a alerté le monde occidental sur les effets dévastateurs de la déforestation. ©PLB

Son entrée dans la salle de conférence du lycée agricole du Valentin à Bourg-lès-Valence (Drôme) était fortement attendue par une centaine de personnes sensibilisées aux problèmes de l’environnement et de la déforestation. Le chef papou, Mundiya Képanga, est arrivé de Papouasie-Nouvelle-Guinée le 8 mars accompagné de son interprète, sous les applaudissements du public. Face au désastre écologique et humain qui menace la planète, le chef papou s’est mobilisé : « J’ai été à la Cop 21 en 2015 pour témoigner du réchauffement climatique. Le plus important est d’agir, d’agir vite. Si on ne prend pas soin de la nature, on ne pourra pas vivre sur cette planète. La déforestation aura des incidences sur nos modes de vie. Partout en Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’environnement est menacé. » La Papouasie-Nouvelle-Guinée se situe au Nord de l’Australie. Elle représente l’un des derniers sanctuaires de l’humanité avec une forêt primaire, une biodiversité exemplaire, plus de 1 500 essences différentes d’arbres et quelque 750 espèces d’oiseaux dont le casoar ou le papillon géant Alexandra Queen.

Premier exportateur de bois dans le monde

La Papouasie-Nouvelle-Guinée comprend 23 provinces et 800 tribus. Depuis 2014, cette grande île est le premier exportateur de bois dans le monde. La loi gouvernementale de 2007 a accéléré la déforestation et incité les compagnies forestières à faire du profit en exportant, souvent de façon illégale, du bois vers la Chine. Les compagnies forestières se sont installées sur la côte et malgré les contrôles de police qui relèvent des irrégularités, la déforestation continue. Quand Mundiya Képanga parle de son village, l’émotion devient plus forte : « Ma tribu vit dans la montagne, dans la dernière forêt primaire de mon pays. Nous vivons d’agriculture vivrière, de culture de patates douces, d’élevage de cochons. Nous avons peu de ressources pour acheter du sel, par exemple. Les femmes sont impactées par la déforestation car elles ne trouvent plus comme avant des animaux sauvages dans la nature. La déforestation se poursuit sur la côte. Elle ne profite pas aux villages pauvres car le bois est exporté et non transformé sur place. Ma forêt est menacée. Nous ne pourrons jamais revenir en arrière. »

Un début de prise de conscience

Celui qu’on appelle aussi « le fils de la forêt » est un ambassadeur de la nature. Né sous un arbre, dans la mousse, il s’est construit une philosophie, un discours depuis cette île dont la biodiversité est mise à mal. Il a publié deux livres en forme de contrepoint, dont un livre pédagogique pour les enfants et un livre de poche pour les adultes. Il a aussi édité un DVD et participé au documentaire « Frères des Arbres » auquel il a prêté sa voix. Ce film, sorti en 2017, a été réalisé par Marc Dozier et Luc Morescot. Y a-t-il eu une prise de conscience depuis la sortie de ce documentaire ? « Depuis la réalisation de ce film, il y a des changements dans les mentalités et un début de prise de conscience dans mon pays. Des exploitations forestières ont fermé sur l’île mais le nouveau premier ministre est plus vigilant. On constate moins d’exploitations illégales », précise le chef papou. Il a annoncé devant le public qu’il y aurait une suite à ce premier film sous la forme d’un documentaire. Mundiya Képanga est venu des dizaines de fois en France pour porter son message, sensibiliser le plus grand nombre à la préservation de l’environnement et aux dangers de la déforestation. Depuis 2003, il voyage en Europe pour lutter contre la disparition des forêts dans son pays mais aussi en Amazonie, au Brésil etc.

« Choisissez ce qui est le meilleur pour la planète »

En 2009, le chef papou avait planté un arbre à Bourg-Saint-Andéol en Ardèche, et un olivier au lycée agricole du Valentin dans la Drôme. Il a également été reçu au Sénat à Paris par le président, Gérard Larcher, qui a confirmé l’interdiction de l’importation de bois non certifiés. Ses démarches successives l’ont amené sur la scène internationale. Sa voix résonne aujourd’hui dans le monde quand il parle de réchauffement climatique et de disparition de la biodiversité : « La forêt primaire dans mon pays a été remplacée par d’immenses plantations de palmiers à huile pour produire de l’huile de palme. Je n’aime pas interdire quoi que ce soit, mais préférez le bois local aux forêts équatoriales. Choisissez ce qui est le meilleur pour la planète. » Un discours que le public a applaudi une dernière fois, convaincu par le combat du chef papou.

Pierre-Louis Berger

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Séance de dédicace de livres pour le chef papou au lycée agricole Le Valentin. ©PLB
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Une dizaine de lycéens du lycée du Valentin ont participé à l’organisation de cette soirée débat et à la projection du film « Frères des arbres ». ©PLB
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